Laurent Ciman, Tim Bozon et Boris Bédé

Trois sports, une seule amitié

C’est par le truchement d’un reportage que Laurent Ciman, défenseur de l'Impact, a découvert l’histoire de Tim Bozon, ailier gauche du club-école du Canadien, atteint d’une méningite en 2014. Cette histoire les a rapprochés, après quoi ils ont développé une amitié avec le botteur des Alouettes Boris Bede, qui a le même agent que Ciman. Pour La Presse, les trois protagonistes racontent leur histoire et leur admiration mutuelle.

LE REPORTAGE ET LA RENCONTRE

Tim Bozon, ailier gauche des IceCaps de St. John’s : « Je savais qu’un reportage comme ça serait extrêmement populaire en France, en Suisse, en Belgique. Je savais que beaucoup de gens s’intéresseraient à mon histoire. Beaucoup de gens l’ont vu, même s’ils ne m’ont pas tous écrit. »

Laurent Ciman, défenseur de l’Impact : « Toute l’histoire de Tim m’a touché quand on voit par où il est passé, comment il a récupéré et travaillé pour revenir. C’est un battant qui ne lâche rien et je m’y retrouve un peu là-dedans. Ma petite fille est atteinte d’autisme… C’est une preuve du courage qu’il a eu en sortant de cette maladie-là. C’était vraiment un reportage émouvant, notamment de voir ses parents et ses proches. Par la suite, on s’est contactés en privé sur Twitter. »

T.B : « C’est comme ça qu’on a commencé à se parler. Une fois à Montréal, je l’ai appelé pour des billets pour l’Impact, j’ai été à un match. Je l’ai rencontré après, il m’a donné son maillot, il m’a parlé du documentaire. Il m’a aussi présenté son agent, qui habite à Montréal depuis huit ans, mais qui vient du même coin de France que moi. Il est aussi l’agent de Bede. Il savait qui j’étais, il connaissait mon père [Philippe Bozon] et il avait vu mon reportage. »

Boris Bede, botteur des Alouettes : « Ce sont à la base de très bons gars. On a aussi cet esprit qui nous rapproche par rapport au monde dans lequel on baigne toute la journée. En tant qu’athlètes de haut niveau, on a des points en commun et la relation a très bien marché dès le début. Ç’a été très le fun. Et quand on se retrouve entre Européens ou Français, il y a une certaine facilité pour se familiariser. »

L.C. : « Quand on s’est vus avec Tim, ç’a directement pris. C’est un gars cool qui ne se prend pas la tête et c’est la même chose pour moi. Quand on sait rester simple, ça fonctionne avec tout le monde. Après, il y a des gens avec qui on s’entend moins bien, mais ça s’est bien passé entre Tim, Boris et moi. »

B.B : « J’avais entendu parler de Laurent au niveau de l’Impact. C’est un joueur très aimé du club et des fans. Il a fait beaucoup. Je suis un peu plus les matchs depuis que je le connais. C’est un bon athlète et il amène cette connaissance européenne du football dans la MLS et avec l’Impact. Tim est vraiment cool, très posé. Je n’ai pas eu le temps de le connaître autant que Laurent, mais c’est un bon gars et je lui souhaite le meilleur pour sa saison. »

UNE PASSION COMMUNE :  LE SOCCER ET… DROGBA

L.C. : « Qui n’aime pas Didier [Drogba] ? Quand on sait ce qu’il a fait et ce qu’il a gagné, il a acquis le respect partout où il est passé. Tout le monde veut faire une photo. Tim l’a finalement prise quand il est venu voir un entraînement. Je l’ai fait entrer dans les installations [du centre d’entraînement à la Caserne Letourneux] et il a pu parler cinq ou six minutes avec Didier. Il était tout content. »

T.B. : « [Drogba] était super sympa. Il est vraiment humble pour la personne qu’il est. Je vais m’en souvenir toute ma vie. Je lui ai dit que j’étais un fan de l’Olympique de Marseille quand il avait joué chez nous, que j’étais un grand fan. Ça n’a pas duré super longtemps, mais c’était cool. Je ne sais pas s’il a vu le documentaire, mais je sais qu’il suit le compte Twitter de l’émission [Intérieur sport]. Je ne le lui ai pas demandé car je ne voulais pas qu’on parle de moi ! C’est une légende. Les gens à Montréal ne saisissent peut-être pas à quel point il est une vedette. Je le mets dans la même catégorie que [David] Beckham. J’ai toujours été fan de soccer, j’ai grandi avec le soccer. Quand j’avais 7 ans, je jouais au soccer et au hockey. Ensuite, j’ai dû faire un choix, mais je continuais à aller aux matchs. »

B.B. : « J’ai vu Drogba quand il était avec l’Olympique de Marseille. C’était le gros joueur, il avait marqué 32 buts cette année-là. Le voir à Montréal, c’est énorme. Je suis toujours fan de l’OM, mais je commence à prendre du plaisir à voir l’Impact. Le soccer est une grosse partie de ma vie. Je l’ai pratiqué jusqu’à ce que je parte aux États-Unis [à l’âge de 15 ans] et j’ai un peu continué après. Mon père et mon grand-père ont joué au soccer. C’est un sport qui me manque, mais, en bout de ligne, j’ai réussi à percer dans le football. »

ADMIRATION RÉCIPROQUE

L.C. : « Je connais pas mal de choses sur le hockey. Après, le pratiquer, c’est autre chose. Quand on voit la facilité qu’ils ont à jouer sur la glace, c’est quand même impressionnant parce que c’est loin d’être facile. Pourquoi ne pas apprendre auprès de Tim, ne serait-ce que pour patiner et ainsi apprendre à me fondre dans le Québec et m’intégrer dans la ville. Je sais que Patrice [Bernier] pourrait aussi me montrer deux ou trois trucs. J’aurais du temps libre pendant l’hiver et c’est un sport vers lequel je me tournerais bien en prenant les précautions nécessaires. »

B.B. : « Laurent pourrait-il faire ce que je fais ? [Il s’exclame longuement.] Je ne sais pas. Peut-être bien, mais ça prend de l’entraînement. N’importe quel joueur de soccer pourrait frapper un ballon [ovale], mais après, il faut être capable de le faire avec le stress, le timing, la puissance, la vitesse, l’enchaînement du mouvement au complet… L’important, c’est la conscience de la frappe. Tu passes d’un ballon rond où il y a plein de points de contact à un ballon ovale où il faut vraiment avoir un certain endroit pour pouvoir bien frapper. »

L.C. : « On croit que c’est facile, mais ce n’est pas évident ce que Boris fait. Il y a tout un rituel dans la tête, et comme il m’a dit, ce n’est pas la force qui compte, mais vraiment le mental : comment tu te places, comment tu fais ton geste. Après, ce sont des répétitions et je ne sais pas combien de fois par jour il le fait. »

T.B. : « On est tous un peu admiratifs l’un de l’autre. On aime le soccer, le foot, ils aiment le hockey, on parle de différentes choses. Ils sont vraiment impressionnés par le hockey. Ils ne s’y connaissaient pas beaucoup avant. C’est toujours sympa d’échanger avec des athlètes de différents sports. Cet été, il y a un match où Boris avait fait cinq placements, son équipe était pourrie et c’est lui qui faisait tous les points ! C’était le match contre la Colombie-Britannique avec tous les revirements. Quand Laurent s’est pris son carton rouge, j’étais à l’aéroport à Calgary, et je lui ai écrit. On se soutient beaucoup, les trois. »

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