RAPPORT DU PROTECTEUR DU CITOYEN

Le retour à l’équilibre budgétaire s’est traduit par une réduction des services affectant particulièrement les personnes vulnérables, s’est alarmée hier la protectrice du citoyen lors du dépôt du rapport annuel de l’organisme.

protectrice du citoyen

« L’austérité a fait mal »

QUÉBEC — « L’austérité a fait mal », et bien davantage aux personnes vulnérables qu’à l’appareil bureaucratique, dénonce la protectrice du citoyen, Raymonde Saint-Germain.

Celle-ci a voulu envoyer un « signal d’alarme », hier, à l’occasion du dépôt de son dernier rapport annuel à l’Assemblée nationale. Le gouvernement doit « faire un changement de cap » et « mesurer l’impact pour les personnes vulnérables » de ses compressions, a affirmé Mme Saint-Germain, qui a décliné l’offre d’un troisième mandat. Elle quitte son poste après en avoir fait deux, soit dix ans de service en tout.

Sa sortie contredit la thèse du gouvernement selon laquelle les « mesures d’optimisation » ne ciblent que l’administration. « L’austérité a fait mal », a-t-elle dit, utilisant un mot honni au gouvernement pour décrire l’opération de retour à l’équilibre budgétaire.

« Au fil des ans, j’en suis arrivée à croire que les compressions budgétaires cumulées […] ont malgré tout été moins éprouvantes pour la bureaucratie que pour les personnes vulnérables », a-t-elle soutenu. 

« Je ne conteste pas la nécessité d’avoir redressé les finances publiques, mais certains choix, il faut le reconnaître, ont été, en termes de services et d’impacts sur les citoyens, au détriment de ces personnes. »

— Raymonde Saint-Germain, protectrice du citoyen

Elle en veut pour preuve la réforme du réseau de la santé et des services sociaux pilotée par le ministre Gaétan Barrette. Cette réforme, adoptée sous le bâillon à l’Assemblée nationale et mise en œuvre au printemps 2015, visait entre autres à fusionner les établissements de santé.

« Le manque de planification de la transition pour une réforme de cette ampleur […] a réduit l’accès aux services, a constaté Mme Saint-Germain. Lors de l’intégration des offres de services locales à l’échelle régionale en matière de services à domicile, on a eu tendance à implanter à l’ensemble du territoire la moins généreuse des offres. »

Bref, « on a nivelé par le bas » l’offre de soins. Des personnes âgées ou handicapées ont subi une réduction des heures de services ou n’y ont plus droit du tout, même si leurs besoins sont les mêmes et que les critères d’admissibilité n’ont pas changé. Mme Saint-Germain ajoute qu’« en conséquence de la réforme », « la majorité des établissements interprètent de façon restrictive les normes d’admission aux services en déficience ».

DÉGRADATION

Elle constate que l’accès aux services publics s’est dégradé au cours de ses 10 ans de mandat. Selon elle, « l’écart se creuse entre la demande et l’offre de services, cela considérant la courbe démographique ».

« Au fil des compressions cumulées d’une année à l’autre, c’est sûr qu’on le voit : les listes d’attente s’accroissent, les délais sont plus grands » pour obtenir une chirurgie, une indemnité à la suite d’un accident de travail ou encore des services d’orthophonie pour un enfant de 3 ans. « La situation a atteint un point critique », a-t-elle insisté.

Pour plusieurs ministères et organismes, elle révèle des « exigences excessives », des « formulaires conçus pour celui qui les administre et non pour celui qui doit les remplir » et des « étapes de supervision et de contrôle exagérés, qui grugent indûment le temps des agents dont la priorité doit être le service à la population ».

Le gouvernement devrait s’attaquer à ces « manifestations de la bureaucratie » pour s’assurer que les ressources sont consacrées aux services directs à la population, a affirmé la protectrice.

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