COMMERCE DE DÉTAIL

L’entrée en Bourse de Shopify inspire LightSpeed

L’introduction en Bourse réussie de Shopify, jeudi dernier, a réjoui l’ensemble du secteur technologique canadien, mais probablement pas autant que les fondateurs de la montréalaise LightSpeed, en pleine expansion, qui y voient un symbole fort.

Dax Dasilva, président et fondateur de LightSpeed, et le premier dirigeant Jean-Paul Chauvet étaient tout sourire, vendredi dernier, quand La Presse Affaires les a rencontrés dans leurs nouveaux bureaux de la gare Viger, où l’entreprise vient de transporter ses pénates il y a à peine deux semaines.

La veille, ils avaient observé avec intérêt le titre de leur concurrent Shopify s’apprécier de 51 % à sa première journée en Bourse.

« Ç’a été une journée immense pour les entreprises canadiennes de technologie », résume M. Dasilva.

« Ç’a confirmé qu’il n’est pas nécessaire d’aller s’établir dans la Silicon Valley pour bâtir son entreprise. C’est un grand moment de fierté pour tout le monde au Canada. »

— Dax Dasilva, président et fondateur de LightSpeed

L’intérêt est double pour LightSpeed, puisque Shopify et elle ciblent toutes deux un public similaire, constitué de petits et moyens détaillants.

Les deux entreprises ne sont pas pour autant des concurrentes directes, fait valoir M. Chauvet. LightSpeed s’est d’abord concentrée sur les points de vente en magasin avant d’élargir sa gamme au commerce électronique. Shopify a suivi le chemin inverse. Mais, surtout, LightSpeed cible des détaillants un peu plus gros que ceux de Shopify.

« Le marché a toujours accordé de gros multiples à ceux qui ciblaient le marché des entreprises, mais il s’agissait surtout de gros clients corporatifs, observe M. Dasilva. Nous en sommes aux débuts d’une nouvelle vague d’entrées en Bourse d’entreprises qui ciblent les PME. »

La question était donc inévitable : LightSpeed surfera-t-elle sur cette vague à court terme ?

« Nous faisons très bien en tant qu’entreprise privée pour le moment, répond M. Dasilva, sourire en coin. Nous allons laisser Shopify se soumettre à l’attention. Mais c’est un objectif dans quelques années. Nous nous sommes donné comme objectif de doubler nos revenus chaque année et nous croyons que c’est possible pour quelques années encore. Nous voulons d’abord voir se réaliser la valeur de nos investissements récents. »

UNE LICORNE

Interrogés sur le contexte d’affaires au Québec, MM. Chauvet et Dasilva n’ont eu que de bons mots pour l’appui dont a bénéficié leur entreprise depuis ses débuts, en 2005.

M. Dasilva a fondé LightSpeed après que son employeur précédent, B.Mac, un réseau de détaillants spécialisé dans les produits Apple, a fait faillite. Il avait participé à la conception d’un logiciel de point de vente adapté aux besoins spécifiques de ce détaillant et a donc pu constater la demande dans ce secteur.

« Il y a beaucoup de programmes qui nous ont aidés, que ce soit la Fondation du maire ou les crédits d’impôt pour la recherche et le développement », se souvient-il.

« Le gouvernement québécois est très bon pour les entreprises en démarrage, observe M. Chauvet. C’est plus quand on atteint une taille similaire à la nôtre présentement que l’on se sent très seuls. Le capital de risque à ce stade est plus rare. Mais nous nous donnons cette mission d’être la plus grosse entreprise de logiciels de Montréal. »

« Nous voulons être la “licorne” de Montréal, comme Hootsuite à Vancouver ou Shopify à Ottawa », ajoute M. Dasilva.

CROISER LES MARCHÉS

L’un des investissements dont veut profiter LightSpeed à court terme est l’acquisition, en octobre dernier, de l’entreprise belge POSIOS. Celle-ci a conçu un logiciel de point de vente similaire à celui de LightSpeed, mais destiné aux restaurants.

POSIOS comptait alors environ 700 clients dans une quarantaine de pays, surtout en Europe et en Asie. Il en résulte une sorte de séparation des activités de LightSpeed.

« Nous sommes très forts dans le commerce de détail en Amérique du Nord et très forts dans les restaurants en Europe. Nous aimerions faire traverser l’océan à ces deux créneaux. C’est un de nos défis cette année. » 

— Dax Dasilva, président et fondateur de LightSpeed

LightSpeed compte aussi miser sur un changement réglementaire d’importance qui doit survenir en octobre, aux États-Unis. À compter de ce moment, les détaillants qui n’accepteront pas la carte à puce deviendront financièrement responsables des transactions frauduleuses. Du coup, des millions de détaillants américains en sont à reconsidérer leurs technologies de point de vente, ce qui ouvre toute grande la porte à LightSpeed.

« Le cycle normal d’un terminal de point de vente est d’environ huit ans, estime M. Dasilva, et il y a là un gros cycle de remplacement qui s’amorce. »

Sinon, le cycle normal des affaires se poursuit.

« On ne sent aucun ralentissement, confie M. Chauvet. C’est un marché de plusieurs milliards. En gros, nous remplaçons les caisses enregistreuses par des tablettes. On peut le voir comme la transition qui s’est opérée des téléphones fixes aux téléphones mobiles et elle va continuer de se produire pendant les 5 ou 10 prochaines années. »

Voilà pourquoi LightSpeed a vu grand dans le choix de ses nouveaux locaux montréalais. Environ 200 de ses 300 employés travaillent dans la métropole et ils sont tous hébergés dans la gare Viger, où l’entreprise a réservé 55 000 pieds carrés, répartis sur 5 étages, en plus d’options dans des bâtiments connexes.

« C’est l’une des raisons pour lesquelles nous avons choisi ce site, parce qu’il nous permettra de prendre de l’expansion et de construire un petit campus. »

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