Monsieur l’inspecteur

Vieux plâtre, vieilles méthodes

Les plâtriers d’autrefois nous ont laissé de magnifiques murs, souvent ornés de corniches et d’une rosace au plafond. Quand vient le temps de les restaurer, cependant, la poussière et les coûts peuvent en décourager plusieurs.

Jusqu’à l’arrivée des panneaux de gypse dans les années 70, les murs de nos maisons étaient finis au plâtre. Le travail des plâtriers s’est avéré très durable, mais quand les murs et plafonds ont presque 100 ans, les signes de vieillesse placent les propriétaires face à un dilemme : restaurer ou tout arracher.

Si vous prévoyez acheter une propriété avec des murs et plafonds d’origine en plâtre, sachez dans quoi vous vous embarquez. Les bons plâtriers sont rares, la démolition provoque une poussière très fine, et le plâtre peut contenir de l’amiante.

Le plâtre sur lattis est composé d’une première couche, plus grossière, qui sert à « accrocher » le plâtre en le faisant déborder entre les lattes qui forment le fond du mur. La seconde couche complète la finition.

Les vibrations causées par les occupants ou la circulation routière, les mouvements structurels ou encore les dégâts d’eau finissent par faire décrocher le plâtre des lattes. Les fissures peuvent être réparées, mais dans le cas des plafonds, le plâtre risque carrément de s’effondrer.

TROIS OPTIONS

1. La solution la plus simple et abordable consiste à couvrir les vieux murs et plafonds du plus mince format de placoplâtre (panneaux de gypse, communément appelés Gyproc), puis de tirer les joints. Les murs gagnent en épaisseur. Les moulures laissées en place se retrouvent presque au même plan que le mur.

2. En démolissant le vieux plâtre, on provoque énormément de poussière et de débris. Cela permet d’isoler les cavités qui donnent sur un mur extérieur, de passer du nouveau filage électrique et de repartir à neuf avec du placoplâtre. On risque cependant d’y sacrifier les ornements.

3. La réparation et la restauration sont toujours possibles, mais coûteuses. Elles requièrent des habiletés que la plupart des tireurs de joints n’ont pas. On utilise du « plâtre de Paris », une poutre qu’on mélange à de l’eau et à d’autres matériaux, comme du composé à joints, pour fabriquer une « boue » qui ne reste malléable que quelques minutes.

UN TRAVAIL D’ARTISAN

Daniel-Jean Primeau est l’un des rares artisans en plâtrerie d’ornement dans la grande région de Montréal. Il restaure des rosaces (l’ornement au plafond autour du luminaire) à l’aide d’un compas et fabrique ses propres calibres, pour restaurer les corniches (la moulure au sommet des murs).

« J’ai une grosse collection de calibres, mais je n’ai jamais réutilisé le même. À l’époque, les plâtriers s’inspiraient des corniches montrées en gravures dans des catalogues, puis ils fabriquaient eux-mêmes leurs calibres. »

— Daniel-Jean Primeau, artisan en plâtrerie d’ornement

Daniel-Jean Primeau vient d’entreprendre la restauration des ornements de mur et de plafond d’une ancienne demeure laissée plusieurs années sans chauffage, rue Laval, sur le Plateau-Mont-Royal. Les corniches, moulures de plafond et rosaces sont si mal en point que plutôt que de les réparer, il en a prélevé les empreintes pour fabriquer des moules.

DE L’AMIANTE DANS LE PLÂTRE

Dans les années 50, les plâtriers se sont mis à ajouter de l’amiante à leur plâtre pour faciliter l’application, réduire le temps de séchage et obtenir un résultat plus robuste. La pratique s’est étirée jusqu’aux années 70, puis a été formellement interdite en 1985.

« On considère que les murs de tous les bâtiments dont le plâtre a été appliqué avant 1985 sont susceptibles de contenir de l’amiante », affirme Guillaume Tessier, chargé de projet chez Airmax Environnement.

Relâchées dans l’air, les fibres d’amiante sont nocives pour la santé respiratoire de ceux qui y sont exposés pendant de longues périodes.

En contexte résidentiel, l’amiante contenu dans le plâtre ne pose aucun problème, tant qu’on n’y touche pas. Il y a risque d’exposition lors de démolition, de réparations ou de bris par impact, par exemple, lorsque les enfants endommagent les murs en jouant au hockey.

Le vieux plâtre sur lattis d’avant 1940 ne contient habituellement pas d’amiante. Les panneaux de gypse tels qu’on les connaît depuis 40 ans en sont aussi exempts. Attention : certains stucs décoratifs appliqués en surface peuvent être contaminés.

Plusieurs entrepreneurs refuseront d’entreprendre des travaux sans savoir si le plâtre à démolir contient de l’amiante. Un seul échantillon peut coûter environ 50 $ à faire analyser.

« Pour pouvoir déterminer avec certitude qu’il n’y a pas d’amiante, il faut un minimum de neuf échantillons par zone affichant des similitudes d’ouvrage », indique Guillaume Tessier. La facture de la visite du technicien et de l’analyse passe alors à 750 $, pour une seule zone.

La décontamination requiert une imposante et coûteuse batterie de mesures, allant jusqu’à l’aménagement d’un sas à l’entrée de la zone de démolition et d’une douche spéciale pour les travailleurs.

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