Science

Les baleines dévoilent leurs secrets

La robotique a révolutionné la recherche sur les baleines. Des drones sous-marins peuvent surveiller leur présence et de petits hélicoptères permettent d’analyser le contenu de leur souffle. Leur nourriture, du plancton, est aussi mieux comprise.

Des Drones au fond du golfe

L’Université Dalhousie, à Halifax, a affecté pour la première fois l’an dernier un de ses quatre « planeurs », des drones sous-marins, au golfe du Saint-Laurent. « Depuis 2014, on s’en sert pour suivre les baleines au sud de la Nouvelle-Écosse », explique Kimberley Davies, de Dalhousie. « Nous en avons envoyé un dans le banc des Orphelins, près de la Gaspésie, et on a compté beaucoup de baleines franches. » Les planeurs se promènent pendant tout l’été à 10 mètres du fond et font surface toutes les deux heures pour transmettre des données. Leurs capteurs reconnaissent les chants de quatre espèces de baleines et sont capables de distinguer les individus sur la base de ces chants.

À la recherche de copépodes

Les copépodes sont de petits crustacés de quelques millimètres de long formant l’essentiel de l’alimentation des baleines franches. « Ils ne peuvent pas se déplacer par eux-mêmes, alors ils suivent les courants, dit Kimberley Davies, de l’Université Dalhousie. Quand ils arrivent à certains endroits, ils s’accumulent, et quand l’eau est assez froide, ils ont un haut pourcentage de matières grasses et sont en dormance. Ça peut être à cause d’un front de température ou à cause de la géographie de l’endroit. »

À l’écoute du chant des baleines

Depuis 2010, le biologiste Yvan Simard, de l’Institut Maurice-Lamontagne, écoute les baleines grâce à un réseau de sept hydrophones installés sur les fonds marins dans le golfe du Saint-Laurent. Une première analyse des données, publiée l’an dernier, montre que le rorqual bleu fréquente toute l’année le golfe et qu’il passe par le détroit de Cabot plutôt que par celui de Belle-Isle pour se rendre dans l’Atlantique.

Des drones pour analyser l’haleine

Depuis quelques années, des biologistes américains envoient des drones tourner autour des baleines pour analyser leur haleine quand elles soufflent par leur évent, situé sur leur face dorsale. Auparavant, il était impossible de s’approcher suffisamment des baleines pour faire ces analyses. Ils ont notamment réussi à mesurer des bactéries et des hormones sexuelles, la progestérone et la testostérone ; des chercheurs de l’Institut océanographique Woods Hole comparent le microbiome des baleines avec des photos rapprochées de leur corps pour déterminer s’il est possible de savoir si une baleine est en santé grâce à son microbiome.

Les migrations décortiquées

La baleine franche de l’Atlantique Nord (il existe deux autres espèces, dans le Pacifique Nord et dans les mers australes) passe l’hiver près de la Géorgie, où les femelles mettent bas. Elles passent traditionnellement l’été à trois endroits : près du cap Cod, dans la baie de Fundy et au sud de la Nouvelle-Écosse. « On ignore comment les baleines détectent les accumulations de copépodes », indique Robert Kenney, de l’Université du Rhode Island, qui a publié un résumé des connaissances sur les migrations en 2001. « On peut penser qu’elles peuvent suivre les courants et la topographie, ou alors qu’elles reconnaissent une signature biochimique. Mais avec des animaux de 50 tonnes, on ne peut pas faire beaucoup d’expériences, alors on reste avec des hypothèses. »

Les révélations du 11-Septembre

Après les attentats du 11 septembre 2001, les autorités américaines n’ont pas seulement stoppé le trafic aérien pendant plusieurs jours, mais aussi les navires. Des chercheurs de l’aquarium de la Nouvelle-Angleterre à Boston étaient en train de recueillir des échantillons d’excréments de baleines franches dans la baie de Fundy. « On a vu que dans les jours suivants le 11-Septembre, leur niveau d’hormones de stress a baissé énormément, explique Phil Hamilton. C’était la première fois qu’on prouvait l’influence négative du trafic maritime sur les baleines. C’est grave, parce que les baleines ont perdu 70 % de leur habitat acoustique depuis 50 ans à cause des navires et que l’exploration sismique liée à l’implantation d’éoliennes et à l’exploration gazière porte 100 fois plus loin. » Leurs résultats ont été publiés en 2012.

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