Nouveau partenariat

Le musée d’Orsay et le MBAM créeront une exposition conjointe en 2021

Le musée d’Orsay de Paris et le Musée des beaux-arts de Montréal (MBAM) ont entamé un partenariat artistique qui aboutira notamment en 2021 à la création conjointe d’une exposition qui alliera arts et sciences. La dirigeante du musée d’Orsay, Laurence des Cars, en a fait part à La Presse lors d’une rencontre au MBAM.

Laurence des Cars est devenue, en mars dernier, la présidente de l’Établissement public des musées d’Orsay et de l’Orangerie, à Paris. Elle a succédé à Guy Cogeval… qui fut le directeur du Musée des beaux-arts de Montréal (MBAM) de 1998 à 2006. Spécialiste de l’art du XIXe et du début du XXe siècle, l’historienne française était à Montréal, la semaine dernière, pour prendre le pouls de la vision du MBAM.

Petite-fille du romancier Guy des Cars, Laurence des Cars veut insuffler aux musées dont elle a la charge « une dynamique de transmission et d’ouverture envers le public », comme le réalise le MBAM, réputé pour son implication sociale, ses projets d’art-thérapie, ses nombreuses activités éducatives et ses expositions multidisciplinaires.

« Le Musée des beaux-arts de Montréal est très volontariste et très innovant », dit Laurence des Cars, dont le musée a relativement peu d’activités éducatives. Des classes d’élèves y viennent régulièrement, mais il n’a qu’un atelier pédagogique « de 50 m2 » alors que le MBAM, grâce au mécénat de Michel de la Chenelière, en a 12.

Des visites y sont organisées dans la langue des signes ou pour des personnes réfugiées et des résidences artistiques sont réservées à des prisonniers. Mais le musée français a beaucoup moins présenté d’expositions polyphoniques que son vis-à-vis montréalais qui, lui, a porté loin ce concept avec des expositions sur Tintin, le western, Miles Davis, les œufs Fabergé ou encore les robes de Jean Paul Gaultier.

Décloisonner Orsay

Laurence des Cars veut donc décloisonner le musée d’État inauguré en 1986. Tout en respectant sa mission officielle de présenter ses « œuvres représentatives de la production artistique de la deuxième moitié du XIXe siècle et des premières années du XXe siècle ».

Le musée du quai de la Seine a beau avoir la plus importante collection de peintures impressionnistes au monde, il doit se renouveler. Mme des Cars envisage d’élargir son répertoire avec des incursions dans les domaines du cinéma, des sciences, de l’art contemporain, de la musique ou des spectacles vivants. Ainsi, des artistes de cirque animeront la nef d’Orsay, l’automne prochain, à l’occasion de l’exposition Picasso – Bleu et rose. Comme le MBAM l’avait fait lors de son exposition Rodin – Métamorphoses, en 2015.

« C’est pourquoi je suis venue voir ce que Nathalie Bondil a accompli ici en quelques années », a dit Mme des Cars. 

« Le positionnement du MBAM est extrêmement intéressant, avec une vision très forte du rôle sociétal du musée. C’est une vision à laquelle je crois beaucoup, mais qu’il faut adapter à Paris. »

— Laurence des Cars, présidente de l’Établissement public des musées d’Orsay et de l’Orangerie

Car Paris a une histoire et une réalité différentes. Il y a une barrière sociale et culturelle presque psychologique quand on franchit le pas d’un musée parisien, dit-elle. « En France, le musée est un temple, toujours perçu comme un lieu d’élitisme. Notre défi est de lui redonner une accessibilité. »

Nouveau souffle

Laurence des Cars prévoit déjà donner un nouveau souffle à son institution avec une grande exposition sur la naissance du cinéma, une autre sur le « modèle noir, de Géricault à Matisse » (au printemps 2019), une sur la plasticienne portugaise Paula Rego et, enfin, une qui allie arts et sciences en collaboration avec le MBAM.

Présentée à Paris et Montréal en 2021, cette exposition arts et sciences associera des œuvres d’art moderne des deux musées à des thèmes de l’anthropologie. Elle permettra à Orsay de bénéficier de l’expérience que le MBAM a acquise à travers ses nombreux partenariats avec le réseau de la santé. Et au MBAM d’avoir accès à des œuvres d’art prestigieuses.

« Avec le musée d’Orsay, nous sommes dans l’échange des bonnes pratiques, dit la directrice du MBAM, Nathalie Bondil, car nous avons les mêmes enjeux. À la différence que le MBAM est enraciné dans le tissu social. »

« C’est la société civile qui nous porte et nous dirige. Même si le contexte est différent, ces rapprochements sont intéressants, d’autant que les musées français commencent à s’ouvrir vers cette société civile. »

— Nathalie Bondil, directrice du MBAM

Nathalie Bondil croit en la capacité des musées de changer les mentalités, afin de « passer de la tolérance à l’acceptance et de l’inclusion à la cohabitation », dit-elle. Des notions pas toujours promues dans la France des Lumières. « Mais on sent en France qu’une nouvelle génération est en train de faire basculer les choses, dit Mme Bondil. Notamment à la tête des musées. »

Laurence des Cars rappelle que les attentats djihadistes des dernières années ont profondément touché les Français et notamment son milieu culturel. « Cela nous a fait prendre conscience qu’un musée est un lieu de rassemblement, de partage et d’éducation, dit-elle. Il est temps pour Orsay de se mettre à jour. Le monde bouge autour de nous. On ne veut pas être seulement un conservatoire d’une des plus belles collections au monde. »

Musée d’Orsay

Fondé en 1986

700 employés

3 millions de visiteurs (2016)

Collection : 168 000 œuvres

MBAM

Fondé en 1860

270 employés

1,3 million de visiteurs (2017)

Collection : 42 500 œuvres 

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