Cégep Marie-Victorin

Un premier Noël à la québécoise pour des élèves chinois

Depuis le mois de septembre, le cégep Marie-Victorin accueille une vingtaine d’élèves chinois venus décrocher un diplôme d’études collégiales au Québec. Au cours de la dernière décennie, ce cégep a tissé des liens étroits avec la Chine, et certains de ses enseignants s’y rendent pour donner des cours. C’est toutefois la première fois qu’il reçoit à Montréal un groupe d’élèves chinois aussi nombreux. La Presse a participé à leur toute première fête de Noël.

Pourquoi avoir choisi le Québec pour étudier ? Pour s’imprégner de la culture locale, ont répondu spontanément ces élèves, dont certains proviennent de la province de Hebei, dans l’est du pays. À quelques jours de Noël, ils ont eu droit à un échantillon de classiques québécois dans le cadre d’un repas où la tourtière côtoyait les crevettes avec sauce cocktail. En sourdine, Ginette Reno et Fernand Gignac s’époumonaient tour à tour.

Le dessert est un concept plutôt flou pour certains Chinois, si bien que quelques élèves ont cru bon d’entamer le repas du midi par la bûche, une curiosité que d’autres regardaient avec scepticisme. L’incident diplomatique a été évité de peu quand une élève a entrepris de couper le dessert dans le sens de la longueur… Freinée juste à temps dans son élan, elle a néanmoins fait rigoler les Québécois présents.

Loin de la maison et de leurs parents, ces jeunes de 17, 18 et 19 ans ont-ils découvert la scène nocturne montréalaise ? « Ils n’arrivent pas encore en classe fatigués parce qu’ils sont sortis la veille, dit en riant Fréda Thélusma, coordonnatrice du Centre d’éducation multiculturel du cégep. Ils sont très studieux, concentrés et sont toujours à l’heure à l’école. Peut-être le feront-ils quand ils seront moins gênés… » Certains habitent dans des familles d’accueil, d’autres occupent leur propre appartement.

Leur plus grande difficulté d’adaptation jusqu’ici ? « Le froid ! », ont répondu en chœur quelques élèves. Chenhan Wang, 18 ans, n’en revient pas de voir des autobus dont le plancher peut s’abaisser au niveau du trottoir. « Les gens pensent aux autres. En Chine, on ne verrait pas ça », dit-il. Son ami Wenqing Zhao a l’impression que les différentes cultures cohabitent mieux ici que chez lui. « En Chine, on voit tous les non-Chinois comme des étrangers. Ici, il n’y a pas de différence entre gens aux couleurs de peau différentes », observe-t-il. Quant à la nourriture, elle les fait parfois sourciller : certains ont goûté – et aimé ! – la poutine, mais la salade grecque a été jugée d’une amertume insoutenable par d’autres.

Quand on leur demande de se nommer, les élèves s’enquièrent : le nom chinois ou le nom en anglais ? Certains d’entre eux viennent d’ajouter un troisième prénom à la liste, puisqu’ils se sont eux-mêmes donné des noms à consonance française en arrivant au Québec. Chloé, Calista, Génie et Crystal sont ainsi nées… Sur la photo, on voit le directeur général du cégep Marie-Victorin, Sylvain Mandeville, en discussion avec des élèves.

Comme le cégep Marie-Victorin est officiellement bilingue, c’est en anglais que les élèves suivent le programme de comptabilité et gestion, qu’ils feront en deux années intensives plutôt que trois. Certains élèves ont suivi des cours de français en Chine, mais tous s’attaqueront à l’apprentissage de la langue à la prochaine session. « Comme ils ont choisi le Québec, ils ont manifesté le désir d’apprendre le français », dit Fréda Thélusma, coordonnatrice du Centre d’éducation multiculturel. Cette formation reçue au Québec donnera une « valeur ajoutée » au CV de ces élèves une fois de retour en Chine, note le directeur général du cégep, Sylvain Mandeville.

Jusqu’à maintenant, c’est le cours de philosophie qui donne le plus de fil à retordre aux jeunes élèves asiatiques. « C’est la première fois qu’on a ce cours », dit Mulin Cai, affirmant que c’est le plus difficile du lot. « En Chine, le processus de réflexion critique est très différent, observe Fréda Thélusma. Le professeur de philosophie a été sensibilisé, et il y a un accompagnement plus poussé avec les étudiants pour leur permettre de réussir ce cours. »

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