Leucan

Barbiers solidaires

Leucan Montréal-Laval invite les barbiers de la région à se battre ! Contre le cancer, évidemment. Barbiers contre le cancer se veut un mouvement de solidarité avec les enfants atteints du cancer et leur famille, lancé en octobre avec une vidéo percutante réalisée par François Jaros. Les barbiers participants se mesureront les uns aux autres lors d’un défi, ce jeudi, et tenteront de remporter le titre du barbier le plus artistique. Le public sera invité à voter pour sa réalisation favorite sur Facebook. Le gagnant sera dévoilé le 23 novembre, au magasin Off The Hook, où un prix sera également remis au barbier ayant ramassé le plus d’argent pour la cause. Des dizaines de barbiers reconnus, comme ceux de Notorious Barbershop, Maison Privée et De la Cream Barbershop, ont déjà confirmé leur participation. — Iris Gagnon-Paradis, La Presse

Essai

Réinventer les hommes

Les hommes font fausse route en perpétuant le cliché du gars imposant et maître de ses émotions, croit le comédien et dramaturge Steve Gagnon. Une grande partie d’entre eux adhèrent à cette vision réduite de la masculinité en se faisant violence, avance-t-il de surcroît dans un essai intitulé Je serai un territoire fier et tu déposeras tes meubles. Que faire ? Tout raser pour construire un véritable homme moderne.

Si le titre de cet essai poétique et inspirant s’avère peu éclairant, son sous-titre, lui, est très clair : Réflexions et espoirs pour l’homme du 21e siècle. En un peu plus de 80 pages, Steve Gagnon parle de son père (qui n’a pas vécu la vie qu’il aurait voulu), souligne le rôle crucial de sa blonde dans sa quête d’équilibre et, surtout, s’insurge contre le mal qui ronge selon lui les garçons et les hommes d’aujourd’hui.

Quel est ce mal ? Un constant déséquilibre entre leurs envies et les attentes qu’on a envers eux. Une insatisfaction bouillonnante qu’il baptise « intranquillité ». Une révolte contenue qui ne serait pas étrangère à la pression que ressentiraient les gars à se conformer à des modèles de virilité qu’eux-mêmes jugeraient « rudimentaires ».

DE LA VIRILITÉ…

Dans l’un des passages les plus frappants de son essai, Steve Gagnon rapporte ses échanges avec des élèves du secondaire, auxquels il demande d’exposer leur vision de la virilité. Les réponses sont pour l’essentiel archi convenues : l’homme est musclé, il protège et n’a pas beaucoup d’émotions. Comme les acteurs américains Channing Tatum et Vin Diesel.

Sauf que Steve Gagnon leur a aussi posé une colle. Il leur a demandé de choisir lequel de deux hommes inventés était le plus viril : un beau mec célibataire qui a du succès avec les filles ou un jardinier père de famille. Presque tous (92 %) ont choisi… le père de famille. « Pour eux, un homme viril est un homme qui prend ses responsabilités », explique-t-il.

« Ce qui m’a troublé, écrit-il, c’est de percevoir combien l’influence des modèles masculins que nous imposons aux garçons est forte et appuie violemment contre leur instinct, plus ouvert qu’on pourrait le croire. » Il croit fermement que les gars seraient plus curieux, plus sensibles, plus ouverts s’ils n’étaient pas rejetés, marginalisés, bref, pénalisés de ne pas se conformer.

« Admettre que tu ne corresponds pas au modèle, c’est une chose, expose l’auteur. Sentir que, parce que tu n’y corresponds pas, on doute de ta valeur en tant qu’homme et de ton orientation sexuelle, sentir que des gens n’assumeront pas de se tenir avec toi parce que tu ne corresponds pas au modèle, c’est lourd de conséquences ! »

… À L’HOMME ÉMANCIPÉ

Oui, les hommes ont changé. Un peu. « Au niveau du rôle familial, les choses ont changé. C’est là que l’homme s’est le plus réinventé, ça c’est certain », constate Steve Gagnon, qui n’a pas encore d’enfant. Mais hors de certains cercles où la curiosité intellectuelle, l’aptitude à communiquer et la sensibilité sont valorisées, il croit qu’il y a encore beaucoup de chemin à faire. Il déplore que, même dans des milieux qui se perçoivent comme « évolués », dès que 10 gars se retrouvent ensemble, ils sentent une espèce de pression de faire valoir leur virilité en parlant « de cul et de hockey »…

« Même si on a l’impression que les choses évoluent, les modèles de masse sont encore très présents. […] Ils prennent le dessus sur l’ouverture qu’il y a. »

— Steve Gagnon

Il y a un mouvement d’hommes émancipés à créer, pense l’auteur. Un mouvement qui marchera aux côtés des féministes. Et qui doit aussi intégrer les hommes qui correspondent aux stéréotypes, « puisqu’une masse importante de gens qui boivent [leurs] paroles comme de l’eau et qui sont prêts à tout pour [leur] ressembler sont suspendus à leurs lèvres ».

Steve Gagnon ne propose pas de mode d’emploi de l’homme du XXIe siècle, mais il formule des souhaits inspirants dans les dernières pages du livre. « On ne change pas les choses en s’habillant de gris pour se fondre dans la masse », dit-il. Alors il souhaite aux hommes de l’audace, des « sensibilités éruptives », de se « déchaîner contre la banalité de nos existences », d’être solidaires avec les adolescents perdus et « de les tenir à l’écart du sous-sol où ils ont tendance, trop souvent, à s’attacher le cou ». Une saine révolution masculine, quoi.

Extrait 

« À cette époque où tout est possible, où tout est accessible, il est de l’ordre de la barbarie de faire croire à de jeunes hommes qu’il n’y a qu’une seule petite voie étranglée que l’on peut emprunter. Il faut maintenant leur dire qu’il n’y a plus de limites, leur dire de contourner les chemins incultes mal déblayés par ceux avant nous. Il faut mettre en tas toutes nos vieilles références, tous nos anciens codes et allumer de grandes torches pour les réduire en cendres. »

Je serai un territoire fier et tu déposeras tes meubles

Steve Gagnon

Coll. Documents, Atelier 10, 78 pages

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