ALIMENTATION

Réalistes, les limites de sucre ?

Six cuillères à thé, soit 25 g. C’est la quantité de sucre ajouté maximale que les jeunes de 2 à 17 ans devraient consommer chaque jour, selon les recommandations de l’American Heart Association (AHA), publiées la semaine dernière, les premières de l’AHA qui concernent spécifiquement les enfants.

C’est peu, 25 g : c’est deux cuillères à soupe de Nutella ou de miel, ou un demi-paquet de Skittles, ou sept biscuits Oreo. Ou deux tiers d’une canette de boisson gazeuse. En fait, c’est moins du tiers de la consommation moyenne en sucre ajouté des jeunes Américains de 2 à 18 ans.

Et quelle quantité de sucre ajouté devraient consommer les enfants de moins de 2 ans, selon l’American Heart Association (AHA) ? Zéro gramme.

LOIN DU BUT

Idéalement, oui, on devrait tendre vers ce genre de normes, selon Amandine Moukarzel, nutritionniste au centre CIRCUIT au CHU Sainte-Justine. Elle rappelle que l’Organisation mondiale de la santé a décrété en 2014 que le sucre ajouté ne devrait pas excéder 10 % de l’apport quotidien en énergie (soit 50 g) et qu’il serait encore mieux de se limiter à 5 % (25 g).

Mais on est bien loin d’atteindre ce but, convient-elle.

« Actuellement, un adolescent québécois boit en moyenne un demi-litre par jour de boisson sucrée et une adolescente en boit un tiers de litre par jour. C’est de 9 à 15 sachets de sucre seulement en boisson. Juste avec leur hydratation, ils sont au-dessus des normes qu’on suggère. Et on ne parle pas du sucre ajouté dans les barres tendres, les céréales sucrées… » Quant aux enfants de moins de 2 ans, l’idée d’éliminer complètement le sucre ajouté est difficilement réalisable : même les céréales de bébé commerciales contiennent du sucre, souligne-t-elle.

Amandine Moukarzel juge les recommandations de l’OMS réalistes, mais à long terme, à très long terme même. « Et il faut travailler fort : pas juste nous, mais aussi au-dessus de nous. » À ses yeux, il faudra mettre en place des politiques ciblées : taxation des boissons sucrées, contrôle de l’offre autour des écoles, contrôle du marketing destiné aux enfants, etc.

Les parents peuvent tout de même faire un bout de chemin. Voici quelques conseils d’Amandine Moukarzel pour diminuer la consommation de sucre ajouté dans la famille, sans provoquer de tsunami ou créer d’obsession envers le sucre.

On diminue la consommation de sucre ajouté de façon très graduelle, en commençant par en retrancher le tiers.

On rend le jus moins accessible et les cruches d’eau plus accessibles.

On remplace une partie des aliments et boissons contenant du sucre ajouté par des aliments frais : des fruits, du lait, des boissons de soya…

On évite les interdits. « On garde une offre, mais restreinte. Et on laisse à l’enfant la liberté de choisir à quel moment il veut consommer les aliments. »

C’est moins écologique, mais on peut mettre à la disposition de l’enfant un certain nombre de petits contenants de jus. « S’il veut les boire, on lui explique que, s’il les prend tous dans la même journée, il n’en aura plus pour le reste du mois. »

On donne l’exemple !

Plus souple, le Canada ?

Les recommandations émises par l’AHA sont parmi les plus sévères à ce jour, mais elles s’inscrivent dans l’air du temps. En mai, la Food and Drug Administration, aux États-Unis, a établi l’apport maximal recommandé en sucre ajouté à 25 g pour les enfants de 1 à 3 ans, et à 50 g pour les jeunes de 4 ans et plus et les adultes. Dès 2018, les manufacturiers seront tenus d’inscrire le sucre ajouté sur les tableaux de valeur nutritive. L’an dernier, Santé Canada a aussi proposé d’inscrire, sur les tableaux de valeur nutritive, la quantité totale des « ingrédients à base de sucre ». L’apport maximal quotidien serait de 100 g de sucre, incluant les sucres ajoutés et les sucres naturels (comme ceux contenus dans les fruits). Les changements proposés ont fait l’objet d’une consultation qui a pris fin l’an dernier. « Santé Canada tiendra compte des commentaires reçus pendant la période de consultation », nous a écrit Santé Canada.

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