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Pour ou contre John Tortorella ?

John Tortorella est devenu hier le nouvel entraîneur des Blue Jackets de Columbus. Une décision surprenante et décriée par plusieurs. Tortorella traîne la réputation d’un gueulard, doublé d’un malappris, et sa dernière expérience avec les Canucks de Vancouver s’est terminée en queue de poisson. Portrait de cet entraîneur controversé.

POUR

1- Les victoires constituent l’instrument de mesure idéal pour juger le travail d’un entraîneur. Tortorella a une fiche en carrière de 444-371-37-78 et une Coupe Stanley avec le Lightning de Tampa Bay, en 2004. Ses 444 victoires lui confèrent le 28e rang dans l’histoire de la LNH, mais il glisse au 99e rang pour la moyenne de victoires par matchs.

2- Contrairement aux apparences, Tortorella a eu plus de succès avec les clubs jeunes. Le cœur de son club était jeune à Tampa lorsqu’il a gagné la Coupe : Brad Richards, 23 ans, Vincent Lecavalier, 23 ans, Martin St-Louis, 28 ans, Dan Boyle, 27 ans, Pavel Kubina, 26 ans et Frederik Modin, 28 ans.

Ses Rangers ont « décollé » en 2009 quand on a largué le bois mort pour faire une plus grande place dans les années suivantes aux Brandon Dubinksy, Ryan Callahan, Michael Del Zotto, Marc Staal, Derek Stepan, Ryan McDonagh et compagnie. Les Blue Jackets de Columbus ont justement un club jeune.

3- Malgré ses défauts, John Tortorella est un entraîneur rigoureux et passionné. Certains joueurs ont besoin de ce type d’homme pour réussir. Comme Martin St-Louis, par exemple, qui a connu ses plus grandes saisons pour lui.

« Je lui dois beaucoup, il est le genre d’entraîneur dont j’avais besoin pour exprimer tout mon talent sur la patinoire, a-t-il confié récemment au confrère Pierre Durocher. Il a toujours poussé fort sur les joueurs négligés et j’ai connu du succès sous son autorité. »

Jeremy Roenick a lui aussi beaucoup aimé Tortorella. « Il était assistant quand je jouais pour les Coyotes de Phoenix et j’avais une très belle relation avec lui. J’aime sa passion. Il gueule beaucoup et il est dur, mais j’aime ce type d’entraîneur, ce genre de motivateur », déclarait-il plus tôt cette année.

4- John Tortorella s’est-il assoupli avec les années ? Au moins un joueur, Ruslan Fedotenko, semble le croire.

« Il a changé. Il ne s’attarde pas uniquement aux choses négatives. Il vous félicitera pour un beau jeu et le soulignera au groupe. C’est certainement un changement important. Tout le monde mûrit avec l’âge et l’expérience. Mais si tu évites de bloquer un tir, si tu lèves le pied comme un flamant rose, tu vas en entendre parler, et pas seulement toi, tous les autres. Il t’engueulera si tu joues mal. Ça n’est pas personnel, si tu joues bien, il ne criera pas. »

Fedotenko a joué pour lui à Tampa de 2002 à 2007, puis à New York de 2010 à 2012.

5- Le nouvel entraîneur des Blue Jackets n’étouffe pas ses joueurs de talent. La carrière de Brad Richards, Vincent Lecavalier, Dan Boyle, Martin St-Louis, Ryan McDonagh, Derek Stepan, Michael Del Zotto, Ryan Callahan, Dan Girardi et Derek Brassard a décollé sous son autorité.

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Pour ou contre John Tortorella ?

CONTRE

1- C’est peut-être un manque de souplesse qui a causé la perte de Tortorella à Vancouver lors de sa seule saison là-bas, en 2013-2014. Tortorella a imposé aux Canucks un style de jeu diamétralement opposé à celui de son prédécesseur et les joueurs n’ont jamais pu s’ajuster. Entre autres les talentueux jumeaux Sedin, à qui Tortorella demandait désormais de bloquer des tirs. L’homme qui l’a embauché, le DG Mike Gillis, n’a pas hésité à critiquer la philosophie de son coach à la fin de cette saison catastrophique.

« Je veux nous voir jouer un tempo élevé, de la possession de rondelle, de l’exécution rapide, forcer l’adversaire à commettre des erreurs. Je crois que nous avons les joueurs pour le faire. C’est ainsi qu’on gagne dans l’Ouest. C’est ainsi qu’on jouait auparavant. » Les deux ont été congédiés quelques jours après cette déclaration…

2- Malgré son style autoritaire et son caractère impitoyable, John Tortorella n’a jamais transformé ses équipes du jour au lendemain. Il a raté les séries à sa première année à Tampa (fiche de 27-40-11-4) en 2001-2002, avant de connaître sa première saison gagnante l’année suivante.

À New York, ses Rangers ont obtenu deux points de moins (95) que l’année précédente (2007-2008) sous son prédécesseur Tom Renney, et le rendement de l’équipe a chuté à 87 points l’année suivante, avec une exclusion des séries. Il ne donnera donc peut-être pas aux Blue Jackets le traitement-choc dont ils ont besoin.

3- Sa difficulté à maîtriser ses émotions peut mettre ses organisations dans l’embarras. En janvier 2014, il est suspendu deux semaines sans salaire alors qu’il a tenté après le match entre les Canucks et les Flames d’entrer dans le vestiaire de ceux-ci pour engager le combat avec des joueurs adverses. « C’était dangereux et gênant pour la LNH… », a commenté le VP Colin Campbell.

4- Ses nombreuses prises de bec avec le chroniqueur du New York Post Larry Brooks ont fait le régal des adeptes de YouTube. Tortorella a affirmé à son arrivée à Vancouver qu’il changerait son approche. Il a tenu parole, même si une certaine arrogance est restée. Ce sont toutefois d’autres raisons qui ont incité les Canucks à s’en débarrasser même s’il lui restait encore quatre ans de contrat et 8 millions à payer.

5- Un entraîneur rugueux comme Tortorella ne fait pas l’unanimité auprès des joueurs, évidemment. « Congédiez ce clown. Ses joueurs le détestent et ils ne veulent pas jouer pour ce mangeux de merde », a écrit Sean Avery sur Twitter le 30 mars 2013, quelques semaines avant le congédiement de Tortorella. Avery disait sans doute tout haut ce que plusieurs joueurs des Rangers pensaient tout bas. Par contre, un avocat de la défense n’aurait eu aucun mal à détruire la crédibilité du témoin…

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