Opinions Duel politique

Une proposition à prendre au sérieux

Longtemps, les partis fédéraux ont cru s’adresser aux électeurs québécois en répondant à leurs aspirations nationales et à leurs revendications constitutionnelles. Ils ne proposaient pas grand-chose, mais au moins, ils savaient que les Québécois n’étaient pas des Canadiens comme les autres. On pouvait y voir une certaine reconnaissance d’un Québec comme société distincte.

Si les libéraux fédéraux se sont toujours présentés comme les partisans de la ligne dure, les conservateurs et les néo-démocrates, chacun à leur manière, ont tendu la main au peuple québécois. Cependant, ils n’ont pas su susciter un grand enthousiasme au Canada anglais, qui conservait une méfiance fondamentale à l’endroit du nationalisme québécois.

Mais à partir des années 90, après l’échec du dernier cycle de négociations Canada-Québec, qui avait suivi le coup de force constitutionnel de 1982, la question constitutionnelle est disparue de l’écran radar politique et l’échec référendaire de 1995 a semblé clore la question. Les fédéralistes québécois jugeaient la cause perdue d’avance et ne voulaient pas risquer un autre échec. Les souverainistes espéraient un troisième rendez-vous référendaire rapide et s’intéressaient davantage au futur pays du Québec, et aux possibilités qu’il ouvrait, qu’à la réforme d’un Canada dont ils croyaient bientôt divorcer.

En 2018, la relation Canada-Québec demeure aussi problématique. Récemment, le gouvernement de Philippe Couillard a proposé un nouveau cadre de négociations constitutionnelles, pourtant terriblement minimaliste, que Justin Trudeau, à Ottawa, s’est empressé de rejeter, comme s’il s’agissait d’une question ridicule, ce qui n’avait rien de surprenant.

De la part d’un fédéraliste aussi résolu que Philippe Couillard, c’était néanmoins un aveu important : l’exclusion du Québec du cadre constitutionnel canadien demeure un problème grave.

Un peuple ne peut pas vivre dans un éternel déni de reconnaissance, et cette reconnaissance, si elle venait, ne saurait être exclusivement symbolique.

Malgré une certaine ouverture de la part des conservateurs, c’est la main récemment tendue par le NPD et son nouveau chef au Québec qui semble la plus sincère. Elle repose sur un constat essentiel : la question nationale demeure fondamentale et le Québec n’est pas qu’une composante parmi d’autres de la diversité canadienne. Plus encore, le NPD reconnaît qu’il y a une sorte de vice fondateur dans la Constitution, et qu’elle est pour cela en carence de légitimité. On comprend qu’il s’agit d’un discours électoral, et peut-être même électoraliste, pour rejoindre l’électorat québécois. Il n’en demeure pas moins qu’il s’agit d’une opportunité politique majeure qui doit être accueillie positivement. Il introduit une dimension nouvelle dans la prochaine campagne fédérale.

La prise de position du NPD force tous les partis québécois, qu’ils soient souverainistes ou fédéralistes, à réfléchir aux revendications fondamentales du Québec et aux intérêts auxquels elles réfèrent. Les propositions traditionnelles de Meech doivent assurément être mises à jour, et cela, de manière ambitieuse. Elles se fondent sur un principe simple :  le Québec doit poursuivre son aventure en Amérique. Cela n’oblige personne à renoncer à son orientation fondamentale sur la question nationale et les souverainistes ont le droit et le devoir de rappeler que le Québec devrait contrôler pleinement sa destinée. Mais cela permet de reconstruire un programme commun québécois pour un dialogue entre le Canada et le Québec où la légitimité du point de vue de ce dernier serait considérée. Les nationalistes québécois ont tout intérêt à prendre au sérieux la proposition du chef du NPD.

Le MNQ est un mouvement issu de la société civile, indépendant des partis politiques, fédérant des Sociétés membres partout au Québec et qui a pour mission de défendre et promouvoir l’identité québécoise, prioritairement sa langue, son histoire, sa culture et son patrimoine, et de faire du Québec un pays français et démocratique.

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Une opportunité à saisir

Les conservateurs et les néodémocrates se disent maintenant favorables à des discussions constitutionnelles portant notamment sur le Québec. Est-ce le début d’une nouvelle ère de dialogue ? 

L’ouverture des néo-démocrates et des conservateurs démontre que les Canadiens sont à nouveau prêts à parler de Constitution et que ce dialogue a le potentiel d’être différent des épisodes du passé. Il s’agit, en vérité, pour tous les Canadiens, d’une opportunité à saisir, car nous faisons face à d’importants défis.

Rappelons-nous que la société canadienne a profondément changé depuis les dernières rondes constitutionnelles. L’internet n’était pas dans nos foyers et le libre-échange nord-américain, maintenant au cœur de notre économie, n’était pas encore une réalité.

Si cet élan vers le dialogue se nourrit du souhait historique de voir le Québec reconnu, ce changement de cap n’est pas qu’une tactique électorale pour plaire aux habitants de la Belle Province. Il est surtout le résultat d’un réalignement plus profond qui s’opère à travers le pays. Quatre enjeux nous paraissent être les moteurs de ce changement.

La question environnementale n’était pas centrale lors de la négociation du cadre constitutionnel canadien ni lors de son rapatriement. Alors que le gouvernement fédéral peine à respecter ses engagements internationaux sur les gaz à effet de serre et qu’il rencontre d’importantes résistances auprès des provinces et des municipalités dans le cadre de ses projets de développement pétrolier, plusieurs voix s’élèvent pour une modernisation de notre Constitution afin de permettre une réponse au réchauffement climatique mieux coordonnée.

Partout au pays, l’appel à la réconciliation avec les Premières Nations traverse nos institutions comme un vaste courant de changement, qui, maintenant plus que jamais, demande des actions concrètes de notre part.

Sommes-nous prêts à engager ce dialogue de nations à nations et à revoir notre cadre constitutionnel en conséquence ?

L’équité entre les provinces est un des projets sociaux centraux du Canada qui vise à assurer, à travers la péréquation, que tous les Canadiens bénéficient d’une égalité des chances.

Or, la formule actuelle peine à atteindre ses objectifs et est décriée parce qu’elle est trop ou pas suffisamment généreuse pour certaines provinces.

Nous sommes à l’aube d’une révision de la formule. Cela nous forcera à réfléchir au Canada que nous souhaitons.

Enfin, la Cour suprême s’apprête à trancher sur l’interdiction actuelle de transporter des boissons alcoolisées d’une province à une autre. En même temps, l’Alberta impose des sanctions économiques à la Colombie-Britannique en représailles à son refus de participer au projet d’oléoduc de Kinder Morgan. N’apparaît-il pas pertinent, aujourd’hui, de s’interroger sur le commerce et le libre-échange que nous souhaitons au sein même de la fédération ?

Les conservateurs et les néo-démocrates souhaitent se faire élire, c’est vrai, mais ils ne souhaitent pas seulement plaire au Québec. En ouvrant ainsi la porte au dialogue, ils reconnaissent que les choses ont changé et qu’il est à nouveau temps de redémarrer les discussions sur nos institutions fondamentales. Nous entrons maintenant dans une nouvelle ère puisque ce dialogue constitutionnel ne portera pas uniquement sur la place du Québec dans la fédération, mais aussi sur notre développement durable, nos relations avec les Premières Nations, la justice sociale et le commerce intérieur. Il s’agit donc d’une nouvelle opportunité que nous devons saisir. Le Canada ne pourra affronter les 150 prochaines années avec les moyens des 150 dernières.

Les Communes est un organisme voué à la promotion du dialogue entre les peuples et nations qui forment le Canada pour une reconnaissance mutuelle de nos aspirations collectives, de notre diversité et de nos libertés fondamentales afin d'établir les solidarités nécessaires à un renouveau politique au pays.

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