Ô Cannabis

Mythes et réalités du cannabis

Dans son essai Ô Cannabis, Michel Morin a décidé d’aborder certains mythes sur le pot qui ont la vie dure. Avocat de la défense, il a représenté de nombreux clients accusés de possession ou de trafic de marijuana. Ce livre, dans lequel il recense de nombreuses études sur les dangers et les vertus du pot, a été motivé par son incrédulité face à la sévérité des peines imposées aux jeunes contrevenants. Voici six affirmations qu’il analyse dans son bouquin. 

Le pot détruit les cellules du cerveau

Cette affirmation tient du mythe, selon Michel Morin. « Elle n’a jamais été démontrée, contrairement aux effets de l’alcool, par exemple. La préoccupation de la plupart des gens, c’est l’effet du cannabis sur la santé des jeunes, nous dit-il. Un des arguments étant que le cerveau se développe jusqu’à l’âge de 20 ans. Mais de nombreuses études démontrent qu’en général, les effets du cannabis sont temporaires et réversibles. Depuis 2015, 10 000 jeunes Américains sont suivis dans le cadre du projet ABCD, mené par 19 centres de recherche. Ces jeunes de 10 ans seront suivis jusqu’à l’âge adulte. Cette étude va certainement nous éclairer sur les effets du cannabis sur le cerveau. »

Le pot conduit aux autres drogues

Voilà une affirmation qu’on entend souvent et qui inquiète ceux qui croient que les jeunes, attirés par ce qui est interdit, délaisseront le pot légalisé pour se tourner vers d’autres drogues plus dures. « Je ne suis pas d’accord avec ça, nous dit Michel Morin. Ça va demeurer illégal aux mineurs, donc il y aura quand même un marché noir. Au Colorado, qui a légalisé le pot, on estime que 60 % des transactions sont légales, mais le marché noir est tout de même à 40 %, notamment à cause des habitants des États voisins où le pot est illégal. Deuxièmement, cette théorie de l’escalade n’est absolument pas fondée. Et même si c’était vrai, ce serait un bon argument pour légaliser le pot. Parce que la plupart du temps, c’est en achetant du cannabis que les jeunes se font offrir d’autres drogues. »

La teneur en THC du cannabis est 20 fois plus élevée que dans les années 60

Michel Morin est clair sur ce point : le cannabis d’aujourd’hui a une plus haute teneur en THC, son ingrédient principal, qu’il y a 40 ans. Mais il croit que cette hausse a été largement exagérée. « Ce qu’on sait, c’est que ce taux est environ trois fois plus élevé que dans les années 70. Cela étant dit, la légalisation serait le moyen idéal de contrôler le taux de THC pour que l’effet euphorisant ne soit pas dévastateur. Il faut aussi qu’il y ait des teneurs variables, mais à l’heure actuelle, dans le marché noir, on ne peut pas savoir. » Le THC, dont le taux moyen oscille entre 6 et 8 %, est-il nocif ? Dans son livre, Michel Morin cite un rapport du comité du Sénat qui conclut que « le THC ne cause pas de dommages physiologiques aux organes ou aux tissus ». 

L’usage du pot est plus risqué chez les jeunes

Ce qu’on sait, nous dit Michel Morin, c’est que les jeunes qui commencent à consommer du cannabis avant l’âge de 16 ans ont plus de risques de développer une dépendance et de consommer le cannabis de manière excessive. Selon le Centre canadien de lutte contre l’alcoolisme et les toxicomanies (CCLAT), cette consommation excessive peut avoir des effets sur la mémoire, l’attention et la vitesse psychomotrice. Cela dit, les conclusions sont partout les mêmes, nous dit Michel Morin : un usage modéré et occasionnel, que les jeunes aient 17, 19 ou 22 ans ne causera pas de dommages sérieux et permanents. Ce qui est rassurant, nous dit-il, c’est qu’à l’âge de 25 ans, les deux tiers des gens qui ont consommé du cannabis plus jeunes n’en consomment plus du tout. 

Si on légalise le pot, tous nos jeunes se mettront à fumer

« Dans tous les États américains qui ont légalisé le cannabis, non seulement il n’y a pas de hausse, mais on constate même une légère baisse de consommation. Peut-être que le fait que le pot soit légal le rend moins attirant pour les jeunes, je ne sais pas. Moi, j’ai pris soin de ne pas banaliser la consommation de cannabis dans mon livre, mais il faut dédramatiser. Aux Pays-Bas, l’usage du pot est l’un des plus faibles d’Europe. Les trois quarts des dossiers de la Chambre de la jeunesse sont liés aux drogues et dans la majorité des cas, à la consommation de cannabis. Même si les policiers sont tolérants pour les premières infractions, il n’en demeure pas moins que des milliers de jeunes finissent par avoir un dossier criminel à cause de ça. »

Fumer et conduire : les routes seront plus dangereuses

« Conduire avec des facultés affaiblies [en raison de notre consommation de drogue] est déjà une infraction du Code criminel et ça va le rester, nous dit Michel Morin. C’est la manière de détecter la présence de drogue qui ne fait pas consensus. Il y a deux approches : une méthode quantitative, par des tests de salive ou des échantillons d’urine, et l’approche par les effets où des experts en reconnaissance de drogue sont formés pour identifier les conducteurs sous influence – grâce à des questions et des observations. Moi, je crois beaucoup à ça. Parce que même si on peut détecter le THC grâce à un test salivaire, ça ne nous dit absolument pas que cette personne a conduit sous l’influence euphorisante du cannabis. Quelqu’un qui fait un usage thérapeutique de cannabis aura tout le temps du THC dans son système ! » 

Ô Cannabis

Michel Morin

Perro éditeur

376 pages

Sortir son joint du placard !

Si le projet de légalisation du cannabis récréatif est adopté comme prévu à l’été 2018, il va bien falloir en parler à vos jeunes. Mais comment aborder le sujet ? Vont-ils commencer à vous parler de leurs expériences euphorisantes ? Les auteurs français David Pouilloux et Jacques Azam viennent de publier un petit livre illustré destiné aux jeunes pour bien les renseigner sur ce qu’est le cannabis, mais surtout pour bien les préparer à répondre à une question : « T’en veux ? » Même si on fait référence aux lois françaises (le cannabis est toujours illégal en France), ce petit ouvrage ludique détaille très bien les effets liés à la consommation de pot. Une excellente façon d’initier les jeunes au sujet pour avoir ensuite une discussion avec eux.

Cannabis, on en parle ?

David Pouilloux et Jacques Azam

La Martinière Jeunesse

112 pages

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