Le sommeil
Du bon usage des somnifères
La Presse
Dans le langage courant, on ne fait pas toujours la distinction entre les somnifères prescrits par un médecin et les produits offerts en vente libre en pharmacie. Or, ce n’est pas la même chose. Les produits en vente libre contiennent en général de l’histamine, un composé qui se retrouve dans les médicaments qui servent à contrer les allergies. « Ce n’est pas très efficace et en réalité, il n’y a pas beaucoup de données probantes pour appuyer l’utilisation de ces produits-là parce qu’ils n’ont pas été soumis à des études comme les médicaments prescrits, souligne Charles M. Morin. Ce n’est pas réglementé par Santé Canada comme les somnifères [vendus sous ordonnance]. »
Un somnifère n’est pas utile dans tous les types d’insomnies. Il est plus indiqué pour les insomnies dites situationnelles, transitoires ou ponctuelles. Charles M. Morin cite en exemple le stress aigu qui découle d’un deuil ou d’une séparation, des situations qui engendrent beaucoup de détresse et qui peuvent affecter le sommeil. Patrick Lemoine insiste aussi sur le fait que l’usage d’un somnifère constitue une option surtout lorsque l’insomnie est récente et que la cause en est identifiée. Une pilule pour dormir n’est rien de plus qu’un pansement qu’on met sur un bobo. « Il ne règle pas le problème à la source de la difficulté à dormir, dit encore Charles M. Morin. Et il ne donne pas un sommeil naturel. »
Un sommeil naturel a bien des vertus sur le plan de la santé. Or, les somnifères induisent un sommeil artificiel qui n’offre pas ces bienfaits. Patrick Lemoine va même jusqu’à parler « d’escroquerie intellectuelle » lorsqu’il est question de somnifères. « L’état d’inconscience provoqué par les benzodiazépines n’est pas du sommeil, c’est une anesthésie légère », dit l’auteur de
Le D
Patrick Lemoine conseille de s’informer au sujet du médicament qu’on prend ou qu’on nous prescrit. « Il n’est pas logique de prendre un produit dont la demi-vie est de 72 heures pour dormir 7 heures », expose le médecin français. Il juge que, dans un premier temps du moins, il faut privilégier un médicament dont la demi-vie, c’est-à-dire le temps que prend un médicament pour perdre la moitié de son activité pharmacologique, est courte et qui n’a pas de métabolites actifs. Des produits comme le zopiclone, le zolpidem et zaleplon seraient à privilégier.« Les somnifères peuvent avoir leur place à court terme et être d’une grande utilité », estime Charles M. Morin. Les termes clés ici sont « court terme ». Patrick Lemoine évoque les effets secondaires néfastes à long terme. Son collègue de l’Université Laval parle plutôt d’accoutumance. « Quand on en prend toutes les nuits sur une longue période, une tolérance se développe, M. Morin. C’est un peu comme l’alcool : plus on en prend, plus on a besoin d’en prendre pour garder le même effet. Et ce ne sont pas des bonbons. »