Le centenaire de la LNH

Hockey d’hier à aujourd’hui :
table ronde des légendes

Ils ont gagné 22 fois la Coupe Stanley, ils ont obtenu 2934 buts et 7625 points en 8156 matchs de saison et de séries. Ensemble, ils couvrent plus de 40 ans d’activités de la LNH. Pour parler du hockey d’hier et d’aujourd’hui, le tout saupoudré d’anecdotes, rencontre avec six légendes : Raymond Bourque, Yvan Cournoyer, Rodrigue Gilbert, Dave Keon, Frank Mahovlich et Denis Savard.

Rodrigue Gilbert : On avait un entraîneur appelé Larry Popein. C’était sa première année, peut-être le cinquième match. On jouait contre les Canadiens à New York. Il nous a dit qu’il savait comment les battre. C’était sa stratégie : tu vas sur la glace et tu frappes les grenouilles, Guy Lafleur et Yvan Cournoyer. On est rentrés au vestiaire et on perdait 3-0. Larry donnait des coups de pied, il criait : « Vous devez les frapper, ils n’aiment pas ça. » Pete Stemkowski était un rigolo. Il lui a répondu : « Mais qui aime ça ? » On ne pouvait juste pas les rattraper.

Frank Mahovlich : Une fois à Detroit, il y avait une émission et les gens appelaient pour poser des questions aux joueurs. C’était mon tour d’y aller. Je suis en ondes, les gens appellent et posent des questions. Quelqu’un appelle et sa question est : « Frank, pourquoi es-tu incapable de patiner à reculons ? » Pardon ? Viens faire un tour à l’entraînement et je vais te montrer que je peux patiner à reculons. C’était [Pete] Stemkowski qui appelait…

La Presse : Vous avez connu des rivalités intenses. Y a-t-il un moment dans votre carrière où vous vous êtes dit : c’est dément, ça va trop loin ?

R.G. : Chaque fois que je venais à Montréal. On ne gagnait jamais. Il y avait six équipes à l’époque. On s’affrontait 14 fois dans l’année, sept fois dans chaque ville. Mes trois premières années, je ne pense pas avoir gagné à Montréal.

Yvan Cournoyer : Mon premier match à Boston, il y a eu une mêlée générale. Je me suis dit : pas encore. La saison va être longue.

Dave Keon : Ça arrivait souvent à l’époque.

R.G. : Il n’y avait pas de troisième homme dans les bagarres. Tu devais te trouver quelqu’un à qui t’agripper. Une fois, je me retourne, les joueurs s’en venaient. J’ai saisi Teddy Green. C’était une mauvaise idée.

Raymond Bourque : Tu dois choisir le bon joueur dans les mêlées générales.

R.G. : Il me tenait par le collet et mes pieds ont quitté le sol. Je lui ai dit : « Serre moins fort, je vais perdre connaissance. »

LP+ : Vos carrières couvrent plus de 40 ans. Comment le hockey a-t-il changé durant cette période ?

R.B. : Denis et moi avons joué à la meilleure époque. Je blague. Chaque époque a ses particularités. Mais le sport est encore intact. J’adore regarder les matchs aujourd’hui. Pour moi, la plus grande différence est l’arbitrage, les règlements. Le jeu s’est ouvert, il y a plus de possibilités.

Y.C. : Ils ont amélioré le coup de patin, l’équipement, l’entraînement. Les joueurs sont en forme toute l’année. Les bâtons, les patins, ils ont même amélioré la glace. Il y a eu une course automobile IndyCar à Las Vegas en 2011 et ils se sont rendu compte que la piste était trop petite pour le nombre de voitures. Un coureur a été tué car la piste était trop petite. Les joueurs sont plus gros, ils sont plus rapides, ils n’ont nulle part où aller sur la glace. Placez la bande 10 pieds plus loin, vous aurez plus de place. Quand tu gagnes la mise en jeu dans ta zone, tu es censé avoir le contrôle de la rondelle. Maintenant, ils doivent dégager la rondelle le long de la bande car il n’y a pas d’espace sur la glace. Ce n’est pas normal. Mais c’est trop tard. Ils ne vont jamais agrandir la glace.

R.G. : Certains des gens ici auraient pu jouer aujourd’hui en raison de leur vitesse. Quand ils ont éliminé la ligne rouge, ça a ouvert le jeu. Mais les joueurs sont trop rapides. Tu n’as même pas le temps de penser. Si tu n’as pas pensé à quoi faire avec la rondelle avant de la recevoir, tu n’as aucune chance. Une fois de temps en temps, tu vois un beau jeu, un tic-tac-toe, mais c’est vraiment rare.

F.M. : C’est rapide, et les présences sur la glace sont courtes. Je me souviens de Gordie Howe qui pouvait jouer 40 minutes dans un match.

R.G. : À New York, j’ai déjà vu Phil Esposito faire une présence de 13 minutes. C’est moi qui attendais pour embarquer sur la glace.

LP+ : Est-ce que l’argent a changé le sport ?

D.K. : C’est sûr.

R.B. : Avec le plafond salarial, c’est difficile de garder les équipes intactes.

D.K. : Personne ne va accepter d’être payé moins cher pour rester avec une équipe.

R.B. : Il faut vraiment que tu sois un joueur spécial pour faire ça.

D.K. : Dans les années 60 et 70, les Canadiens formaient des dynasties. Tout le monde aime jouer pour des équipes championnes. Tu acceptais moins d’argent pour rester avec une équipe gagnante. Je ne vois plus ça de nos jours.

Y.C. : Peut-être à la fin de ta carrière. S’ils veulent revenir à Montréal ou à Toronto, s’ils veulent terminer leur carrière à l’endroit d’où ils viennent et s’ils veulent y rester à leur retraite.

D.K. : Quand Frank, Rod et moi avons commencé, tu signais ton contrat, mais si tu avais une mauvaise saison, tu recevais moins d’argent. Ça n’arrive plus.

R.B. : En raison du plafond salarial, si tu repêches bien, tu as des joueurs de talent qui arrivent. Tu peux te permettre peut-être cinq gros contrats par équipe. Si tu offres un mauvais contrat, tu es pris avec. Le plafond salarial a fait mal à la profondeur des équipes. Les joueurs qui forment ton noyau doivent être exceptionnels. Regarde Chicago, ils ont fait tout un boulot de ce côté. Ils ont su qui garder.

Denis Savard : Depuis 2010, les Blackhawks ont perdu plus de 20 joueurs qui sont allés gagner plus de 3 millions par année ailleurs.

LP+ : Est-ce possible de jouer au hockey sans coups à la tête aujourd’hui ?

R.G. : Je regardais le coup d’épaule à la tête de Brendan Gallagher dans le match entre les Canadiens et les Coyotes. C’est tellement rapide, Jordan Martinook arrivait très vite, Gallagher a bougé. Je pense qu’il voulait le frapper légalement. Il ne visait pas la tête.

R.B. : Il y avait plus de coups salauds à mon époque qu’aujourd’hui. Les joueurs sont mieux protégés. Et dans la génération avant la mienne, il n’y avait pas de casques. Vous le saviez. Vous ne frappiez pas à la tête.

D.K. : On ne se frappait pas au-dessus des épaules.

R.B. : À mon époque, nous avons vu des coups assez déments.

D.S. : Mais tu savais qu’à la présence suivante, le joueur qui a fait le coup salaud allait payer le prix.

D.K. : Vous saviez aussi quels joueurs étaient susceptibles de donner des coups salauds. Vous étiez plus alertes quand vous étiez sur la glace en même temps qu’eux.

LP+ : Est-ce qu’il y a plus de respect entre les joueurs aujourd’hui ?

D.K. : Je crois qu’il y en a moins.

Y.C. : Il y a trop de joueurs. Tu affrontes une équipe une fois par mois, une fois par année. Tu ne connais personne dans l’autre équipe. On s’affrontait 14 fois dans l’année. Je savais ce que les gars dans l’autre équipe avaient mangé la veille.

LP+ : S’affronter si souvent, ça crée des amitiés ou vous vous détestiez encore plus ?

D.K. : On se détestait encore plus.

D.S. : Dans un match, nous avons eu cinq mêlées générales. Cinq. En plus, il y a eu une mêlée générale durant l’échauffement. C’était à Chicago contre les North Stars. Basil McRae et Wayne Van Dorp ont commencé à se battre et c’était la folie.

Y.C. : Montréal et Toronto, parfois on prenait le même train car on jouait des matchs consécutifs dans les deux villes. Ils avaient leur wagon en avant, le nôtre était en arrière et personne ne dépassait le milieu du train.

LP+ : Quels sont vos souvenirs l’un de l’autre sur la glace ?

R.B. : Je joue contre Denis un samedi après-midi à Montréal. Ma famille est au match. Denis s’en vient vers moi et il fait son spinorama puis il marque un but. Il a été sans pitié avec moi durant tout le match. Merci, Denis.

D.S. : Raymond ne se souviendra pas de ça, mais on patinait ensemble l’été. On patinait à l’aréna Guy-Gagnon à Verdun. On se préparait pour la saison. J’étais en un contre un contre Raymond, j’ai fait une feinte et je l’ai déjoué. Je ne jouais pas encore chez les professionnels à l’époque. Je me suis dit : si je peux le battre, je peux battre pas mal de joueurs. Ça m’a beaucoup aidé avec ma confiance.

R.B. : OK, tu m’as déjoué deux fois.

R.G. : Il a fait exprès. Il t’a laissé gagner. Il me fait penser à Johnny Bower. Je lui ai dit : « M. Bower, merci de m’avoir laissé marquer mon premier but contre vous à Toronto. » Il m’a répondu qu’il laissait toutes les recrues marquer leur premier but contre lui. J’ai dit : « Merci, mais qu’en est-il du deuxième que j’ai marqué plus tard dans la période ? » « Non, pas celui-là », qu’il m’a répondu. Le problème est qu’on jouait 14 matchs les uns contre les autres. Mais on ne s’affrontait pas. On faisait toujours face au trio défensif et personne ici n’en faisait partie. À Montréal, je jouais contre John Ferguson.

D.K. : J’affrontais Norm Ullman, Stan Mikita, des fois Jean Ratelle.

F.M. : Contre Cowboy Claude Provost à Montréal et Eric Nesterenko à Chicago. Leo Labine à Boston. Lui, il était méchant.

LP+ : Quel conseil donneriez-vous à un joueur qui dispute son premier match dans la LNH ?

D.K. : Amuse-toi ! Ça doit être agréable. Quand tu t’amuses, tu joues bien.

Y.C. : Je lui dirais : « Tu as travaillé tellement fort pour te rendre ici. Tu as réussi. Maintenant, tu dois travailler encore plus fort pour y rester. »

D.S. : Ça me ramène à mon premier match. Tu penses à qui t’a permis de t’y rendre. Tu penses à tes parents, ta famille, tes entraîneurs au niveau junior. Mon premier match avec Chicago était à Buffalo. Mon deuxième match était ici à Montréal. Je devais faire de mon mieux devant tout le monde. C’était mon cadeau à tous ceux qui m’avaient aidé. C’est ce que j’ai pensé toute ma carrière. C’était un privilège de jouer dans cette ligue. Et c’était un privilège d’être assis ici avec toutes ces légendes.

Le centenaire de la LNH

Hockey d’hier à aujourd’hui : table ronde des légendes

Ils ont gagné 22 fois la Coupe Stanley, ils ont obtenu 2934 buts et 7625 points en 8156 matchs de saison et de séries. Ensemble, ils couvrent plus de 40 ans d’activités de la LNH. Pour parler du hockey d’hier et d’aujourd’hui, le tout saupoudré d’anecdotes, rencontre avec six légendes : Raymond Bourque, Yvan Cournoyer, Rodrigue Gilbert, Dave Keon, Frank Mahovlich et Denis Savard.

Rodrigue Gilbert : On avait un entraîneur appelé Larry Popein. C’était sa première année, peut-être le cinquième match. On jouait contre les Canadiens à New York. Il nous a dit qu’il savait comment les battre. C’était sa stratégie : tu vas sur la glace et tu frappes les grenouilles, Guy Lafleur et Yvan Cournoyer. On est rentrés au vestiaire et on perdait 3-0. Larry donnait des coups de pied, il criait : « Vous devez les frapper, ils n’aiment pas ça. » Pete Stemkowski était un rigolo. Il lui a répondu : « Mais qui aime ça ? » On ne pouvait juste pas les rattraper.

Frank Mahovlich : Une fois à Detroit, il y avait une émission et les gens appelaient pour poser des questions aux joueurs. C’était mon tour d’y aller. Je suis en ondes, les gens appellent et posent des questions. Quelqu’un appelle et sa question est : « Frank, pourquoi es-tu incapable de patiner à reculons ? » Pardon ? Viens faire un tour à l’entraînement et je vais te montrer que je peux patiner à reculons. C’était [Pete] Stemkowski qui appelait…

La Presse : Vous avez connu des rivalités intenses. Y a-t-il un moment dans votre carrière où vous vous êtes dit : c’est dément, ça va trop loin ?

R.G. : Chaque fois que je venais à Montréal. On ne gagnait jamais. Il y avait six équipes à l’époque. On s’affrontait quatorze fois dans l’année, sept fois dans chaque ville. Mes trois premières années, je ne pense pas avoir gagné à Montréal.

Yvan Cournoyer : Mon premier match à Boston, il y a eu une mêlée générale. Je me suis dit : pas encore. La saison va être longue.

Dave Keon : Ça arrivait souvent à l’époque.

R.G. : Il n’y avait pas de troisième homme dans les bagarres. Tu devais te trouver quelqu’un à qui t’agripper. Une fois, je me retourne, les joueurs s’en venaient. J’ai saisi Teddy Green. C’était une mauvaise idée.

Raymond Bourque : Tu dois choisir le bon joueur dans les mêlées générales.

R.G. : Il me tenait par le collet et mes pieds ont quitté le sol. Je lui ai dit : « Serre moins fort, je vais perdre connaissance. »

LP+ : Vos carrières couvrent plus de 40 ans. Comment le hockey a-t-il changé durant cette période ?

R.B. : Denis et moi avons joué à la meilleure époque. Je blague. Chaque époque a ses particularités. Mais le sport est encore intact. J’adore regarder les matchs aujourd’hui. Pour moi, la plus grande différence est l’arbitrage, les règlements. Le jeu s’est ouvert, il y a plus de possibilités.

Y.C. : Ils ont amélioré le coup de patin, l’équipement, l’entraînement. Les joueurs sont en forme toute l’année. Les bâtons, les patins, ils ont même amélioré la glace. Il y a eu une course automobile IndyCar à Las Vegas en 2011 et ils se sont rendu compte que la piste était trop petite pour le nombre de voitures. Un coureur a été tué car la piste était trop petite. Les joueurs sont plus gros, ils sont plus rapides, ils n’ont nulle part où aller sur la glace. Placez la bande 10 pieds plus loin, vous aurez plus de place. Quand tu gagnes la mise en jeu dans ta zone, tu es censé avoir le contrôle de la rondelle. Maintenant, ils doivent dégager la rondelle le long de la bande car il n’y a pas d’espace sur la glace. Ce n’est pas normal. Mais c’est trop tard. Ils ne vont jamais agrandir la glace.

R.G. : Certains des gens ici auraient pu jouer aujourd’hui en raison de leur vitesse. Quand ils ont éliminé la ligne rouge, ça a ouvert le jeu. Mais les joueurs sont trop rapides. Tu n’as même pas le temps de penser. Si tu n’as pas pensé à quoi faire avec la rondelle avant de la recevoir, tu n’as aucune chance. Une fois de temps en temps, tu vois un beau jeu, un tic-tac-toe, mais c’est vraiment rare.

F.M. : C’est rapide, et les présences sur la glace sont courtes. Je me souviens de Gordie Howe qui pouvait jouer 40 minutes dans un match.

R.G. : À New York, j’ai déjà vu Phil Esposito faire une présence de 13 minutes. C’est moi qui attendais pour embarquer sur la glace.

LP+ : Est-ce que l’argent a changé le sport ?

D.K. : C’est sûr.

R.B. : Avec le plafond salarial, c’est difficile de garder les équipes intactes.

D.K. : Personne ne va accepter d’être payé moins cher pour rester avec une équipe.

R.B. : Il faut vraiment que tu sois un joueur spécial pour faire ça.

D.K. : Dans les années 60 et 70, les Canadiens formaient des dynasties. Tout le monde aime jouer pour des équipes championnes. Tu acceptais moins d’argent pour rester avec une équipe gagnante. Je ne vois plus ça de nos jours.

Y.C. : Peut-être à la fin de ta carrière. S’ils veulent revenir à Montréal ou à Toronto, s’ils veulent terminer leur carrière à l’endroit d’où ils viennent et s’ils veulent y rester à leur retraite.

D.K. : Quand Frank, Rod et moi avons commencé, tu signais ton contrat, mais si tu avais une mauvaise saison, tu recevais moins d’argent. Ça n’arrive plus.

R.B. : En raison du plafond salarial, si tu repêches bien, tu as des joueurs de talent qui arrivent. Tu peux te permettre peut-être cinq gros contrats par équipe. Si tu offres un mauvais contrat, tu es pris avec. Le plafond salarial a fait mal à la profondeur des équipes. Les joueurs qui forment ton noyau doivent être exceptionnels. Regarde Chicago, ils ont fait tout un boulot de ce côté. Ils ont su qui garder.

Denis Savard : Depuis 2010, les Blackhawks ont perdu plus de 20 joueurs qui sont allés gagner plus de 3 millions par année ailleurs.

LP+ : Est-ce possible de jouer au hockey sans coups à la tête aujourd’hui ?

R.G. : Je regardais le coup d’épaule à la tête de Brendan Gallagher dans le match entre les Canadiens et les Coyotes. C’est tellement rapide, Jordan Martinook arrivait très vite, Gallagher a bougé. Je pense qu’il voulait le frapper légalement. Il ne visait pas la tête.

R.B. : Il y avait plus de coups salauds à mon époque qu’aujourd’hui. Les joueurs sont mieux protégés. Et dans la génération avant la mienne, il n’y avait pas de casques. Vous le saviez. Vous ne frappiez pas à la tête.

D.K. : On ne se frappait pas au-dessus des épaules.

R.B. : À mon époque, nous avons vu des coups assez déments.

D.S. : Mais tu savais qu’à la présence suivante, le joueur qui a fait le coup salaud allait payer le prix.

D.K. : Vous saviez aussi quels joueurs étaient susceptibles de donner des coups salauds. Vous étiez plus alertes quand vous étiez sur la glace en même temps qu’eux.

LP+ : Est-ce qu’il y a plus de respect entre les joueurs aujourd’hui ?

D.K. : Je crois qu’il y en a moins.

Y.C. : Il y a trop de joueurs. Tu affrontes une équipe une fois par mois, une fois par année. Tu ne connais personne dans l’autre équipe. On s’affrontait 14 fois dans l’année. Je savais ce que les gars dans l’autre équipe avaient mangé la veille.

LP+ : S’affronter si souvent, ça crée des amitiés ou vous vous détestiez encore plus ?

D.K. : On se détestait encore plus.

D.S. : Dans un match, nous avons eu cinq mêlées générales. Cinq. En plus, il y a eu une mêlée générale durant l’échauffement. C’était à Chicago contre les North Stars. Basil McRae et Wayne Van Dorp ont commencé à se battre et c’était la folie.

Y.C. : Montréal et Toronto, parfois on prenait le même train car on jouait des matchs consécutifs dans les deux villes. Ils avaient leur wagon en avant, le nôtre était en arrière et personne ne dépassait le milieu du train.

LP+ : Quels sont vos souvenirs l’un de l’autre sur la glace ?

R.B. : Je joue contre Denis un samedi après-midi à Montréal. Ma famille est au match. Denis s’en vient vers moi et il fait son spinorama puis il marque un but. Il a été sans pitié avec moi durant tout le match. Merci, Denis.

D.S. : Raymond ne se souviendra pas de ça, mais on patinait ensemble l’été. On patinait à l’aréna Guy-Gagnon à Verdun. On se préparait pour la saison. J’étais en un contre un contre Raymond, j’ai fait une feinte et je l’ai déjoué. Je ne jouais pas encore chez les professionnels à l’époque. Je me suis dit : si je peux le battre, je peux battre pas mal de joueurs. Ça m’a beaucoup aidé avec ma confiance.

R.B. : OK, tu m’as déjoué deux fois.

R.G. : Il a fait exprès. Il t’a laissé gagner. Il me fait penser à Johnny Bower. Je lui ai dit : « M. Bower, merci de m’avoir laissé marquer mon premier but contre vous à Toronto. » Il m’a répondu qu’il laissait toutes les recrues marquer leur premier but contre lui. J’ai dit : « Merci, mais qu’en est-il du deuxième que j’ai marqué plus tard dans la période ? » « Non, pas celui-là », qu’il m’a répondu. Le problème est qu’on jouait 14 matchs les uns contre les autres. Mais on ne s’affrontait pas. On faisait toujours face au trio défensif et personne ici n’en faisait partie. À Montréal, je jouais contre John Ferguson.

D.K. : J’affrontais Norm Ullman, Stan Mikita, des fois Jean Ratelle.

F.M. : Contre Cowboy Claude Provost à Montréal et Eric Nesterenko à Chicago. Leo Labine à Boston. Lui, il était méchant.

LP+ : Quel conseil donneriez-vous à un joueur qui dispute son premier match dans la LNH ?

D.K. : Amuse-toi ! Ça doit être agréable. Quand tu t’amuses, tu joues bien.

Y.C. : Je lui dirais : « Tu as travaillé tellement fort pour te rendre ici. Tu as réussi. Maintenant, tu dois travailler encore plus fort pour y rester. »

D.S. : Ça me ramène à mon premier match. Tu penses à qui t’a permis de t’y rendre. Tu penses à tes parents, ta famille, tes entraîneurs au niveau junior. Mon premier match avec Chicago était à Buffalo. Mon deuxième match était ici à Montréal. Je devais faire de mon mieux devant tout le monde. C’était mon cadeau à tous ceux qui m’avaient aidé. C’est ce que j’ai pensé toute ma carrière. C’était un privilège de jouer dans cette ligue. Et c’était un privilège d’être assis ici avec toutes ces légendes.

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