Analyse

La bulle financière des CPE

L’Association québécoise des centres de la petite enfance (AQCPE) se lance dans une tournée médiatique de revendications budgétaires. Pourquoi ? Pour revaloriser son réseau. 

Cela dit, certains CPE pourraient être sur le respirateur artificiel, sans qu’ils en soient eux-mêmes conscients. 

Et si votre CPE était en fin de parcours ?

Durant plusieurs années, le réseau des CPE a été financé généreusement. Si bien que la gestion n’était pas serrée comme elle aurait dû l’être. Maintenant exposés à une rigueur budgétaire plus intensive, certains conseils d’administration de CPE réalisent que les choix passés nuisent à la survie financière des installations.

Quand les parents savent compter

Quand le gouvernement du Parti libéral du Québec a annoncé une contribution supplémentaire en fonction du revenu familial net des parents pour les services subventionnés, il venait d’éliminer l’universalité du tarif dans ces installations. Du coup, on est venu donner aux parents mieux nantis une raison de quitter l’univers du service subventionné : cela devenait souvent moins coûteux de payer le service non subventionné en tenant compte de l’impact fiscal net.

Alors voilà, les CPE se sont retrouvés à jouer à armes plus égales avec les autres services de garde. D’un point de vue financier, il n’était plus logique pour certains parents d’opter pour le CPE.

Quand l’AQCPE affirme que la « taxe famille » fait un tort considérable aux familles, elle mène aussi cette lutte contre la contribution supplémentaire en vue de favoriser le retour de la clientèle aisée vers les CPE.

D’ailleurs, pendant des années, on a martelé que les CPE avaient leur raison d’être pour aider la clientèle défavorisée. Tout à coup, on voit un changement d’intérêt et un changement de cap, car le président de l’AQCPE est maintenant d’avis que c’est discriminatoire envers les enfants de familles moyennes à riches de ne pas leur donner un accès universel aux services subventionnés.

Le CPE n’est pas gouvernemental

Les CPE sont souvent perçus par le public comme un prolongement du système scolaire. En fait, ce n’est pas le cas. Ce sont des organismes à but non lucratif, subventionnés par le gouvernement. Ainsi, si le CPE n’arrive pas à faire ses frais, à payer son loyer et ses employés, il sera soumis à une fermeture éventuelle, comme n’importe quel organisme ou entreprise qui ne survit pas. Même si son but n’est pas lucratif, le CPE est privé.

La CSQ et la CSN sont entrées dans le réseau des CPE comme si la capacité de payer était garantie par le gouvernement du Québec. Par exemple, la convention collective signée peut implicitement imposer un dépassement des ratios d’enfants par éducatrice proposés par le gouvernement. En effet, quand le service de garde est ouvert 10 heures par jour, on n’a pas besoin d’une grande quantité d’employés à l’ouverture et à la fermeture. Les installations privées gèrent de façon optimale les ratios, la convention collective de certains CPE favorise les dépassements d’effectifs.

La gouvernance : problème implicite

Le conseil d’administration d’un CPE est composé de parents qui n’ont pas toujours la formation pour remettre en cause la gestion de la direction. Selon la Loi sur les services de garde éducatifs à l’enfance, à l’article 7, on précise que le conseil d’administration est composé d’au moins sept membres, dont au moins les deux tiers de ceux-ci sont des parents usagers ou de futurs usagers. Donc, la directrice de la garderie se retrouve plus devant un comité de parents que devant un conseil d’administration à même de la remettre en question. Les parents peuvent avoir une proximité avec la direction ; ainsi, comment croire en leur capacité de donner la priorité aux intérêts financiers du CPE à moyen et à long terme ?

En définitive, certains parents au conseil d’administration des CPE se retrouvent devant des états financiers qui envoient un signal d’alarme, des revenus plafonnés et une structure de coûts inflexible. On aura réagi trop tard dans plusieurs cas. Vous vous inquiétez pour votre CPE ? Il serait temps de jeter un coup d’œil aux états financiers.

NDLR : le féminin a été utilisé dans le texte pour représenter la réalité la plus courante.

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