TANZANIE
Découverte d’un énorme gisement d’hélium
La Presse
L’hélium est surtout connu pour gonfler les ballons et déformer les voix. Mais ce gaz noble (ou gaz rare) est surtout utile dans une myriade de domaines autrement importants, comme l’imagerie médicale et les industries électronique, nucléaire et spatiale.
« L’hélium, c’est le gaz neutre le plus léger qui existe », explique Normand Mousseau, professeur de physique et titulaire d’une chaire de recherche de l’Université de Montréal. L’hélium devient liquide à très basse température et sert ainsi de liquide de refroidissement. Dans le domaine médical, il est utilisé pour refroidir les puissants aimants des appareils à imagerie par résonance magnétique (IRM).
Ces dernières années, la communauté scientifique s’est alarmée de la raréfaction de l’hélium. En 2010, le Prix Nobel américain de physique Robert Richardson avait ainsi estimé que les réserves mondiales pourraient s’épuiser d’ici à 2035.
« Contrairement aux autres, c’est le seul élément qu’on perd littéralement. Quand on laisse l’hélium dans l’air, il s’échappe de l’atmosphère. »
— Normand Mousseau, professeur de physique et titulaire d’une chaire de recherche de l’Université de Montréal.
L’hélium est pourtant l’élément le plus commun de l’univers après l’hydrogène. Mais sur Terre, il est le résultat de la désintégration de minéraux radioactifs et son extraction est liée à celle du gaz naturel, qui en contient dans d’infimes proportions.
Alors que les réserves mondiales étaient en baisse constante, l’hélium a également connu une inflation record. Les États-Unis, qui fournissent 75 % de la production mondiale, ont décidé en 1996 de privatiser leur programme fédéral d’hélium. « Jusqu’à la fin de la guerre froide, c’était une ressource stratégique gérée par le gouvernement. Ça maintenait les prix et les stocks », explique Normand Mousseau. Depuis, les prix ont augmenté de façon exponentielle.
500 %
Augmentation du prix de l’hélium au cours des 15 dernières années.
« Avec l’augmentation du prix, les organismes médicaux vont essayer d’utiliser l’hélium en circuit fermé », afin de le recycler et de ne pas le laisser s’échapper à tout jamais dans l’atmosphère, poursuit Normand Mousseau.
L’équipe de chercheurs évalue à 54 milliards de pieds cubes le volume de la réserve découverte dans ce pays d’Afrique de l’Est. De quoi satisfaire la demande mondiale pendant six à sept ans, estime Normand Mousseau. Surtout, « c’est la première découverte d’hélium en lui-même, et pas comme sous-produit du gaz naturel », précise l’universitaire.
Jusqu’à présent, l’hélium avait toujours été découvert à la faveur de forages d’hydrocarbure, mais jamais intentionnellement. Dans ce cas de figure, les chercheurs ont indiqué que l’activité volcanique produisait la chaleur nécessaire pour libérer l’hélium enfermé dans des roches anciennes vers des champs de gaz moins profond. Cette méthode, testée pour la première fois dans la vallée volcanique du Grand Rift en Tanzanie, pourrait donc faire des émules à l’avenir.
« Nous pouvons appliquer cette même stratégie à d’autres parties du globe qui ont un passé géologique similaire pour trouver de nouvelles ressources d’hélium », s’est enthousiasmé Pete Barry, chercheur de l’Université d’Oxford qui a également participé au projet. « Ça ouvre la porte à de nouvelles découvertes », conclut également Normand Mousseau.
L’usage récréatif
L’hélium, plus léger que l’air, sert classiquement à gonfler les ballons de baudruche. Si cette utilisation est la plus connue, elle ne représente pourtant qu’une infime partie de la production totale d’hélium. De la même manière, l’hélium sert à gonfler les dirigeables, ou encore les ballons-sondes que les météorologues utilisent. Inhalé, l’hélium déforme également la voix pour lui donner une tonalité fluette.
L’usage médical
La réserve d’hélium découverte en Tanzanie pourrait servir à plus de 1,2 million d’appareils d’imagerie par résonance magnétique, ont expliqué les chercheurs responsables du projet. L’hélium sert à refroidir les aimants supraconducteurs des scanneurs à IRM, mais également de bien d’autres appareils nécessitant d’être maintenus à froid.
La plongée sous-marine
Pour atteindre des profondeurs importantes, les plongeurs utilisent dans leur bonbonne le mélange Trimix, dit 25/20 pour 20 d’oxygène et 25 d’hélium. De cette façon, la concentration d’azote est ramenée à 55 %, au lieu des 80 % normalement présents dans l’air. Ce mélange permet de minimiser la narcose à l’azote, aussi appelé l’ivresse des profondeurs, qui provoque des troubles du comportement en agissant sur le système nerveux.
L’industrie spatiale
Dans l’industrie spatiale, l’hélium est utilisé pour maintenir les instruments satellites à basse température, ainsi que les moteurs de fusée. Il sert également à refroidir l’oxygène et l’hydrogène liquide utilisé dans les vaisseaux spatiaux . La NASA l’utilise également pour purger les réservoirs de ses fusées.