Science

Les mystères de l’eau souterraine

Seule une infime portion des nappes phréatiques mondiales sont renouvelables, selon une nouvelle étude montréalaise. C’est le premier bilan exhaustif de l’eau souterraine de la planète, dont le volume est 200 fois plus important que celui des eaux de surface.

« Plus une nappe phréatique est jeune, plus elle risque de se remplir rapidement quand elle est utilisée », explique Tom Gleeson, de l’Université de Victoria, qui est l’auteur principal de l’étude parue dans la revue Nature Geoscience. « Nous avons trouvé un peu plus d’eau souterraine jeune que ce qui était calculé avec d’autres méthodes, mais il s’agit quand même d’une infime portion des eaux souterraines de la planète. » M. Gleeson a fait ces travaux alors qu’il enseignait à l’Université McGill – il vient tout juste de déménager en Colombie-Britannique.

Le Québec, selon la carte établie par M. Gleeson, a une bonne quantité – en plein dans la moyenne mondiale – d’eaux souterraines jeunes.

M. Gleeson et son équipe ont utilisé, pour calculer le volume des eaux souterraines de la planète, une nouvelle méthode : la concentration en tritium, une molécule notamment relâchée par les explosions nucléaires. « Nous pouvons voir l’âge des nappes phréatiques jeunes en calculant leur teneur en tritium relâché par les essais nucléaires des années 50, 60 et 70. Depuis, il n’y a plus eu d’essais nucléaires. »

Les chercheurs ont ensuite comparé l’âge selon la concentration de tritium à d’autres méthodes traditionnelles, qui utilisent la modélisation numérique de la croûte terrestre. Résultat : la proportion d’eau souterraine jeune, ayant moins de 50 ans, est deux à trois fois plus importante avec la méthode du tritium.

« Nous allons maintenant calculer exactement le rythme auquel une nappe phréatique peut être utilisée sans que son volume diminue. Ça pourra aider à mettre sur pied les politiques publiques de préservation des eaux souterraines. »

— Tom Gleeson, auteur principal de l’étude 

Une incertitude entoure toutefois la capacité des réservoirs d’eau souterraine jeune à être remplis par l’eau souterraine plus vieille, située à une plus grande profondeur, en plus des apports de l’eau de surface qui percole jusqu’aux nappes phréatiques. « Il faut faire des modélisations en fonction de chaque type de terrain », dit M. Gleeson.

L’une de ses études précédentes concluait ainsi que l’exploitation du gaz de schiste ne contaminait pas les réservoirs d’eau jeune, parce qu’ils étaient généralement séparés des réservoirs d’eau plus vieille situés à la même profondeur que les réservoirs de gaz naturel. Selon les calculs de M. Gleeson, il faut environ 1000 ans pour que l’exploitation du gaz de schiste finisse par contaminer les nappes phréatiques utilisées par la population, la faune et la flore.

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