Vélo de montagne

Journée mi-figue, mi-raisin pour les vététistes québécois

RIO DE JANEIRO — Le vainqueur Nino Schurter venait tout juste de franchir le fil d’arrivée quand Raphaël Gagné s’est avancé pour les entrevues. Le cycliste de Lac-Beauport s’était fait arrêter par les commissaires deux tours plus tôt, pour cause d’écart trop grand avec les meneurs.

Gagné imaginait un autre scénario pour sa première expérience olympique. Le vétéran de 29 ans se voyait terminer parmi les 20 premiers. Il n’y a pas eu de crise ni de larmes, seulement de l’incompréhension.

« Je suis déçu de ne pas avoir pu sortir le meilleur de moi-même, je sais que je vaux mieux que ça dans une bonne journée », a commenté le médaillé d’or des Jeux panaméricains, relégué au 40e rang.

Ralenti par la circulation lourde au premier tour, Gagné a dû poser pied à quelques reprises dans les sections techniques, comme plusieurs concurrents.

« Techniquement, je me sentais en contrôle, j’ai bien piloté, a-t-il analysé. J’ai débarqué deux à trois fois dans les premières descentes avec la circulation. Ensuite, c’est comme si ça n’a jamais vraiment embarqué. »

« Physiquement, ç’a été plus dur. Est-ce que j’étais fatigué ? Je ne sais pas. Le temps me le dira peut-être. »

— Raphaël Gagné

Pendant une bonne partie de la course, Gagné a roulé esseulé, pourchassé par un concurrent rwandais inconnu au bataillon. Cette seule image illustrait l’ampleur de la déconvenue.

Gagné a refusé de mettre en cause les pépins physiques qui ont plombé son résultat aux Championnats du monde au début du mois de juillet (54e). À ses dires, les dernières semaines de préparation ont été impeccables. Une journée « sans » ? a proposé un collègue. « J’ai de la misère avec cette expression, mais je suis loin de ce que je peux livrer lorsque je suis à mon mieux », a simplement répondu Gagné, 18e aux Mondiaux 2015.

Choisi en matinée comme porte-drapeau de la Suisse pour la cérémonie de clôture, Schurter n’a pas déçu son comité olympique en se montrant à la hauteur de son statut de favori. Le quintuple champion mondial a devancé Jaroslav Kulhavy, qui l’avait surpris au sprint il y a quatre ans à Londres.

Cette fois, Schurter n’a pas pris de risque, larguant le Tchèque avec un peu plus d’un tour à faire. Il a eu le temps de savourer sa médaille d’or, terminant avec une avance de 50 secondes. L’Espagnol Carlos Coloma Nicolas a gagné le bronze (+ 1 min 23 s).

« RESTER POSITIF »

Léandre Bouchard, l’autre Canadien en lice, est arrivé neuf minutes plus tard. L’Almatois de 23 ans s’est bien battu dans les deux derniers tours du circuit de Deodoro pour passer de la 34e à la 27e place.

Son sourire émerveillé disait tout sur son état d’esprit. « C’est sûr que j’aurais aimé une performance un peu supérieure considérant ce que j’ai fait cette année, a-t-il confié. Mais l’idée pour moi ici était de donner le meilleur de moi-même et de rester positif. »

Auteur d’un bon départ, Bouchard a été victime d’une violente chute dans la zone de ravitaillement après avoir heurté un coureur arrêté devant lui. Il est tombé une autre fois, mais ne s’est pas laissé démonter.

« J’ai continué à batailler tout le long de la course et c’est ce dont je suis fier aujourd’hui. »

— Léandre Bouchard, 27e

Bouchard a parlé d’une première expérience olympique « magique » et « magnifique », se considérant privilégié d’avoir pu assister à la remontée fantastique de sa compatriote Catharine Pendrel, médaillée de bronze la veille.

« Catharine en est à ses troisièmes Jeux, Emily [Batty, 4e samedi] à ses deuxièmes, a-t-il noté. À mon âge, je peux progresser beaucoup. C’est une bonne expérience pour l’an prochain et les prochains Jeux olympiques. »

Bouchard a été surpris de batailler à quelques reprises avec le champion mondial sur route Peter Sagan, l’objet de curiosité de cette épreuve. S’élançant de la dernière ligne, le Slovaque s’est faufilé jusqu’à Schurter et la tête de course peu après le départ. Deux crevaisons ont toutefois sapé les espoirs de l’ancien champion mondial junior de la spécialité, dernier coureur arrêté par les commissaires avant le tour ultime (35e).

« Je ne m’attendais pas à rouler dans les mêmes eaux que lui, a admis Bouchard. C’est quand même un parcours de calibre international. Ça prend beaucoup d’habiletés. Il faut être aussi bon physiquement que techniquement. En route, l’effort n’est pas tout à fait pareil. Mais il est champion du monde, on sait qu’il a un bon moteur. »

Et voilà, les Jeux olympiques de Rio se terminent comme ça pour les deux vététistes québécois, qui tournent maintenant leurs yeux vers la dernière manche du circuit de la Coupe du monde, au début du mois de septembre.

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