Santé

Percée montréalaise dans la recherche sur les cellules souches du cordon ombilical

Dans Science aujourd’hui, des chercheurs montréalais dévoilent le premier facteur de croissance des cellules souches de cordon ombilical. Ces cellules souches sont utilisées pour remplacer la moelle osseuse des patients atteints de cancer du sang, comme dans le cas de Mai Duong, cette jeune mère québécoise d’origine vietnamienne qui a fait les manchettes cet été avec une campagne internationale pour lui trouver un donneur compatible.

« Nous avons mis au point la seule molécule qui permet de multiplier les cellules souches de cordon », explique l’auteur principal de l’étude, Guy Sauvageau, chercheur principal à l’Institut de recherche en immunologie et en cancérologie (IRIC) de l’Université de Montréal, qui travaille à l’hôpital Maisonneuve-Rosemont, où est traitée Mme Duong. « On pourra arriver à multiplier par dix la quantité de cellules souches disponibles et les utiliser en premier lieu quand il faut une greffe de moelle osseuse. »

Les cellules souches sont utilisées parce qu’elles peuvent se transformer en n’importe quelle cellule du corps. La moelle osseuse est le lieu où naissent les globules blancs du sang, les soldats du système immunitaire. En ce moment, les cellules souches de cordon sont utilisées dans seulement 15 % des cas, la plupart des traitements utilisant des dons de moelle épinière de membres de la famille du patient. La banque de cordons ombilicaux d’Héma-Québec reçoit 5000 dons par année, dont environ 1600 sont utilisables. Selon le Dr Sauvageau, seulement 5 % des cordons de bébés sont utilisables pour des greffes de moelle osseuse.

« Un des principaux problèmes est qu’on a un cordon ombilical de bébé et qu’on doit s’en servir pour un adulte. Il manque de matériel. Avec notre facteur de croissance, on pourra remédier à ce problème. »

— Guy Sauvageau, chercheur principal à l’Institut de recherche en immunologie et en cancérologie (IRIC) de l’Université de Montréal

Cela va également aider les patients ne trouvant pas de donneur de cordon compatible, particulièrement les membres de minorités visibles.

La molécule suscite de l’intérêt partout dans le monde et pourrait être exploitée dès 2016, selon le Dr Sauvageau. « Je vais cette fin de semaine à Seattle, où est situé le plus gros centre de greffe de moelle osseuse aux États-Unis. La Chine se montre intéressée. » Les essais cliniques préliminaires commenceront en décembre à Montréal, Toronto et Vancouver sur 25 patients et, dès 2016, s’étendront à suffisamment de patients pour que quiconque en a besoin au Canada puisse y avoir recours, selon le chercheur de Maisonneuve-Rosemont.

RÉDUCTION DU TEMPS DE TRAITEMENT

Un autre avantage de la molécule identifiée par les chercheurs de l’IRIC, appelée UM171, est qu’elle semble réduire le temps de traitement. « Ça prend une à deux semaines au lieu de quatre à cinq pour que le greffon prenne, dit le Dr Sauvageau. C’est une période très difficile. Le patient n’a plus de globules blancs, il est très à risque d’infection. »

UM171 a été identifiée à partir d’une banque de 5280 molécules chimiques, dont 380 étaient des composés non commerciaux synthétisés à l’Université de Montréal. « Nous avions, il y a quelques années, trouvé un facteur de croissance pour les cellules souches de souris, mais il ne fonctionnait pas chez l’humain. Nous sommes tombés sur celui-ci, qui avait été mis au point par un chercheur de l’Université de Montréal, pour un projet sur l’hypertension. C’est un hasard assez cocasse. »

La molécule appartient encore à l’Université de Montréal, mais un groupe torontois voudrait en acquérir les droits de distribution. « C’est un groupe qui a développé un bioréacteur unique permettant de faire des cultures cellulaires en petit volume, et dont nous nous sommes servis », dit le Dr Sauvageau.

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