Santé

Les infections au Zika en forte baisse au Québec

La prudence reste de mise, mais la panique est écartée. Après avoir semé l’inquiétude chez les voyageurs en 2016 et 2017, le virus Zika s’essouffle au Québec et dans l’ensemble du pays. Seulement sept infections ont été répertoriées au Québec pour toute l’année 2018, et l’Agence de la santé publique du Canada vient de modifier ses conseils aux voyageurs afin de refléter la diminution du risque. Le point.

7 cas signalés en 2018

Selon les chiffres du ministère de la Santé et des Services sociaux, seulement sept infections au virus Zika ont été signalées au Québec pour toute l’année 2018. Il s’agit d’une baisse draconienne par rapport aux 23 cas de 2017 et aux 88 cas rapportés en 2016. Les chiffres réels peuvent être plus élevés puisque l’infection au Zika n’est pas une maladie à déclaration obligatoire au Québec, mais elle fait l’objet d’une vigilance depuis 2016. « On ne peut pas parler de risque zéro, mais le risque est beaucoup moins élevé qu’avant », confirme la Dre Yen Bui, médecin-conseil au comité consultatif québécois en santé des voyageurs de l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ).

Pas de bébé à petite tête

Le Zika suscite surtout des craintes pour les femmes enceintes, qui peuvent transmettre le virus à leur fœtus. Celui-ci peut alors avoir des malformations comme une microcéphalie (tête trop petite). Les bébés à petite tête ont fait les manchettes dans plusieurs pays d’Amérique du Sud, notamment au Brésil. Au Québec, le ministère de la Santé a répertorié 15 femmes enceintes infectées par le Zika. Une seule d’entre elles a transmis le virus à son bébé, et celui-ci n’a pas présenté d’anomalie. Encore une fois, il est possible que des cas aient échappé aux autorités.

Infections à l’étranger

Presque tous les Québécois infectés par le Zika l’ont été par des moustiques alors qu’ils étaient en voyage à l’étranger, principalement en Amérique latine. Le virus peut aussi être contracté par voie sexuelle, mais seulement une poignée de transmissions du genre ont été documentées au Québec. « On s’est aperçus que le virus peut persister dans le sperme assez longtemps, mais que la période infectieuse, elle, est beaucoup plus réduite », explique la Dre Bui.

Essoufflement en Amérique latine

La diminution des cas au Québec reflète l’essoufflement du virus en Amérique latine. Ironiquement, cela est dû en partie à la vigueur des épidémies qui ont frappé là-bas. « Les gens infectés développent habituellement des anticorps et deviennent protégés à vie, et il a manqué de gens non infectés pour que les moustiques puissent propager le virus », explique la Dre Yen Bui, de l’INSPQ. Les efforts d’éradication des moustiques ont aussi sans doute contribué à la baisse. S’il ne semble plus y avoir de transmission locale dans les Bahamas, en Guadeloupe, en Martinique, en Floride et au Texas, le virus « continue à circuler à bas bruit » dans un grand nombre d’autres endroits, indique la Dre Bui. Le Mexique ainsi que plusieurs zones des Caraïbes, d’Amérique centrale et du Sud, d’Asie et d’Afrique sont ainsi jugés « préoccupants » par l’Agence de la santé publique du Canada.

Conseils aux voyageurs modifiés

Suivant une décision semblable des Centers for Disease Control and Prevention américains, l’Agence de la santé publique du Canada a modifié lundi soir ses conseils aux voyageurs. Le principal changement concerne la période pendant laquelle les hommes ou les couples ayant voyagé dans une région touchée devraient s’abstenir d’essayer de concevoir un enfant (trois mois au lieu de six mois). La recommandation pour les femmes est maintenue à deux mois. Les autorités suggèrent toujours aux femmes enceintes ou qui planifient une grossesse d’éviter les régions touchées. « Le risque de contracter le virus Zika est très faible. Mais si c’est le cas, le risque pour le bébé est non négligeable. La perception et la gestion du risque sont très individuelles, et je suggère aux femmes et aux couples concernés de consulter dans une clinique santé voyage », dit la Dre Yen Bui.

Principe de précaution

Avec le recul, a-t-on pesé sur le bouton panique trop vite au Québec avec le Zika ? La Dre Yen Bui ne le croit pas. « Devant un virus qui venait d’apparaître en Amérique, devant sa propagation rapide et les impacts qu’on constatait chez les femmes enceintes et leur fœtus, je ne pense pas que c’était exagéré. » Elle souligne que plusieurs faits étaient mal compris à l’époque. Quelle est la proportion de femmes infectées qui transmettent le virus à leur fœtus ? Combien de bébés, du lot, développent des complications ? Avec quelle efficacité et jusqu’à combien de temps après une infection le virus peut-il se transmettre sexuellement ? Les réponses à toutes ces questions sont venues dans le feu de l’action. « Quand il y a beaucoup d’inconnues, on est plus prudent, résume la Dre Bui. C’est le principe de précaution. »

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