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Vaudreuil-Dorion cité en exemple dans le monde

Comment assurer une cohésion sociale tout en accueillant des milliers de familles immigrantes ? La petite ville de Vaudreuil-Dorion, dont la population immigrante est passée de 5 % à 48 % en 20 ans, a été forcée de se poser la question. Pour favoriser un bon climat, elle a mis sur pied un programme de médiation culturelle (« Je suis ») qui est aujourd’hui cité en exemple !

Il y a deux semaines, le maire de Vaudreuil-Dorion, Guy Pilon, a présenté son projet de médiation culturelle à Bogota, en Colombie. 

« Cités et gouvernements locaux unis (CGLU), c’est comme l’Union des municipalités du Québec, mais mondiale, a-t-il expliqué à La Presse. Moi, je ne suis pas habitué à ça, mais M. Coderre était là, les maires de New York, Paris, Liverpool aussi. T’avais le maire de Pékin, des gens des Nations unies, de l’Espagne, pis Ti-Guy Pilon au bout de la table pour parler de son projet ! »

Pour le maire de Vaudreuil-Dorion, opérateur d’équipement lourd de son état, cette récompense vient couronner six ans d’efforts menés avec son directeur du Service des loisirs, Michel Vallée, pour créer des vases communicants entre les différentes communautés de sa ville et ce qu’il appelle « les anciens ». Grâce à des activités culturelles, mais aussi à des initiatives dans les milieux de la santé, de l’environnement, de l’urbanisme, etc.

Jeudi dernier, une délégation de la Ville menée par M. Vallée s’est rendue à Mexico pour recevoir le prix « culturel » de cette importante organisation internationale. Ex æquo avec Tombouctou (au Mali). Une bourse de 25 000 euros (36 000 $CAN) leur a également été remise. « Ce projet promeut et reconnaît l’art de promouvoir la connaissance de l’autre et d’apprendre le respect des différences », a écrit le président de CGLU.

TENDRE UNE MAIN

Promouvoir la connaissance de l’autre, c’est ce que Michel Vallée, l’idéateur du programme « Je suis », s’est fixé comme objectif.

« Je me souviens d’une résidante de longue date, Micheline, qui m’a dit un jour : “Je ne me reconnais plus dans ma ville, l’ONU pousse dans ma cour, je vais déménager.” Durant cette même période, une éducatrice pakistanaise lui a dit : “Je n’ose plus aller vers les gens, je sens que je les dérange…” » Les communautés commençaient à se ghettoïser, des tensions, à se profiler. « Il fallait faire quelque chose », rappelle M. Vallée.

C’est dans ce contexte qu’il a mis sur pied en 2010 ce programme de médiation culturelle grâce auquel la Ville offre maintenant plus de 600 ateliers à près de 20 000 personnes. Dont Micheline, qui a finalement décidé de rester…

Une des premières activités organisées par la Ville a été le défilé Mozaïk. Oubliez le traditionnel défilé de la Saint-Jean. Depuis six ans, le 23 juin, les citoyens de Vaudreuil-Dorion sont invités à participer à ce carnaval multiculturel, qui attire plus de 1000 personnes par année. 

200

Nombre d’ateliers organisés par la Ville, sur une période de cinq mois, pour préparer l’événement

« On veut créer des rencontres improbables entre des groupes de gens, explique Michel Vallée. Par exemple, le Cercle des fermières va travailler avec un groupe d’adolescents – sous la supervision d’un artiste de la communauté – pour choisir les thèmes des différents tableaux du défilé, les costumes et la musique. On a aussi mis à contribution un chœur togolais ! »

Communautés culturelles, personnes âgées, graffiteurs, ados, personnes handicapées, élèves, tout le monde est mis à contribution dans ce programme dans lequel la Ville a investi près de 700 000 $.

DE L’AFRIQUE DU SUD À VAUDREUIL

Tina Struthers a quitté l’Afrique du Sud il y a cinq ans. Corruption, criminalité, la jeune femme diplômée d’une école des beaux-arts a d’abord vécu à London, en Ontario, avant de s’installer à Vaudreuil-Dorion avec son mari et leurs enfants. Dès son arrivée dans la ville de Guy Pilon, elle a commencé à faire des costumes pour le Théâtre des sans-papiers. C’est comme ça qu’elle s’est fait remarquer.

Depuis 2012, elle fait partie de la direction artistique qui organise le défilé Mozaïk et multiplie les projets artistiques à longueur d’année.

Jasmine Shama, elle, est née à Montréal d’une mère québécoise et d’un père indien. Elle a déménagé à Vaudreuil-Dorion pour se rapprocher de ses parents, qui habitaient à Baie-D’Urfé. Après la naissance de son deuxième enfant, elle a fait une dépression. 

« Je ne travaillais pas, j’avais besoin de sortir, de m’engager dans ma communauté… »

— Jasmine Shama

Elle a commencé par participer aux ateliers offerts par la Ville. Une activité de bricolage en famille qui a mené à une exposition à la bibliothèque municipale.

Cette expérience lui a donné l’élan nécessaire pour lancer ses propres projets. Elle a fondé l’Organisation indo-canadienne de Montréal et organisé des activités autour des grandes fêtes indiennes. 

« Il faut travailler avec les leaders naturels des communautés culturelles et faire en sorte qu’il y ait des échanges avec les organismes existants de la Ville, croit Michel Vallée. C’est la meilleure façon de créer un sentiment d’appartenance et de relever le défi de la diversité ! »

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