Technologie

La connexion du bonheur

Depuis neuf ans, Chris Dancy, « l’homme le plus connecté du monde », consigne tous ses faits et gestes avec 700 connecteurs, applications et appareils divers. Il multiplie les conférences dans le monde entier, dont au Datavore ce matin au Palais des congrès, à Montréal. Mais ne vous attendez pas à voir sur scène un cyborg : pour l’Américain de 48 ans, cette quête est d’abord celle du bonheur et de la spiritualité. Et la techno peut y contribuer d’au moins quatre façons.

Recouvrer la santé

En 2008, la vie de Chris Dancy était « un bordel », de son propre aveu. « J’étais gros, je fumais beaucoup, je me mettais souvent en colère, je prenais des médicaments pour le cholestérol et la dépression… et je dépensais beaucoup d’argent », raconte-t-il en entrevue. 

C’est alors qu’il a commencé à enregistrer son quotidien et à constater, objectivement, tout ce qui clochait. Son compteur de pas lui a confirmé qu’il ne bougeait pas assez, il mangeait et buvait trop pour mieux profiter de sa cigarette. Toutes ces observations sur lui-même qu’il consignait ont convaincu cet informaticien de formation de changer sa vie. Avec un certain succès : six ans plus tard, il avait perdu 100 livres, pratiquait la méditation et avait arrêté de fumer.

Tisser des liens

Vers 2011, Chris Dancy a réalisé que sa grande utilisation de la technologie l’avait rendu plus seul que jamais. Il a alors entrepris une démarche très singulière, utilisant la technologie pour solidifier les liens entre humains. 

Sa philosophie, très riche, est difficile à résumer. Grâce à son Apple Watch, il s’amuse à envoyer ses battements de cœur à son conjoint. Il utilise ses ampoules WiFi à la maison pour recréer les ambiances de photos évoquant des moments de bonheur. Et son « tour » préféré : échanger son téléphone avec quelqu’un d’autre, chacun lisant et répondant aux messages, une façon magique de se mettre dans la peau de l’autre.

Maîtriser le temps

Il s’agit probablement de l’aspect le plus ésotérique de la démarche de M. Dancy, et il en est bien conscient. « La technologie affecte notre sens du temps. Dans mon cas, il passe trop vite. J’ai appris à l’utiliser. » Depuis des années, il s’envoie des courriels sur des notions temporelles destinés à son futur moi – il reçoit ainsi aujourd’hui des messages qu’il s’est envoyés dans le passé. 

Dans un monde de plus en plus virtuel, « où tout devient éphémère, de l’amour aux pixels », lui sent le besoin de garder des archives de tout ce qui le concerne. Il assure vivre de fréquents épisodes de synchronicité. « Je suis peut-être un voyageur du temps », laisse-t-il tomber, mi-sérieux.

Gagner sa vie

L’entrevue avait commencé de façon déstabilisante, « l’homme le plus connecté du monde » laissant poindre l’agacement qu’on l’interroge sur ses appareils. « Les gens s’attendent à voir un monstre. En fait, je dois en porter huit au maximum. En 2012, j’avais l’air d’un cyborg avec tous mes capteurs mais aujourd’hui, il s’agit surtout d’applications. » 

Ses 700 « systèmes de suivi » n’ont rien d’exceptionnel, assure-t-il : « Si vous avez un téléphone intelligent, vous en avez sûrement au moins 300. » Chose certaine, cette expérience, qui en sera à sa dixième année l’an prochain – un livre sera publié –, lui permet de gagner sa vie. « Je n’arrive pas à le croire mais oui, les gens paient pour m’écouter et, comme vous, prennent des notes quand je parle ! »

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