Analyse

Le chômage à un creux historique

Le mois dernier, le Québec comptait 28 800 chercheurs d’emploi de moins qu’en octobre et 56 200 de moins qu’il y a un an. Cela a fait fléchir de quatre dixièmes le taux de chômage à 6,2 %, soit 1,3 point de moins qu’il y a un an.

Il s’agit du taux le plus faible depuis au moins 1976, année du début de l’Enquête sur la population active (EPA) de Statistique Canada.

Seule la Colombie-Britannique a maintenant un taux de chômage plus faible que celui du Québec, à 6,1 %.

À l’échelle canadienne, le taux de chômage est passé de 7,0 % à 6,8 %, son taux le plus faible en 18 mois.

Depuis six mois, le marché du travail québécois s’est assaini, mais cette amélioration était moins marquée le mois dernier. Le nombre d’emplois a peu varié (+ 8500 sur un total de 4,18 millions), si on tient compte du niveau de confiance de 68 % des données de l’EPA, menée auprès d’un échantillon de quelque 54 000 ménages canadiens, dont 10 185 québécois.

Cette faible augmentation refléterait avant tout des embauches dans les administrations publiques (9400), l’information, la culture et les loisirs (8600), l’agriculture (6300) et le commerce (6200).

Les diminutions d’effectifs les plus significatives ont été observées dans les services professionnels, scientifiques et techniques (- 6700), d’enseignement (- 5700) et d’hébergement et de restauration (- 5400).

Plus significatif encore toutefois est le retrait de 20 300 personnes de la cohorte de la population active, c’est-à-dire celle qui a ou cherche activement un emploi.

Voilà avant tout pourquoi a diminué le nombre de demandeurs d’emploi québécois, qui s’élève encore à 274 800, soit un chômeur canadien sur cinq.

Sans jouer les rabat-joie, il faut noter que la petite augmentation du nombre d’emplois en novembre réside dans le travail à temps partiel. Le nombre d’heures travaillées est inférieur de 26 000 à celui d’octobre, soit l’équivalent de 650 postes à temps plein (40 heures).

Les fluctuations mensuelles de l’EPA sont telles qu’elles transforment considérablement le tableau d’un mois à l’autre. Ainsi, en octobre, le Québec comptait 69 800 emplois de plus qu’un an plus tôt, dont 79 400 à temps plein. Autrement dit, des postes à temps partiel se sont transformés en emplois à temps plein.

Le mois dernier, on comptait 80 600 emplois de plus qu’en novembre 2015, dont 29 600 seulement à temps plein.

Le Québec, une locomotive

Au-delà de ces réserves, force est de constater que le Québec reste une des locomotives canadiennes de l’emploi. En un an, le nombre d’emplois a augmenté de 2 %, soit le double du rythme observé d’un océan à l’autre. Encore une fois, seule la Colombie-Britannique fait mieux avec 2,1 %, malgré la perte de 9300 postes le mois dernier.

Depuis un an, l’écrasante majorité des nouveaux emplois au Québec se retrouve dans l’agglomération métropolitaine.

L’érosion récente du travail à temps plein au profit du temps partiel n’est pas un trait distinctif du Québec. À l’échelle canadienne, les quelque 10 700 emplois de plus en novembre camouflent la disparition de 8700 postes à temps plein.

En un an, on compte 183 200 emplois de plus, mais 30 500 de moins à temps plein.

Néanmoins, on observe aussi une certaine amélioration à l’échelle canadienne. Le gain modeste de novembre représente la quatrième hausse d’affilée pour un total de près de 150 000 nouveaux emplois depuis août.

Cela reflète l’augmentation de l’activité économique depuis juin.

La Banque du Canada aura sans doute remarqué avec dépit que la saignée dans le segment de la fabrication s’est poursuivie le mois dernier avec la suppression de 11 900 postes en usines, portant l’hécatombe annuelle à 49 900. L’emploi manufacturier ne représente plus que 9,3 % du total canadien.

Plus intrigante et peut-être aussi encourageante est la catégorie des autres services. Ce segment fourre-tout peut inclure autant les emplois de la cordonnerie du coin que ceux d’une firme dans un créneau naissant. Il compte 38 800 postes de plus depuis un an.

C’est peut-être là qu’éclosent les géants canadiens de demain.

Ce qu’ils en pensent

« Le Québec est à un cheveu près d’afficher le taux de chômage le plus faible au pays, suivi de près par l’Ontario. Du jamais vu en 40 ans de données (et peut-être même depuis que les peaux de castor et le pemmican étaient les principales exportations du Canada). »

— Douglas Porter, BMO Marchés des capitaux

« La qualité des emplois [au Québec] poursuit sa remontée et vient tout juste de rattraper le niveau de l’an dernier : la croissance de l’emploi bien rémunéré et la situation des travailleurs à temps partiel involontaires s’améliorent. La principale faiblesse demeure la croissance des salaires. »

— Mia Homsy, Institut du Québec

« L’augmentation du salaire horaire moyen [canadien] n’est pas très forte avec une croissance de seulement 1,4 % depuis un an. Si l’on y retranche l’inflation, il ne reste plus grand-chose. »

— Benoit P. Durocher, Mouvement Desjardins

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