litige entre vidéotron et une filiale de productions j

Bataille autour d’une facture salée de téléphone

Le fournisseur de téléphonie mobile Vidéotron, propriété du PDG de Québecor Pierre Karl Péladeau, réclame près de 50 000 $ à une entreprise de Julie Snyder pour se faire rembourser des frais d’itinérance particulièrement salés cumulés à l’étranger par… le fils des deux ex-conjoints. 

Selon des documents de cour publics obtenus par La Presse, l’avocate de Julie Snyder dans cette affaire, Me Karine Fahmy, a tenté de faire témoigner M. Péladeau devant la Cour du Québec en septembre dernier en plaidant qu’il s’agissait en réalité d’« un dossier familial camouflé ».  

Le litige n’a, selon elle, rien d’une mésentente commerciale entre Vidéotron et la filiale de Productions J visée par le recours, « dans la mesure où, sur un total de 50 000 $ de facture réclamés, il y a 46 000 $ qui découlent de frais d’itinérance utilisés par le téléphone de la compagnie [de Mme Snyder], mais par le fils de Mme Snyder et M. Péladeau lorsque le fils était en voyage avec M. Péladeau ».  

L’avocate de Mme Snyder allègue que c’est à M. Péladeau d’assumer la facture puisqu’une entente entre les deux ex-conjoints stipule que « les frais engendrés par les enfants doivent être assumés par le parent avec lequel ils se trouvent ». 

Mais l’avocat de Vidéotron, Me Julien Meunier, soutient que ce sont là des « allégations [de Mme Snyder] qui tente de teinter le dossier plutôt que se défendre » du recours de 49 839 $ (sans compter les 19,56 % d’intérêts annuels) intenté en juin 2017 par l’entreprise de télécommunications.

« Ça n’a rien à voir avec un prétendu conflit familial », insiste Me Meunier, réclamant que ce soit plutôt le directeur des enquêtes chez Vidéotron qui soit appelé à témoigner : « Je ne vois pas le lien avec M. Pierre Karl Péladeau, qui est très haut placé dans l’entreprise. C’est une action sur compte dont il est question, il ne faut pas dériver de ce qu’on demande, c’est purement une action sur compte sur des frais d’itinérance d’un téléphone cellulaire », répète-t-il. 

Dans un jugement rendu séance tenante, la juge Sylvie Lachapelle refuse que M. Péladeau soit appelé à témoigner dans l’immédiat, estimant que le litige est d’abord et avant tout un litige touchant deux entreprises commerciales. « Décidons d’abord dans le litige si le montant de la réclamation est le bon montant. Vidéotron n’a pas besoin de savoir quelle est l’entente intervenue entre les parents », tranche-t-elle.  

L’affaire a fait l’objet d’une tentative de règlement à l’amiable quelques mois plus tard, mais sans succès.

Pas question d’annuler la facture

Dans une déclaration envoyée par courriel, Me Meunier a indiqué à La Presse que « Vidéotron trait[ait] tous ses clients de façon équitable » et que « dans un tel cas, il aurait été injustifié et inéquitable » que M. Péladeau fasse tout simplement annuler la facture. « Par ailleurs, étant dans une situation de conflit d’intérêts potentiel, M. Péladeau n’est pas intervenu pour faire annuler cette facture de Productions J », écrit l’avocat. 

Julie Snyder et Productions J ont pour leur part refusé de commenter l’affaire.  

Après un mariage hautement médiatisé à l’été 2015, Pierre Karl Péladeau et Julie Snyder se sont séparés moins de six mois plus tard. Le torchon brûle depuis entre les deux personnalités publiques.  

Mme Snyder a porté plainte au Barreau contre l’ancienne avocate de M. Péladeau, Anne-France Goldwater, qu’elle accuse d’avoir violé le secret de la médiation familiale en dévoilant son implication dans la procédure à une émission de radio du 98,5 FM et dans le magazine spécialisé Droit inc. Me Goldwater devra répondre de cette accusation devant le syndic du Barreau.  

La flamboyante avocate a elle-même intenté un recours de 92 000 $ contre Pierre Karl Péladeau pour honoraires non payés après que leur relation d’affaires se fut terminée. M. Péladeau avait répliqué sur Twitter en accusant Me Goldwater d’« encombrer les tribunaux » et de « faire perdre un temps précieux au système de justice ». Une entente à l’amiable a depuis été conclue dans cette affaire.  

Pierre Karl Péladeau est actuellement devant les tribunaux pour interjeter appel après qu’il eut lui-même plaidé coupable d’infraction à la Loi électorale – il a remboursé de sa poche des dettes de 135 000 $ de sa campagne à la direction du PQ plutôt qu’avec des dons individuels plafonnés à 500 $ –, ce qui pourrait priver Québecor de tout contrat public pendant les cinq prochaines années.

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