Bombardier

En déficit de notoriété, la C Series pourrait changer de nom

Airbus et Bombardier étudient la possibilité de remiser l’appellation « C Series » pour se coller davantage à la puissance marketing du géant européen, a confirmé hier une porte-parole de Bombardier. En revanche, Bombardier assure qu’il est hors de question de déménager une partie de l’assemblage de ces avions au Kansas, comme l’a suggéré hier le Parti québécois.

Bientôt l’« A200 » ?

Selon ce qu’a écrit l’agence Bloomberg hier après-midi, Airbus prévoit rebaptiser les appareils CS100 et CS300 actuels de Bombardier « A210 » et « A230 ». Le changement se ferait dès la conclusion de la transaction qui prévoit une prise de participation de 50,01 % d’Airbus dans le programme. Cette conclusion pourrait survenir en juillet, avant l’ouverture de l’important salon aéronautique de Farnborough.

La nouvelle appellation s’harmoniserait avec celle des autres gammes commerciales d’Airbus : A320, A330, A350, A380, etc.

Ce ne serait pas une première dans l’histoire de l’aviation. En 1997, Boeing avait agi de la même façon quand elle avait acheté McDonnell Douglas, rebaptisant le MD-95 de celle-ci le « 717 ». Elle en a depuis suspendu la construction.

Membre d’une famille

Une porte-parole de Bombardier Aéronautique, Nathalie Siphengphet, a confirmé hier qu’un changement de nom pour la C Series faisait partie des possibilités, bien qu’elle n’ait « pas de détails à donner ».

L’une des craintes des acheteurs éventuels de la C Series depuis le début de sa commercialisation est que l’avion devienne « orphelin », ce qui ferait augmenter ses coûts d’entretien et rendrait sa revente très difficile.

« Nous voulons qu’Airbus puisse faire la promotion de cet avion, il reste à voir comment ils vont l’exécuter », a expliqué Mme Siphengphet.

L’adoption d’un nouveau nom s’harmonisant à la gamme d’Airbus serait « logique pour montrer que ce n’est pas un avion orphelin, qu’il fait partie d’une grande famille », a-t-elle poursuivi.

« Le marketing compte »

Les acheteurs d’avions commerciaux, essentiellement de grands transporteurs aériens ou d’importantes entreprises de financement, peuvent-ils réellement être influencés par un simple changement de nom ?

« C’est une question légitime », convient le professeur Karl Moore, de l’Université McGill. « C’est du marketing, mais le marketing compte. Ce n’est peut-être qu’esthétique, mais c’est important. C’est un signal. Peut-être pas le plus gros, mais c’est un signal que pour Airbus, l’avion fait vraiment partie de la famille, que ce n’est pas juste un essai, qu’il ne sera pas orphelin, que les pièces et le support vont être disponibles. »

Il reconnaît toutefois que le changement pourrait heurter les Québécois, pour qui l’avion est source de fierté.

« Continental, concurrentiel, connecteur »

C’est par ces trois mots que Bombardier avait justifié le choix du nom « C Series » lors de son dévoilement, en juillet 2004. Selon Bloomberg, le nom contenait aussi une référence à Canadair, dont l’acquisition a constitué le coup d’envoi de Bombardier dans le domaine de l’aéronautique. La lettre « C » présentait aussi Bombardier comme une troisième option, après Airbus (A) et Boeing (B).

« Nous voulons nous assurer que notre marque gagne de la visibilité sur cet appareil. »

— Tom Enders, président et chef de la direction d’Airbus, dès le lendemain de l’annonce de l’entente entre Airbus et Bombardier

Marque méconnue

Selon Bombardier, diverses études démontrent que sa marque est méconnue à l’échelle internationale, contrairement à celle d’Airbus et de Boeing. L’entreprise québécoise estime donc que le changement de nom serait bénéfique à la reconnaissance de sa plus récente gamme d’avions.

Selon l’étude Global 500 2018 de la firme Brand Finance, les marques Boeing et Airbus sont les plus connues du secteur « Aérospatiale et défense ». Elles sont respectivement au 64e et au 140e rang mondial, tous secteurs confondus. Bombardier ne fait pas partie des 500 premières marques mondiales.

Déménagement à Wichita : c’est non

Mme Siphengphet a par ailleurs nié « catégoriquement », hier, une possibilité évoquée plus tôt en matinée par le chef du Parti québécois, Jean-François Lisée, lors de la période des questions à l’Assemblée nationale.

Citant des appels reçus de la part d’employés de Bombardier, M. Lisée a affirmé que l’entreprise s’apprêtait à déménager une partie de la production des appareils C Series, plus précisément la finition intérieure, de Mirabel vers son usine de Wichita, au Kansas, là où elle fabrique actuellement les avions d’affaires de la gamme Learjet.

« Ce n’est pas dans nos plans », a fermement nié la porte-parole de Bombardier.

Les difficultés auxquelles fait face Bombardier pour augmenter la cadence de production des appareils C Series « nous force à regarder certaines options », a-t-elle convenu, mais celle de Wichita n’en ferait pas partie, d’autant plus qu’il n’y aurait pas là de capacités suffisantes.

La finition intérieure explique une partie des récents retards, admet-on chez Bombardier, mais ceux-ci étaient attribuables à un fournisseur, Zodiac Aerospace.

« C’est très connu dans l’industrie que Zodiac a eu des problèmes », dit-elle.

Des rumeurs ont fait état d’un manque d’espace consacré à la finition intérieure dans les installations de Bombardier à Mirabel, ce qui aurait accrédité la possibilité d’un transfert à Wichita.

« Je ne pense pas que ce soit une question d’espace, c’est une question de pièces, en temps et en qualité. »

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