À ma manière

Comment j’ai préparé mon entrevue avec Michelle Obama

Chaque semaine, une personnalité du milieu des affaires nous raconte en ses mots une page de son histoire.

Qui ? Sévrine Labelle, PDG de l’organisme Femmessor, qui finance et accompagne des entreprises en démarrage dirigées par des femmes, et intervieweuse de Michelle Obama lors d’un récent événement de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain.

Comment avez-vous décroché un tel poste ?

J’ai été approchée en novembre dernier par Michel Leblanc, président et chef de la direction de la Chambre de commerce. J’ai rapidement dit oui, car c’était Michelle Obama et que j’étais très consciente de la visibilité que pourrait avoir Femmessor, qui a grandement besoin d’être connu. C’était une occasion d’associer un visage à notre organisme. Mon nom devant être approuvé par l’équipe de Michelle Obama, on lui a fait parvenir une bio de mon parcours et de Femmessor. La réponse positive est arrivée le jour de ma fête, le 20 décembre. Cela dit, avec le recul, je me dis que j’ai été inconsciente d’accepter. Je n’avais pas mesuré l’ampleur du défi. L’événement de lundi dernier est le plus gros de la Chambre de commerce. C’est beaucoup de préparation à imbriquer, en plus, à mes fonctions de PDG que j’occupe depuis moins d’un an. Une fois que ce fut publicisé, j’ai ressenti une telle pression, mêlée à beaucoup de reconnaissance.

Sans avoir été intervieweuse de métier, comment vous êtes-vous préparée pour y arriver devant une personnalité connue mondialement et 10 200 spectateurs ?

Dès les Fêtes, j’ai visionné des vidéos, car j’avais une première rencontre avec la Chambre de commerce au tout début de janvier. On connaît tous Mme Obama, mais il faut fouiller ! Ce fut beaucoup de recherche et de lecture. J’ai dû consacrer une heure par jour à ma préparation dès décembre. J’ai travaillé avec l’équipe de contenu de la Chambre de commerce. J’ai aussi parlé à des gens qui s’intéressent à l’actualité américaine. J’ai demandé conseil à Sophie Brochu (Énergir) et Caroline Codsi (La Gouvernance au féminin), qui avaient interviewé dans des contextes similaires Barack Obama et Hillary Clinton. Et j’ai engagé une coach en art oratoire pour ne pas manquer mon coup ! L’anglais n’est pas ma langue maternelle. Je voulais m’assurer de bien prononcer, me faire aider pour les transitions, avoir la bonne posture et le bon débit.

Même si j’avais eu à rencontrer Michelle Obama dans mon salon, je me serais autant préparée pour pouvoir profiter au maximum de sa vision du monde et réfléchir avec elle sur des enjeux tels la persévérance scolaire et le développement de la confiance des femmes. Au milieu de l’entrevue, il y a eu un détachement et j’étais bien. J’aurais pu délaisser mes cartons, mais je ne savais pas comment j’allais réagir au stress. C’était une bouée.

Que vouliez-vous absolument lui demander ?

Mme Obama souhaitait rester dans les thématiques qui la touchent de près. On en a donc établi trois ou quatre au départ. À cela allaient s’ajouter des questions sur son expérience à la Maison-Blanche, car je trouvais que ça mettrait la table aux autres discussions. Elle a elle-même posé de grands gestes en tant que première dame.

D’où est venue l’idée des questions plus légères au milieu de l’entrevue ?

De la Chambre de commerce, dans l’optique de rythmer la discussion et de me donner l’occasion d’aller cueillir des informations plus personnelles. Et pour détendre l’atmosphère. On sait que Michelle Obama aime s’amuser. Ce n’était pas risqué comme jeu.

Quels conseils donner à un membre de la communauté d’affaires qui voudrait interviewer une telle personnalité dans les mêmes circonstances ?

La clé, c’est la préparation. Tant sur les plans du contenu, de la livraison que physique et mental. Je performe bien lorsque je me prépare. Je n’aime pas l’improvisation. Je me suis réservé 30 minutes de yoga quotidiennement et j’ai été rigoureuse. Mes épisodes d’insomnie se sont donc dissipés. Par ailleurs, les avis divergent, mais je trouvais important de bien choisir ce que j’allais porter, car pour Michelle Obama, la mode est un statement. Je devais porter la création d’une femme designer entrepreneure d’ici (Julie Pesant, d’Éditions de Robes) pour faire rayonner ses créations.

Referiez-vous une telle entrevue ?

Pas nécessairement ! Je n’en ressens pas le besoin. Ce fut une très belle expérience, mais ce n’est pas mon métier, c’est beaucoup de temps, d’énergie et de stress. J’admire le métier d’animateur et de journaliste, mais la gestion me passionne. Je suis une fille de terrain. Présentement, Femmessor veut augmenter l’impact sur le succès des entrepreneures. Leur offrir un accompagnement plus adéquat. Mon travail de PDG m’occupe plus qu’à temps plein.

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