Soccer  L’Impact

À Montréal… peut-être pas pour longtemps

Le nouvel entraîneur-chef de l’Impact, Wilmer Cabrera, ferait bien de ne pas embaucher un professeur de français trop vite.

S’il ne sauve pas l’organisation montréalaise du naufrage, avec neuf matchs à disputer, il ne sera probablement plus à Montréal à l’automne.

Le président de l’équipe, Kevin Gilmore, n’a d’ailleurs pas voulu garantir le retour de Cabrera au-delà de cette saison, même s’il ne lui appose pas l’étiquette d’entraîneur intérimaire. « Wilmer est l’entraîneur de l’Impact de Montréal en ce moment, s’est-il contenté de dire hier midi, lors d’un point de presse au Centre Nutrilait. Nous sommes tous intérimaires… »

Congédié par le Dynamo de Houston il y a neuf jours à peine, Cabrera connaît la précarité de son emploi actuel. « Aucun entraîneur au monde ne connaît la date de sa dernière journée en poste », a-t-il lancé avec lucidité.

« On m’a demandé si je voulais venir aider l’équipe, j’ai dit oui. Ensuite, on verra. »

— Wilmer Cabrera, nouvel entraîneur-chef de l’Impact de Montréal

« Vous aviez un entraîneur attaché au club et on l’a congédié. J’étais attaché au Dynamo et on m’a congédié. Ma présence ici montre que je prends des risques. Je veux que mes joueurs prennent des risques. »

Changement nécessaire

Accueilli en grande pompe en novembre 2017, Rémi Garde, ancien entraîneur-chef de l’Olympique lyonnais, n’aura pas duré deux ans. Il a présenté une fiche de 24-29-8 et vivait sous la menace d’une deuxième exclusion d’affilée des séries éliminatoires.

« Le dernier mois et demi a été difficile, a rappelé Kevin Gilmore. La performance du club a été inacceptable, avec quatre points sur une possibilité de vingt-quatre dans les matchs de la MLS. »

« On avait deux choix : rester sur la ligne de touche et espérer que les choses changent, ou agir. Pour le bien du club, on a décidé d’agir. Ça faisait un mois et demi qu’on attendait des changements qui ne sont pas venus. »

— Kevin Gilmore, président de l’Impact

Il s’agit néanmoins du sixième entraîneur-chef de l’équipe depuis l’entrée de l’Impact en MLS lors de la saison 2012.

Le prédécesseur de Garde, Mauro Biello, a été en poste le plus longtemps parmi ceux-ci, pour 93 matchs, contre 83 dans le cas de Frank Klopas. L’ancienne gloire de l’équipe est aussi le seul à avoir permis à l’équipe d’atteindre la demi-finale d’association, en 2016.

Stabilité, priorité absolue

Dans un monde idéal, Kevin Gilmore dit préférer la stabilité. Il en fait une priorité pour les prochaines années, même si sa décision de cette semaine va à l’encontre de ce principe. Pour appuyer encore plus sa volonté de changement, il s’est même permis une déclaration étonnante en réponse à une question du confrère Arcadio Marcuzzi.

« Ce qui me frappe, ce qui manque, c’est une identité. L’identité de ce club a toujours été marquée par le joueur du jour, l’entraîneur du jour. » — Kevin Gilmore

« On change le système, on change l’identité, mais on n’a jamais pris le temps de définir ce qu’on est comme club, a-t-il lancé. Ça sera la priorité absolue du [prochain] directeur technique. On ne peut pas se fier à l’entraîneur pour définir notre club. Il faut le faire avant. »

Gilmore promet d’embaucher cet homme d’ici la fin de l’année. « Trouver la bonne personne, ça prend du temps. Il y a plusieurs cases à cocher : [parle] anglais, français, italien, connaît la MLS, connaît les ligues européennes, a de l’expérience comme directeur technique. Est-ce que ça prend plus de temps qu’on pensait ? On savait que ça prendrait du temps. »

Vu l’urgence de la situation, la direction de l’équipe a procédé à l’envers. Cabrera tentera de stopper l’hémorragie, le prochain directeur technique décidera s’il le maintient ou non en poste, selon ses résultats.

« Quand j’ai rencontré les joueurs, on s’est donné des objectifs clairs, a ajouté Gilmore. Il reste neuf matchs, on veut participer aux séries et remporter le Championnat canadien. Ce sont des objectifs précis et très réalistes. »

L’ombre du propriétaire

Le président a répété à plusieurs reprises qu’il s’agissait de SA décision de congédier Rémi Garde. Comme s’il voulait absolument convaincre les sceptiques que l’ombre du propriétaire Joey Saputo ne planait plus sur l’équipe.

« La décision a été prise par moi. Mon rôle est clair et précis. Je gère ce club et je dois prendre les décisions dans son intérêt supérieur. J’ai eu l’approbation du propriétaire. »

« Ça m’est entré en tête après le match de samedi [nulle de 3-3 à domicile après avoir mené 3-0]. J’y ai pensé toute la journée dimanche. » — Kevin Gilmore

« Je suis parti pour l’Europe dimanche soir. J’y ai pensé pendant sept heures sur le vol. J’ai fait des appels lundi entre mes réunions, avec le propriétaire, évidemment, et d’autres gens que je voulais consulter. J’y ai pensé pendant les sept heures de vol à mon retour d’Europe. »

Kevin Gilmore a rencontré Wilmer Cabrera mardi soir à son retour d’Europe. « Je l’ai appelé lundi. Il a pris l’avion mardi matin pour Montréal. J’ai pris ma décision après notre rencontre. »

Le président de l’Impact dit n’avoir rencontré aucun autre candidat. « On a regardé qui était disponible et qui avait de l’expérience comme entraîneur-chef dans la MLS. Il n’y en avait pas beaucoup. »

Cabrera sera épaulé par Wilfried Nancy, un « survivant » des ères Biello et Garde, et par l’ancien capitaine Patrice Bernier, entraîneur auprès des équipes de l’Académie de l’Impact depuis sa retraite.

« Le départ de Rémi [Garde], de Robert Duverne et de Joël Bats laisse un vide, a expliqué Gilmore. Patrice amène de l’expérience, une bonne connaissance des joueurs et beaucoup de respect. C’est un élément clé de notre identité. »

Et maintenant ?

Wilmer Cabrera, 51 ans, entraîneur à Houston de 2016 à 2019, ancien défenseur de l’équipe nationale de la Colombie, avec laquelle il a participé aux Coupes du monde de 1990 et de 1998, n’entend pas imposer un nouveau système de jeu.

« Surtout avec neuf matchs sur une courte période, a-t-il dit. On n’implantera pas de grands changements. Mais l’équipe a beaucoup souffert sur les phases de jeu arrêtées et il semble qu’aujourd’hui [hier], on a pratiqué ça pour la première fois. C’est un ajustement important.

« Il faut peaufiner les petits détails. Nous sommes des outils pour les joueurs. Si nous sommes de bons outils, ils nous utiliseront. S’ils ne nous utilisent pas, les joueurs prendront d’autres outils. C’est le sort réservé aux entraîneurs. S’ils ont du succès, peut-être que je pourrais vous parler français ici pour très longtemps… »

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