Hockey Entrevue avec Bob Hartley

« On ne peut jamais passer à côté d’une occasion de gagner »

Bob Hartley n’a cure des prédictions des analystes.

« Certains experts ne nous voyaient même pas dans la Ligue nationale, l’an dernier, lance l’entraîneur des Flames au téléphone de son bureau. On devait être dans la course pour la loterie de Connor McDavid. J’avais dit à nos gars de ne pas écouter ce qui se disait à l’extérieur, de croire en nous. Un an plus tard, on nous lance des fleurs. On nous place en séries, on parle de notre défense comme de la meilleure, mais je répète le même message aux gars : ne pas écouter les attentes de l’extérieur… »

Que de chemin parcouru en un an ! Les Flames ont amassé 97 points et remporté une ronde en séries éliminatoires.

Hartley, qui dirigeait un club en Suisse il y a quelques années à peine, a été auréolé du titre de meilleur entraîneur de la Ligue nationale. Johnny Gaudreau et Sean Monahan sont devenus de jeunes vedettes. Le capitaine Mark Giordano a empoché 40 millions de plus. L’excellent défenseur Dougie Hamilton a été arraché aux Bruins pour un choix de première ronde et deux choix de deuxième.

Les Flames, désormais, constituent une équipe à battre. Auront-ils les outils pour répondre aux attentes ? Ont-ils progressé trop rapidement, comme semble l’avoir fait l’Avalanche du Colorado, exclu des séries l’an dernier après une saison de rêve ?

« Je vois très bien le cœur de la question, répond Hartley. On est sortis un peu de nulle part, et ça se comprend. Je n’ai aucun problème avec ça. On ne peut jamais passer à côté d’une occasion de gagner. Les propriétaires nous emploient pour cette raison, nos partisans achètent des abonnements et les entreprises se procurent des loges pour appuyer un club gagnant. »

« Avant chaque début de saison, je vise une place en séries pour nous donner une chance de gagner la Coupe Stanley. Le jour où je n’aurai pas cette soif de gagner, il sera peut-être temps de rentrer chez moi. »

— Bob Hartley

Hartley a reçu deux beaux cadeaux, cet été : Hamilton, évidemment, 22 ans, 42 points l’an dernier à Boston, et l’attaquant Michael Frolik, 27 ans, 19 buts l’hiver dernier, excellent en défense. Si Frolik comble un vide à l’aile droite, l’arrivée de Hamilton amputera du temps de jeu aux défenseurs réguliers du club. T.J. Brodie, Mark Giordano, Dennis Wideman et Kris Russell jouaient tous en moyenne 24 minutes et plus l’an dernier.

« C’est un heureux problème, dit Hartley. Nos trois ou quatre meilleurs défenseurs jouaient beaucoup l’an dernier. Ils vont tirer profit de son arrivée : notre style de jeu permet à nos défenseurs de jouer de façon agressive et de se porter à l’attaque, mais il demande aussi beaucoup d’énergie. Le temps d’utilisation sera mieux distribué. Hamilton amène de la vitesse, de la jeunesse et du talent. »

Hartley a participé aux négociations pour obtenir Hamilton. « J’étais avec Brad [Treliving, DG des Flames] pendant tout le processus. J’ai assisté à beaucoup de processus d’échange, mais celui-ci était intense. Les deux directeurs généraux se parlaient sans cesse pendant les journées qui ont précédé le repêchage. Je ne m’attendais pas à ce qu’il soit disponible, mais avec le plafond salarial, ce type de situation se produit de plus en plus souvent. Un peu comme Brandon Saad à Chicago. »

Malgré sa petite taille et son inexpérience, Johnny Gaudreau, 22 ans, a eu un impact énorme l’an dernier avec 64 points, dont 24 buts, au deuxième rang des compteurs de son équipe. Hartley ne craint pas la guigne de la deuxième année, pas plus qu’il ne la craignait avec Monahan, qui a compté 31 buts l’an dernier après une première saison spectaculaire, l’année précédente.

« On va fonctionner comme avec Sean Monahan, répond le coach. Johnny est venu à mon école de hockey cet été. C’est un super bon kid. Il aime se retrouver à l’aréna, il aime jouer, il aime pratiquer, alors c’est plus facile. »

« Je n’ai jamais hésité à utiliser les jeunes, surtout s’ils le méritent. Je ne regarde pas l’âge. Johnny Gaudreau, son rôle va continuer à grandir, il aime jouer dans les situations critiques. »

— Bob Hartley

Un autre bon jeune devrait se greffer au groupe cette saison, Sam Bennett, 19 ans, quatrième choix au total en 2014. Blessé sérieusement à l’épaule, ce jeune centre de 6 pieds 1 pouce et 180 livres a finalement fait un retour au jeu à temps pour les séries éliminatoires. Il a obtenu 4 points en 11 matchs et joué en moyenne 14 minutes.

« Vers la fin de sa réadaptation, il venait cogner à notre porte chaque matin pour revenir au jeu. Il était très persistant et passait par le directeur général, par moi et même par le médecin pour devancer son retour. Il me demandait de participer au réchauffement, mais je lui répondais qu’il était encore sur la liste des blessés et que c’était impossible. Il ne comprenait pas vraiment les règlements ou ne voulait pas les comprendre, et il nous demandait même de tenter de faire changer les règlements tellement il voulait jouer ! »

Hartley aime la fougue de Bennett. « Quand j’ai demandé la première fois à Sean Monahan s’il le connaissait, il m’a vite coupé la parole pour me dire que Bennett lui avait donné un double échec dans le cou pendant un match dans les rangs juniors ! C’est un joueur intense et combatif. Il formera une belle combinaison au centre avec Monahan parce qu’ils sont complètement différents. Monahan est terre à terre et on ne l’entend pas beaucoup. Sam, c’est de la dynamite, il déplace de l’air. Il joue de façon plus robuste. C’est un agitateur, d’une certaine manière, ce qui est plutôt rare pour un joueur de centre en raison de toutes leurs responsabilités. On a vu en séries qu’il était solide et qu’il pourrait avoir une chance de jouer et de montrer utile. Il a goûté aux séries de la LNH. Il n’aurait pas pu avoir une meilleure séance d’apprentissage. »

Avec l’arrivée de Connor McDavid à Edmonton, doublé d’un changement d’administration chez les Oilers et l’éclosion des Flames, on peut enfin rêver au retour de la rivalité de l’Alberta.

« J’en suis vraiment heureux. Certains médias m’avaient posé la question à mon entrée en poste, mais je leur avais répondu qu’il n’y aurait pas de rivalité tant que nous n’aurions pas deux clubs de séries en Alberta. Je comprends comment les amateurs de hockey de l’Alberta vivent cette rivalité, un peu comme quand j’ai vécu la rivalité Canadien-Nordiques comme amateur étant jeune. C’est de bon augure. Les amateurs vont en sortir gagnants. Ça va être bon pour toute la province. »

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