CONGESTION ROUTIÈRE
25 millions de sièges vides à combler

Pour bien comprendre d’où vient ce chiffre et ce qu’il signifie, prenons l’exemple de Montréal. Les grandes enquêtes origine-destination réalisées tous les cinq ans nous permettent d’évaluer avec précision le nombre de déplacements effectués selon chaque mode de transport, et donc, le nombre de voitures sur nos routes et le nombre de sièges vides et occupés de ces voitures. Pour le Grand Montréal, on parle de 14,8 millions de sièges vides chaque jour et de 3,7 millions seulement durant la pointe du matin. En moyenne, nos voitures se déplacent avec seulement 1,2 personne à bord durant la pointe matinale.

Au vu des problèmes endémiques de congestion que vivent les automobilistes du Grand Montréal, de Québec, mais aussi de Trois-Rivières, de Sherbrooke ou de Gatineau, on pourrait être porté à croire qu’il existe au Québec un problème de capacité routière pour lequel la solution passe par des élargissements et des prolongements d’autoroutes.

En réalité, nous n’avons pas un problème de capacité, mais plutôt un problème d’optimisation et de répartition. Pour fluidifier nos routes, nous devons optimiser leur usage et celui de notre parc automobile. Nous devons donc remplir des sièges.

Il est évident que les 25 millions de sièges ne peuvent être comblés du jour au lendemain, mais il existe toutefois plusieurs mesures qui peuvent être mises en place pour favoriser l’adoption du covoiturage quotidien par nombre de Québécois.

En reprenant l’exemple du Grand Montréal, en passant d’un taux d’occupation de 1,2 actuellement à 1,4 en pointe matinale, le nombre de véhicules déplacés sur les routes diminuerait de 14 %, soit environ 180 000 voitures de moins pour cette période seulement. Un impact majeur qui pourrait être atteint en quelques années à peine !

L’arrivée des applications mobiles et des plateformes de géolocalisation, et les changements culturels qui s’effectuent à grande vitesse à l’heure de l’économie collaborative ouvrent de nouvelles occasions pour développer le covoiturage. Encore faut-il créer les conditions réglementaires et les incitatifs financiers qui permettront à cette pratique bénéfique pour l’environnement, l’économie et la société de prendre son envol.

Comment s’y prendre alors ? On doit mettre en place des règles et des incitatifs qui permettent aux covoitureurs d’y trouver leur compte.

Tout d’abord, on pourrait offrir aux covoitureurs les meilleures places sur les lieux d’emploi et aux pôles de transports collectifs ainsi qu’un rabais significatif ou même la gratuité sur leur tarif de stationnement.

On pourrait également développer le réseau de voies réservées autorisées aux covoitureurs afin de leur permettre d’éviter une partie de la congestion et ainsi réduire leur temps de parcours. Finalement, en assouplissant la réglementation, on pourrait offrir des compensations financières plus élevées tout en s’assurant de ne pas faire une compétition déloyale aux services de taxi.

Pour aller plus loin encore, on pourrait même imaginer une intégration centralisée de l’offre de covoiturage au sein des applications de transports collectifs comme cela se fait actuellement dans la région parisienne, et même d’une intégration tarifaire grâce à des cartes de transport multimodales.

À l’heure de la nouvelle mobilité et de l’économie collaborative, il est temps de cesser d’investir des milliards dans des infrastructures routières qui transportent des voitures vides et plutôt investir dans l’optimisation de notre réseau et de notre parc automobile. Déplacer plus de gens, dans moins de voitures, à moindre coût. Voilà le défi que nous devons relever.

* Cosignataires : Marine Imbert, présidente et cofondatrice de OuiHop’ au Canada ; Marc-Antoine Ducas, président et fondateur de Netlift ; et Pier-Olivier Girard, président et cofondateur de Covoiturage.ca