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La Ville peaufine sa stratégie pour 2026

Sans tambour ni trompette, Montréal peaufine depuis deux ans sa stratégie pour attirer la Coupe du monde de soccer en 2026. Pour démontrer sa capacité à accueillir des événements d’envergure, l’administration Coderre compte augmenter du quart le nombre de compétitions sportives organisées chaque année dans la métropole. Portrait des efforts de la Ville pour mettre du muscle derrière ses ambitions.

Objectif 2026

La Ville a récemment adopté une « Stratégie montréalaise en matière d’événements sportifs » avec le but avoué d’attirer la Coupe du monde de soccer. La métropole se fixe comme objectif d’attirer d’ici 25 ans un « méga-événement », citant en exemple le principal tournoi de soccer du monde. Le document de 20 pages souligne que le dernier événement sportif d’envergure présenté à Montréal, soit les Jeux d’été, a eu lieu il y a 40 ans. Or, le maire est fermé à l’idée d’accueillir le cirque olympique. « Montréal n’embarquera pas dans les Olympiques : on a déjà donné, on est une ville olympique », avait déclaré Denis Coderre en avril dernier. L’horizon est fixé sur 25 ans, mais le document cible clairement 2026 comme moment clé.

Miser sur le tourisme sportif

L’idée derrière cette stratégie est de multiplier les retombées pour la métropole. « Le tourisme sportif connaît une forte croissance dans le monde, pas juste au Canada », expose Jim Beis, élu responsable des sports à la Ville de Montréal. Plusieurs villes misent en effet sur les compétitions de haut niveau pour se démarquer sur la scène internationale. Les événements sportifs ne représentent pas une recette miracle, prévient toutefois un spécialiste international, Simon Shibli, de l’Université de Sheffield, au Royaume-Uni. Celui qui dirige une chaire de recherche sur l’industrie sportive reconnaît que la multiplication des compétitions peut contribuer à faire rayonner une ville à l’échelle mondiale et entraîner d’importantes retombées, mais tient à préciser qu’un événement d’envergure peut avoir l’effet contraire à court terme. Sydney, en Australie, l’a vécu en 2000 alors que les Jeux olympiques avaient entraîné une baisse du tourisme.

Davantage de compétitions

La stratégie montréalaise pour attirer la Coupe du monde repose essentiellement sur une multiplication des compétitions sportives. La Ville se fixe ainsi comme objectif d’augmenter du quart le nombre d’événements tenus chaque année à Montréal. La métropole, qui est l’hôte de 68 événements en moyenne annuellement, voudrait en accueillir 84. « Il faut des événements de base pour aller chercher d’autres grands événements. Avant d’avoir un événement d’envergure, ça prend un événement national », illustre Jim Beis. L’arrivée de la Formule E, petite sœur électrique de la Formule 1, s’inscrit dans cette stratégie. « La Formule 1 est déjà établie : ça fait des années qu’on l’organise, on connaît sa popularité, ses retombées. La Formule E, c’est une autre occasion de mettre la ville sur la scène mondiale. On démontre aux autres organismes qu’on est capable d’organiser ce type d’événement », dit l’élu responsable des sports.

Un nouvel amphithéâtre envisagé

Montréal a beau compter de nombreuses installations sportives, la Ville juge qu’il lui manque un amphithéâtre d’une capacité d’accueil de 5000 à 20 000 spectateurs pour tenir certaines compétitions. La stratégie montréalaise indique ainsi que « la construction d’une installation sportive pouvant accueillir entre 5000 et 20 000 personnes ouvrirait un nouveau créneau potentiel d’affaires ». Interrogé à ce sujet, Jim Beis s’est toutefois fait avare de commentaires, indiquant que le projet serait évalué lorsque les besoins se feront sentir. « On a assez d’arénas, on a Claude-Robillard, mais on est limite avec les installations qu’on a pour attirer certains événements d’envergure », dit-il.

Financement augmenté

Pour attirer davantage d’événements, Montréal a décidé d’augmenter ses investissements dans son programme de soutien mis sur pied en 2012 et qui a financé 227 compétitions jusqu’à présent. Le budget de 250 000 $ par an sera ainsi doublé en 2017. Montréal note que le nombre de compétitions a augmenté de façon régulière depuis 2012, mais cette hausse est principalement attribuable aux événements de niveau métropolitain et peu aux compétitions nationales et internationales. Pour pallier cela, les critères ont été revus afin de faciliter la vie aux promoteurs. Ainsi, Montréal s’engage désormais à soutenir financièrement les démarches de candidature, dont les coûts représentent parfois une importante barrière. La métropole a également assoupli les critères pour financer les sports adaptés, émergents et ceux attirant de moins grosses foules.

Montréal encore loin du top 10

Montréal aspire à devenir la principale ville sportive du Canada et à se classer dans le top 10 mondial. Mais beaucoup de chemin reste à faire puisque la métropole québécoise n’apparaît pas même au top 30. Depuis 10 ans, le groupe SportBusiness analyse les meilleures destinations dans le monde pour organiser les événements sportifs et seulement deux villes canadiennes se démarquent actuellement : Calgary et Vancouver, respectivement en 6e et en 16e place. New York s’est classée première cette année en raison du nombre élevé d’événements se tenant dans la Grosse Pomme. Le groupe note que malgré son échec à obtenir les Jeux olympiques d’été de 2012, la ville a maintenu ses efforts pour séduire l’élite sportive.

L’exemple de Melbourne

Pour devenir une ville sportive, le spécialiste de l’industrie du sport Simon Shibli invite Montréal à s’inspirer de Melbourne, en Australie. La ville qui a accueilli les Jeux d’été de 1956 a su bâtir sur cet héritage pour devenir un arrêt incontournable pour les athlètes d’élite et tous les amateurs de sport. La ville, qui se présente comme la « capitale mondiale du sport », a accueilli les Jeux du Commonwealth en 2006 et la Coupe du monde de cricket en 2015. « Vous avez le premier événement du Grand Chelem [l’Australia Open], le début de la saison de la Formule 1, tous les événements de cricket, la Ligue de rugby, la Coupe de Melbourne, célèbre course hippique, et plusieurs compétitions d’aviron. C’est vraiment l’endroit rêvé pour les amateurs de sport », dit Simon Shibli.

Attention aux faux pas

Simon Shibli prévient qu’organiser des événements d’envergure peut être une arme à double tranchant pour les villes. « Ce que les villes veulent, c’est utiliser les événements comme une plateforme pour présenter une image au monde, et dire : “Venez à Montréal faire des affaires.” Si le message ne sort pas bien, ça peut avoir un impact négatif », souligne-t-il. Ainsi, mieux vaut attirer des événements pour lesquels la ville (ou le pays) hôte est performante, sans quoi les foules risquent de ne pas être au rendez-vous. Il donne l’exemple du Qatar qui a attiré plusieurs événements, mais où les foules sont décevantes.

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