17e Soirée des Jutra

Mommy sans partage. Ou presque…

Comme il fallait s’y attendre, Mommy est sorti grand vainqueur de la 17e Soirée des Jutra, recevant des trophées dans huit des dix catégories dans lesquelles il était sélectionné. À ces prix s’ajoutent le Billet d’or, remis au film le plus populaire de l’année, ainsi que le Jutra du film s’étant le plus illustré à l’extérieur du Québec.

À titre individuel, Xavier Dolan a pu inscrire son nom sur quatre des huit trophées : meilleur film (il est coproducteur), meilleure réalisation, meilleur scénario et meilleur montage. Les trois acteurs principaux du film ont tous été récompensés, de même qu’André Turpin. Fait peu banal, l’as directeur photo, qui était aussi en nomination grâce à son travail sur Tom à la ferme, a reçu hier le cinquième Jutra de sa carrière dans cette catégorie. Il a profité de la tribune pour souligner les initiatives destinées aux jeunes cinéphiles, notamment le Prix collégial du cinéma québécois.

REMERCIEMENTS ÉMUS

Évidemment, l’équipe de Mommy était en joie. En montant sur la scène du Monument-National pour recevoir son Jutra du meilleur scénario, Xavier Dolan, ému, a d’abord tenu à saluer ses parents. Son père d’abord, « un artiste à part entière que j’admire depuis toujours », ainsi que sa mère, « qui est ma source d’inspiration unique », à qui il a dédié son prix. En allant chercher le Jutra de la meilleure réalisation, il a cette fois rendu hommage à sa productrice, Nancy Grant, ainsi qu’à ses actrices. 

« Vous avez eu l’élégance de donner vie à des personnages. » — Xavier Dolan

À la toute fin du gala, il a aussi salué la diversité du cinéma québécois et dénoncé du même coup un certain discours ambiant. « Qu’est-ce qui vaut la peine d’être dit, qu’est-ce qu’il faut avoir l’élégance, l’intelligence de dire ou de taire ? », a-t-il demandé.

Anne Dorval, sacrée meilleure actrice, était visiblement bouleversée au moment de livrer un superbe message de remerciement. « Je salue toutes les mères du monde, en particulier la mienne, le modèle le plus inspirant que j’aie connu, a-t-elle notamment déclaré. Xavier, merci d’avoir cogné à ma porte il y a 10 ans et de m’avoir amenée vers les étoiles petit à petit. »

Antoine Olivier Pilon, lauréat du Jutra du meilleur acteur, a rendu hommage à tous ceux qui ont fait preuve de gentillesse à son égard. « Des gens qui m’ont donné le goût de continuer à faire ce métier. »

Dans les catégories de soutien, on a aussi fait honneur à la famille Dolan. Suzanne Clément a évidemment été consacrée chez les interprètes féminines, et Pierre-Yves Cardinal s’est distingué grâce à sa composition dans Tom à la ferme. C’est d’ailleurs le seul trophée qu’aura obtenu l’autre film de Xavier Dolan, en lice dans huit catégories.

« Merci pour toi, d’être ce que tu es, a déclaré Suzanne Clément en s’adressant au cinéaste. Merci d’être autant joyeux, fou, précis, échevelé, de faire en sorte que tout soit permis. »

QUATRE FILMS PRIMÉS

Une razzia du genre ne laisse cependant pas beaucoup de place aux autres candidats. Tu dors Nicole, sélectionné dans neuf catégories, est reparti avec deux trophées Jutra. Le très beau film de Stéphane Lafleur a en effet été inscrit au tableau d’honneur dans les catégories du meilleur son et de la meilleure musique originale (Rémy Nadeau-Aubin et Organ Mood – Christophe Lamarche-Ledoux). 1987, cité dans huit catégories, a été préféré trois fois : direction artistique (Patrick Vermette), costumes (Valérie Lévesque) et coiffure (Daniel Jacob).

Seul autre film ayant réussi à se faufiler dans ce palmarès sans partage (ou presque), Henri Henri s’en est bien tiré dans la catégorie du meilleur maquillage (Lizanne Lasalle).

À l’arrivée, seulement quatre productions ont été plébiscitées par les votants dans les catégories réservées aux longs métrages de fiction.

Le Jutra du meilleur documentaire a par ailleurs été attribué au film de Serge Giguère Le mystère MacPherson, dans une catégorie où figuraient quelques solides candidats (La marche à suivre de Jean-François Caissy, notamment). Le prix du meilleur court ou moyen métrage est allé à Toutes des connes, une réalisation de François Jaros, et celui du meilleur court ou moyen métrage d’animation a été remis à Jutra, un film de Marie-Josée St-Pierre dans lequel on évoque le souvenir du cinéaste à qui l’on doit le nom du trophée.

Rappelons que les résultats dans ces trois dernières catégories sont déterminés par un jury. Pour les autres, il s’agit d’un scrutin général parmi les membres des différentes associations professionnelles qui composent l’industrie.

UN BEL HOMMAGE

La soirée, animée par Pénélope McQuade et Stéphane Bellavance, a notamment été marquée par un hommage très émouvant au cinéaste – et aussi acteur – André Melançon. « On m’a dit : tu vas parler d’André, a lancé Marcel Sabourin. J’ai dit parfait ! Donnez-moi cinq heures ! »

Adressant un message aux cinéastes québécois contemporains, le lauréat du Jutra-Hommage a déclaré : « Étonnez-nous, questionnez-nous, bousculez-nous. Faites-nous penser, c’est important. Faites-nous rêver, c’est essentiel. »

Ce texte provenant de La Presse+ est une copie en format web. Consultez-le gratuitement en version interactive dans l’application La Presse+.