Montréal

Perquisition de l'UPAC chez un consultant informatique 

L’Unité permanente anticorruption (UPAC) a mené une perquisition hier dans un bureau de consultants informatiques montréalais qui a reçu plus de 11 millions en contrats du ministère de la Justice depuis six ans. Les enquêteurs qui ont investi les locaux de la firme Dartech, près du Centre Bell, cherchaient des preuves de malversations criminelles en lien avec certains contrats publics accordés à l’entreprise au fil des ans.

— Vincent Larouche, La Presse

Chronique

Les Papous du Québec

Je ne sais pas pour vous, mais moi, je suis tannée de voir des journalistes canadiens se pencher sur le Québec comme des anthropologues qui découvrent les Papous de la Nouvelle-Guinée et qui dissèquent leurs mœurs et coutumes en poussant des oh ! et des ah ! horrifiés.

Andrew Potter, qui a accouché d’une chronique truffée d’invraisemblances sur le Québec, s’est excusé plus vite que son ombre. Fort bien, mais il n’en pense pas moins ce qu’il a écrit. Potter n’est pas un troll qui se défoule sur son clavier dans le fin fond de son sous-sol, mais le directeur de l’Institut d’études canadiennes de l’Université McGill et l’ex-rédacteur en chef du respecté Ottawa Citizen. Ottawa, une ville collée sur le Québec. Pas le Kamloops Citizen.

Potter a écrit des énormités qui ont été publiées dans le magazine Maclean’s, qui n’en est pas à sa première charge contre le Québec. La tempête de neige et les 300 autos bloquées sur l’autoroute 13, a-t-il écrit, ont révélé le caractère profond de la société québécoise, qui est pathologiquement aliénée et dépourvue de solidarité. Un portrait noir, absurde et sans fondement.

Potter donne des exemples farfelus : des guichets automatiques qui crachent des 50 $, des restaurants qui proposent de payer sous la table, et j’en passe.

Au début, j’ai ri. C’était tellement gros, tellement décalé. J’ai appelé Josh Freed, le Foglia de la Gazette, auteur de l’Anglo Guide to Survival in Quebec, pour lui demander ce qu’il en pensait.

« Je croyais que c’était une satire », m’a-t-il dit.

Puis, il s’est rendu compte que Potter était sérieux. Freed démolit la chronique.

« La tempête a, au contraire, montré la solidarité profonde des Québécois. On était comme une famille. »

Quant à l’argument de Potter qui affirme que les Québécois n’ont pas autant d’amis que le reste du Canada, Josh Freed proteste.

« Les Québécois développent de très grands liens avec leur famille, contrairement aux Canadiens, qui sont souvent éparpillés à travers le pays. Personne ne s’est reconnu dans le portrait de Potter. La plupart des anglophones étaient stupéfiés. »

— Josh Freed, chroniqueur au journal The Gazette

Les chefs des partis politiques aussi. Libéraux, péquistes et caquistes ont condamné le brûlot de Potter. François Legault l’a même qualifié de torchon.

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Et l’Université McGill, dans tout ça ? Potter est le directeur de son Institut d’études canadiennes et, jusqu’à preuve du contraire, le Québec fait partie du Canada. Quelle crédibilité Potter a-t-il pour « étudier » le Québec, alors qu’il vient d’étaler ses préjugés à coups de phrases méprisantes truffées d’erreurs ?

McGill a noté ma question. J’attends la réponse. L’université de réputation internationale a protesté du bout des lèvres. Mardi, en pleine tourmente, elle a accouché de deux tweets, un en anglais et un en français, pour dire qu’elle n’approuvait pas les propos de Potter.

Pas l’ombre d’une excuse pour ce dérapage inacceptable du directeur de son Institut qui essuie cavalièrement ses pieds sur le Québec.

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Après Jan Wong du Globe and Mail qui a fait un lien aberrant entre les tueries et les immigrants qui seraient mal reçus au Québec, après le Maclean’s qui a fait sa une avec le Bonhomme Carnaval en affirmant que le Québec était la province la plus corrompue du Canada, Potter a ajouté sa pierre à l’édifice des préjugés.

Oui, le Québec est différent et oui, il se fait moins de bénévolat ici que dans le reste du Canada, l’éternel argument brandi par ceux qui voudraient nous faire passer pour une province d’arriérés et de racistes.

Est-ce cette différence qui ne passe pas ? Le Québec a été conquis par l’Angleterre en 1760. Ce traumatisme a marqué la société, qui s’est repliée sur le clergé pour survivre et préserver sa langue, sa culture et sa religion jusqu’à la Révolution tranquille, au début des années 60. Le Québec s’est battu à la pointe du fusil lors de la révolte des patriotes en 1837.

Au lendemain de la révolte, Londres a mandaté Lord Durham pour qu’il enquête sur le Bas-Canada. Sa conclusion : les Canadiens français sont un peuple « sans histoire et sans littérature » qui devrait être assimilé.

Les préjugés ne datent pas d’hier.

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Josh Freed connaît Andrew Potter. « C’est un homme gentil et poli, qui était très excité à l’idée de venir vivre au Québec, un intellectuel perdu dans la forêt qui pense avec son cerveau et non avec son cœur. »

Josh Freed aimerait obtenir sa liste de restaurants. « Les serveurs me courent après dans la rue pour me donner mon reçu, m’a-t-il dit à la blague. Potter affirme le contraire. Pourtant, le Québec est plus rigide là-dessus que les autres provinces. »

En attendant la liste des restaurants, Andrew Potter reste introuvable et McGill fait le dos rond.

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