Image corporelle

Vers les troubles alimentaires ?

Claudia ne tourne pas autour du pot : en voyant sa fille « manger ses émotions », elle craint que celle-ci ne développe un trouble alimentaire. « Est-ce qu’elle va se faire vomir à l’adolescence ? Si on ne règle pas ça en ce moment, ça va être pire plus tard, pense-t-elle. Ça ne peut pas aller en s’améliorant. » Pas tout seul, du moins, selon elle.

Entendre sa fillette se plaindre de son poids et de son apparence suscite une inquiétude semblable chez Cassandre, qui ne voudrait pas que sa fille souffre plus tard d’anorexie. « Je me dis que c’est maintenant qu’il faut que je m’en occupe, avant que ce soit cristallisé et pendant que la communication est possible, dit-elle. J’ai travaillé avec des ados et je sais qu’à un moment donné, ils se referment… »

Les troubles alimentaires touchent bien sûr un certain nombre de garçons, mais ce sont d’abord les filles qui sont à risque de devenir anorexiques ou boulimiques. Des observateurs s’en inquiètent d’autant plus que, à l’ère de l’internet, des sites présentent la minceur extrême comme un mode de vie (« lifestyle ») et glorifient les petites cuisses, les ventres plats et les corps d’une minceur parfois extrême.

INSPIRATION MINCEUR

Thierry Plante, spécialiste de l’éducation aux médias chez Habilo Médias, cite notamment des pages qui utilisent des variations des termes « thinspo » (de « thinsporation », contraction de « thin » et « inspiration ») et « Pro-Ana » (raccourci de proanorexie), appellations cool pour désigner des pages consacrées à l’inspiration minceur ou faisant la promotion de comportements associés à l’anorexie. Sur l’un de ces blogues, on aperçoit même une fille impeccablement coiffée et habillée, qui se fait vomir avec style…

Annie Aimé, cofondatrice de la clinique IMAVIE, spécialisée dans les problèmes de nutrition et d’image corporelle, confirme que le risque que la situation empire est réel.

« Le facteur de risque le plus solide des troubles alimentaires, c’est l’image corporelle négative. Alors pour toute femme qui développe un trouble alimentaire, il y a des insatisfactions corporelles. »

— Annie Aimé, cofondatrice de la clinique IMAVIE

Elle précise néanmoins que ce n’est pas le seul facteur : il y a aussi l’anxiété, la dépression et l’isolement, notamment. L’image corporelle devrait être abordée à l’école, selon elle, et bien sûr à la maison. « Il faut que la communication soit toujours ouverte », conseille-t-elle. 

Même si elle est très embêtée par les inquiétudes de poids de sa fille, Marie peut au moins se réjouir de deux choses : son enfant « est relativement bien dans sa peau » et sa confiance en elle n’a jamais été un problème jusqu’ici.

Claudia se trouve dans une situation plus délicate. Elle ne veut pas mettre de pression sur sa fille et dit ne pas vouloir la voir maigrir pour maigrir. « Ce que je voudrais, c’est qu’elle se sente en forme, qu’elle puisse courir comme les autres, précise-t-elle. Qu’elle ait du fun comme les autres enfants. »

Ce texte provenant de La Presse+ est une copie en format web. Consultez-le gratuitement en version interactive dans l’application La Presse+.