Élections municipales 2017 Opinion

Montréal 
Retirer la pub pour libérer l’horizon

La campagne électorale municipale s’achève. Depuis son déclenchement, de nombreux enjeux ont été soulevés. Nous en proposons un dernier : l’affichage publicitaire. Et si on retirait la publicité de l’espace public à Montréal ?

Il s’agit d’une proposition audacieuse, car la publicité est omniprésente. Elle nous attend sur le bord des routes, sur les immeubles, dans les transports en commun. Choisir de la retirer (ou même simplement de la limiter) ne signifierait alors rien de moins que de changer le paysage urbain.

Et pourquoi pas ? On pourrait alors utiliser une partie de l’espace pour afficher autre chose, comme des œuvres d’artistes locaux ou des messages d’intérêt public. 

Quand une ville se montre belle et intelligente, ceux et celles qui l’habitent en retirent de la fierté et développent le goût de la faire rayonner.

Ce n’est pas une idée aussi inusitée que l’on pourrait le croire. Ailleurs dans le monde, de grandes villes ont fait ce choix et d’autres encore envisagent de rejoindre ce mouvement.

À São Paulo, on a tout enlevé en 2006 avant de recommencer à permettre des publicités quelques années plus tard, mais de manière réfléchie et consciencieuse. À Grenoble, les règles ont été resserrées pour ne permettre que certains types d’affichage (événement culturel, vie associative, expression d’opinion). Dans cette ville, les publicités en tout genre sévissent toujours dans le réseau de transports en commun, mais ce sera chose du passé en 2019, lorsque viendra à échéance le contrat de l’entreprise privée qui les gère.

Il est vrai que la publicité rapporte aux administrations municipales. La Ville de Montréal obtient ainsi un peu moins de 3 % de ses revenus. À la STM, on parle de 2 %. La décision d’agir sur l’envahissement de l’espace par la publicité dépasse toutefois les considérations budgétaires et relève plutôt d’une vision progressiste des politiques publiques. 

Cela permettrait de lutter contre la privatisation de l’espace public et contre les pressions incessantes à consommer davantage.

Bien entendu, les entreprises d’affichage n’apprécient pas l’idée. Déjà, sur le Plateau-Mont-Royal, elles mènent la lutte contre la réglementation qui visait à limiter la publicité abusive sous prétexte de liberté d’expression. Parce que, selon elles, les publicités sont sur des propriétés privées.

Permettez-moi ici une petite analogie. Si vous criez à tue-tête dans votre salon à minuit, c’est quand même le droit au calme des personnes autour qui primera. Ainsi, même si la publicité se trouve sur un immeuble privé, ne devrait-on pas prendre en considération que des personnes qui sont dans d’autres immeubles privés ou dans des lieux publics adjacents (ou distants !) seront affectées ?

Afin de compenser les sommes perdues, plusieurs avenues sont possibles. D’une part, l’administration montréalaise pourrait imiter Grenoble et réduire le nombre de voitures qu’utilisent ses employés. Elle économiserait ainsi sur l’essence et sur l’entretien. D’autre part, l’actuelle campagne électorale a révélé des dépenses qu’on pourrait éliminer ou réduire, telles que l’écriture de discours par des sous-traitants ou les frais de représentation à l’international.

Dans tous les cas, il s’agit d’abord d’une question de volonté. Et de beauté.

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