Phillip Danault et Guy Carbonneau

La comparaison, vue de l’autre côté

New York — Claude Julien en a surpris quelques-uns, lundi soir, en comparant le parcours de Phillip Danault à celui de Guy Carbonneau. Les entraîneurs sont souvent réticents à tomber dans le jeu des comparaisons, pour éviter d’ajouter de la pression sur un joueur. Pour que Julien prenne la peine de le faire, il doit vraiment tenir Danault en très haute estime.

« Ça me fait chaud au cœur », disait Danault avant le match de mardi contre les Rangers de New York.

Et Carbonneau, lui, il en a pensé quoi ?

« C’est toujours flatteur, admet l’ancien capitaine et entraîneur-chef du Canadien, aujourd’hui analyste à RDS. Ce n’est pas une comparaison lancée en l’air. J’ai toujours pensé que j’étais ce genre de joueur, dans mon temps. Dans une équipe qui vise la Coupe, c’est un gars de deuxième ou troisième trio qui est capable de faire des points. »

Comme Carbonneau à l’époque, Danault est l’homme de la situation pour les mises en jeu et en désavantage numérique, et il peut soutenir une production offensive très acceptable pour un joueur responsable de couvrir les meilleurs attaquants.

« Le défi des entraîneurs aujourd’hui, c’est de trouver la bonne chaise pour tous tes joueurs, avec des éléments à considérer comme le salaire, explique Carbonneau. Trouver un joueur capable de sacrifier son attaque pour aider l’équipe, c’est plus compliqué que dans mon temps. Phillip n’est pas un gars de 80 points, mais il est capable. Au lieu d’en faire 55-60, il en fait 40-45, mais il joue bien défensivement. Claude a voulu lui donner une tape dans le dos. »

Un trophée qui a changé

Contrairement à Carbonneau, Danault joue à une époque où il existe bon nombre de statistiques pour mesurer l’impact de joueurs de sa trempe.

La Ligue nationale a commencé à compiler les mises en jeu remportées en 1997-1998. Cette année-là, Carbonneau avait fini troisième dans la LNH, à 59,4 %, derrière Eric Lindros et Joe Nieuwendyk. Sinon, on avait accès à son différentiel, et c’était pas mal tout.

Grâce à des sites de référence comme NaturalStatTrick, les amateurs et journalistes ont accès à une myriade de données aujourd’hui. On sait donc que le Tricolore contrôle 59,95 % des tentatives de tir à cinq contre cinq quand Danault est sur la patinoire. On sait qu’il y parvient malgré le fait que Sidney Crosby est le joueur qu’il a affronté le plus souvent cette saison. On peut aussi connaître les taux de buts marqués et accordés (par tranche de 60 minutes) dans toutes les situations inimaginables.

Malgré l’absence de mesures aussi précises auparavant, le meilleur attaquant défensif était récompensé par le trophée Selke, attribué pour la première fois en 1978. « Bob Gainey était dominant dans son style, donc on a essayé de récompenser ce type de joueur », rappelle Carbonneau.

Gainey l’a gagné les quatre premières années, avant que Carbonneau l’imite en 1988, 1989 et 1992.

Statistiques de Carbonneau (buts-aides-points)

1987-1988 : 17-21-38 en 80 matchs, + 14

1988-1989 : 26-30-56 en 79 matchs, + 37

1991-1992 : 18-21-39 en 72 matchs, + 2

Or, depuis le lock-out de 2004, tous les gagnants du Selke ont amassé au moins 50 points (lors de la saison écourtée de 2013, Jonathan Toews en avait obtenu 48 en 47 matchs). La saison dernière, Anze Kopitar a gagné le scrutin en totalisant… 92 points !

À voir ces chiffres, Carbonneau ne s’attend pas à voir le nom de Danault sur le trophée Selke un jour. « Dans mon temps, il aurait été un candidat, c’est sûr, précise-t-il. Je ne dis pas que je n’aime pas Kopitar, mais les barèmes ont changé. Ce sera difficile pour Phillip. »

En avance ?

En 2011, Danault a justement gagné le trophée Guy-Carbonneau, remis au meilleur attaquant défensif dans la LHJMQ. Le Victoriavillois avait donc déjà développé ces aptitudes, ce qui ne l’avait pas empêché de connaître des saisons de 67, 71 et 85 points dans les rangs juniors.

Carbonneau, lui, était résolument porté vers l’attaque, amassant 141 et 182 points à ses deux dernières campagnes à Chicoutimi. Mais il ne négligeait pas son jeu défensif.

« Il n’y avait pas les plus et moins, mais à 182 points, j’espère que j’étais dans les plus ! Mais j’essayais de bien jouer dans les deux sens et je ne trichais pas. »

— Guy Carbonneau

Repêché au 44e rang en 1979, il possédait un potentiel offensif intéressant, mais il a compris qu’il devait se distinguer pour faire sa place.

« À mes deux premiers camps à Montréal, avant de me retourner, on me disait toujours la même chose : on sait que t’es capable de faire des points, mais on veut que tu travailles sur ton jeu défensif.

« Quand j’ai eu ma chance à Montréal, je jouais 6 ou 7 minutes par match. Mon but était d’avoir plus de minutes, donc j’ai travaillé sur autre chose. Quand on a eu des blessés, j’ai commencé à jouer avec Gainey. Puis Jacques Lemaire est arrivé comme entraîneur-chef et il voulait m’utiliser contre les meilleurs trios adverses. Du jour au lendemain, je suis passé de 6 ou 7 minutes à 17 ou 18 minutes par match. »

Danault connaît un fort début de saison, même s’il a eu quelques soirées plus difficiles, comme mardi à New York. Ça arrivait aussi à Carbonneau, malgré sa réputation enviable. « Ken Linseman et Peter Stastny étaient très durs à affronter, se souvient-il.

« Ça arrive à tout le monde de connaître de mauvaises périodes. L’important, c’est d’en avoir le moins possible. »

Le Canadien

Agostino rappelé

Le Canadien a rappelé hier l’attaquant Kenny Agostino de son club-école de Laval. L’Américain de 26 ans a récolté 10 points en 12 matchs cette saison avec le Rocket. Agostino a disputé 22 rencontres dans la LNH avec les Flames de Calgary, les Blues de St. Louis et les Bruins de Boston. Le patineur du New Jersey a signé un contrat d’une saison à deux volets avec le Canadien l’été dernier. Il a été un choix de cinquième tour des Penguins de Pittsburgh au repêchage de 2010.

— La Presse canadienne

Ce texte provenant de La Presse+ est une copie en format web. Consultez-le gratuitement en version interactive dans l’application La Presse+.