OPINION

En finir avec les hydrocarbures

Nous pouvons diminuer rapidement la consommation, la production et le transport du pétrole.

En réponse au texte de Pierre-Olivier Pineau, « Par où la sortie ? », publié lundi dernier.

À la question de savoir s’il est prioritaire de bloquer des projets d’oléoducs, M. Pineau laisse sous-entendre que non. Selon lui, nous devons plutôt changer nos comportements et réduire notre dépendance.

Il est bien vrai que nous devons réduire notre consommation de pétrole de manière accélérée au cours des prochaines années, mais nous devons également diminuer les émissions de gaz à effet de serre en provenance de la production des combustibles fossiles, à commencer par les plus polluants comme le charbon et les sables bitumineux. Plusieurs organisations et gouvernements sont ainsi d’avis que nous devons réduire notre consommation et nous opposer au projet d’oléoduc pour plusieurs raisons.

La science exige qu’au niveau mondial, nous n’utilisions plus d’hydrocarbures d’ici 2050.

Si nous sommes sérieux dans l’intention de limiter le réchauffement planétaire à 1,5 degré Celsius, nous devons agir immédiatement.

L’accord de Paris prévoit d’ailleurs que les pays développés plafonnent leurs émissions de GES, « étant entendu que le plafonnement prendra davantage de temps pour les pays en développement ».

80 % des hydrocarbures doivent rester sous terre afin d’avoir une chance raisonnable d’éviter les bouleversements climatiques catastrophiques. Le fonds souverain de la Norvège, le plus important au niveau mondial, l’a compris et a amorcé un désinvestissement massif dans ces filières polluantes et de nombreuses institutions font de même.

Selon un article publié dans la revue Nature, si le Canada fait sa juste part dans la lutte contre les changements climatiques, 85 % des réserves prouvées de pétrole des sables bitumineux ne peuvent être exploitées puisqu’il figure parmi les plus polluants à produire.

En effet, en moyenne, la production de ce pétrole est de trois à quatre fois plus polluante que le pétrole conventionnel. Depuis plusieurs années, la production des sables bitumineux est d’ailleurs la principale source d’augmentation des émissions de GES au Canada. De plus, selon Environnement Canada, si rien n’est fait, cette augmentation continuera et empêchera le Canada d’atteindre les objectifs de réduction des GES qu’il s’est lui-même fixés pour 2020 et 2030.

L’oléoduc Énergie Est permettrait l’augmentation de la production du pétrole bitumineux dans l’Ouest de près de 40 %, engendrant des émissions de GES équivalentes à l’ajout de sept millions de véhicules sur les routes au Canada. De plus, selon la revue Nature, chaque baril de pétrole supplémentaire augmente la consommation mondiale de 0,6 baril en raison de l’influence à la baisse sur le prix mondial du pétrole.

Prétendre qu’on doit seulement agir sur la consommation et non la production équivaut à faire fausse route. Obama l’a compris et a rejeté le projet Keystone XL parce qu’il augmenterait significativement les émissions globales de GES. Les solutions existent pour diminuer rapidement la consommation, la production et le transport du pétrole, et le Québec peut devenir un exemple mondial s’il met des politiques cohérentes en place.

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