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Le prêt sans intérêt de 372,5 millions accordé à Bombardier par Ottawa a entraîné de nombreuses réactions et une bonne dose d'insastisfaction. Tour d'horizon.

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L’aide à Bombardier passera-t-elle le test ?

Le Brésil crie-t-il au loup au sujet de l’aide à Bombardier ? Ou, au contraire, a-t-il une bonne cause contre le Canada ? Nous avons posé la question à deux experts en commerce international.

Commençons par le prêt sans intérêt de 372,5 millions accordé par Ottawa. Est-ce permis par l’Organisation mondiale du commerce (OMC) ?

« Ce qui est interdit, c’est la subvention à l’exportation », explique Richard Ouellet, professeur de droit à l’Université Laval. Or, un prêt sans intérêt qui permet à son bénéficiaire d’épargner des millions par année en frais de financement, « c’est considéré comme une subvention », dit-il.

Y a-t-il des exceptions ?

Dans le cas de Bombardier, la question qu’il faut se poser, c’est : « Est-ce qu’il y a des clauses [dans l’accord avec Ottawa] qui viennent justifier le fait que c’est sans intérêt ? », poursuit Richard Ouellet. Il pourrait bien y en avoir une : le prêt est sans intérêt, mais il est remboursable sous la forme de redevances chaque fois qu’un avion est vendu. Dans le cas du jet d’affaires Global Express (aujourd’hui appelé Global 5000), Bombardier dit avoir remboursé plus de 300 % du prêt reçu d’Ottawa dans les années 90 en raison du grand succès de l’avion. « Dans un tel cas, il ne s’agit pas d’une subvention, mais bien d’un arrangement commercial qui tient compte du risque du projet, estime Patrick Leblond, professeur à l’École supérieure d’affaires publiques et internationales de l’Université d’Ottawa. Si le projet fonctionne, le gouvernement sort bien plus gagnant que s’il a prêté à un taux d’intérêt commercial. »

Y a-t-il d’autres aspects du dossier qui pourraient favoriser Ottawa ?

« Quand le ministre Bains insiste pour dire que le prêt est une aide pour la recherche et le développement, j’y vois un argument à faire valoir à l’OMC, affirme M. Ouellet. Ottawa dira que le prêt n’est pas lié à la commercialisation et donc qu’il n’y a pas de distorsion dans le marché. »

Et que penser des investissements totalisant 2,5 milliards US effectués l’an dernier par le gouvernement du Québec et la Caisse de dépôt et placement dans Bombardier ? Embraer soutient que ces fonds ont permis à Bombardier de vendre des avions en deçà du prix coûtant.

« Les règles de l’OMC n’empêchent pas les États d’investir dans des entreprises à moins qu’on puisse vraiment démontrer que c’est une subvention cachée », indique M. Leblond. Pour ce qui est de la Caisse, elle n’est pas à l’abri de l’OMC même si elle fonctionne de façon indépendante du gouvernement. « Le financement effectué par une entité publique ou parapublique peut être considéré comme une subvention dans certaines circonstances », note Richard Ouellet.

On a l’impression que les décisions de l’OMC ont rarement des répercussions concrètes. Est-ce exact ?

« Un pays qui obtient une décision favorable de l’OMC a le droit d’imposer des droits de douane compensatoires à l’encontre du pays qui a perdu, souligne Patrick Leblond. Mais c’est une décision politique de dire : “Est-ce qu’on veut aller jusque-là ?” » Pour M. Ouellet, les démarches devant l’OMC relèvent beaucoup des « relations publiques ». À ses yeux, le Canada ne devrait donc pas trop s’en faire avec la plainte du Brésil. « Le milieu canadien des affaires doit arrêter de s’autoflageller, lâche-t-il. Dans l’aéronautique, tout le monde triche allègrement, mais le Canada est de loin celui qui triche le moins. »

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