OPINION TECHNOLOGIES DE L’INFORMATION

Pensons à l’avenir du Montréal technologique

Il est urgent d’unir nos forces afin d’augmenter le bassin de talents qualifiés de la métropole

La bonne performance économique du Québec, qui entraîne une forte création d’emplois, ainsi que les changements démographiques que nous observons imposent aux entreprises technologiques dans le Grand Montréal un défi de taille en matière de recrutement de personnel.

Faut-il en conséquence sabrer les crédits d’impôt ou même fermer la porte aux entreprises étrangères, comme l’avancent certains, pour remédier au problème ? Montréal International, l’agence de développement économique du Grand Montréal, n’est pas de cet avis. Plus que jamais, nous croyons qu’il est urgent d’unir nos forces afin d’augmenter le bassin de talents qualifiés de la métropole grâce, notamment, à des systèmes d’éducation et d’immigration plus efficaces.

Hélas, il existe encore plusieurs mythes qui méritent d’être déboulonnés, et ce, afin de mieux débattre…

Mythe 1 – Aujourd’hui, 20 ans après leur création, les crédits d’impôt ne sont plus nécessaires

Si c’était vrai, nos voisins ne nous imiteraient pas… On n’a qu’à penser à l’Ontario, dans le jeu vidéo, qui offre un crédit d’impôt remboursable pouvant aller jusqu’à 40 % des salaires admissibles. En fait, les secteurs à haute valeur ajoutée sont convoités par un nombre croissant de territoires et ceux-ci sont plus agressifs, plus compétitifs et mieux préparés que jamais pour gagner la course à l’investissement. Le Québec ne peut pas se permettre de « rendre les armes » de façon unilatérale, lui qui est devenu, grâce entre autres à ces crédits, le cinquième pôle de création de jeux vidéo en importance dans le monde et le troisième en Amérique du Nord.

Mythe 2 – Il n’y a plus de création d’emplois en technologies de l’information (TI), que des déplacements

Selon Statistique Canada, il s’est créé dans le Grand Montréal 30 000 nouveaux emplois en 2016 (+ 1,5 %) et plus de 120 000 au cours des cinq dernières années. Bonne nouvelle, le secteur des TI participe à cette création nette d’emplois, avec une hausse de 2000 emplois en 2016 (3,1 %) et plus de 13 000 en cinq ans. On est loin des simples déplacements…

Mythe 3 – Les entreprises étrangères sont les seules à toucher les crédits d’impôt

Les crédits d’impôt du Québec ne sont pas réservés exclusivement aux entreprises étrangères. Toutes les entreprises, sans exception, qui évoluent dans les secteurs admissibles, incluant les entreprises locales, y ont accès. Dans certains cas, comme pour la R et D, les crédits sont même plus élevés pour les entreprises locales.

Mythe 4 – Les entreprises étrangères ne contribuent pas à la création de richesse au Québec

Si la concurrence internationale est devenue si vive pour attirer l’investissement étranger, c’est qu’il constitue l’un des plus puissants moteurs de croissance économique. À preuve, dans le Grand Montréal, les filiales d’entreprises étrangères ne représentent que 1 % des entreprises, mais 10 % de l’emploi et 20 % du PIB de la métropole. C’est un effet multiplicateur impressionnant.

À l’échelle canadienne, les filiales étrangères présentes sur le sol canadien sont responsables de 50 % de toutes les exportations et de 37 % des dépenses d’entreprise en R et D au Canada (Rapport Barton, 2016). Bref, en agissant sur l’attraction d’investissements étrangers, on stimule du même coup l’exportation et l’innovation, tous des vecteurs clés de croissance.

Mythe 5 – Les crédits d’impôt ne sont pas rentables et créent des distorsions

Les crédits d’impôt consentis par le gouvernement du Québec aux entreprises technologiques génèrent d’importantes retombées économiques. Les études produites dans le cadre de la Commission d’examen sur la fiscalité québécoise confirment d’ailleurs que les retombées associées au secteur du jeu vidéo sont plus importantes que les coûts engendrés par le crédit d’impôt. Les études arrivent aussi au même constat en ce qui concerne le secteur des affaires électroniques.

Ces revenus supplémentaires pour l’État ne prennent pas en compte d’autres effets bénéfiques liés au développement de ces secteurs technologiques, notamment leur rôle dans la revitalisation de certains quartiers et la reconnaissance de Montréal à l’échelle internationale comme pôle technologique. Pour assurer leur compétitivité économique sur la scène mondiale, les grandes métropoles comme Montréal ne peuvent se permettre d’être juste « moyennes » dans tous les secteurs et de n’exceller dans aucun. Elles doivent choisir leurs créneaux d’excellence, les développer et les mettre de l’avant.

Pourquoi changer une recette gagnante ?

Le recours à une stratégie sectorielle ciblée a largement contribué au fil des dernières années à l’émergence de l’économie du savoir dans le Grand Montréal. En misant entre autres sur des crédits d’impôt et la création de grappes industrielles, la métropole a su développer une identité économique forte qui s’articule autour de créneaux d’avenir, tels que les technologies de l’information, les technologies financières, le jeu vidéo, les effets visuels, l’aérospatiale, les sciences de la vie et les technologies de la santé.

Le débat sur les crédits d’impôt lancé récemment nous rappelle que nous faisons face à un beau défi : attirer et former suffisamment de travailleurs spécialisés pour répondre à la demande en TI, mais aussi dans d’autres secteurs spécialisés. C’est ensemble que nous réussirons à relever ce défi qui nous interpelle tous, que nous soyons à la tête d’entreprises québécoises, canadiennes ou étrangères ou encore des dirigeants gouvernementaux, d’agences de développement économique, d’ordres professionnels ou d’établissements d’enseignement.

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