David Saint-Jacques

Idéaliste et antihéros

La mission de David Saint-Jacques dans l’espace en quatre temps

L’ANTIHÉROS

Malgré les entrevues qui s’enchaînent depuis sa sélection officielle pour l’Expedition 58/59 qui l’amènera dans l’espace, David Saint-Jacques répond aux questions avec enthousiasme et générosité. Mais il grimace presque lorsque La Presse lui demande s’il est prêt à devenir le prochain héros des Québécois.

« Les héros, je m’en méfie, dit-il d’un ton ferme. Je trouve même le terme dangereux. Mon père m’a toujours dit : sois ton propre héros. Je veux que les jeunes sachent que je ne suis pas un héros. Je suis un gars ben ordinaire qui a travaillé fort. Tout le monde peut faire ce que je fais. »

David Saint-Jacques insiste : il y a des milliers de personnes derrière une mission spatiale et il n’en sera cette fois que l’un des visages les plus visibles. Et il soutient que malgré les apparences, il n’est pas parfait.

« Je ne peux pas danser, par exemple, lance-t-il avec le sourire. Je suis incapable de suivre le rythme. »

SUCCÉDER À HADFIELD

Comment se sent David Saint-Jacques à l’idée de succéder à Chris Hadfield, le dernier Canadien à être allé dans l’espace et sans doute l’astronaute le plus populaire depuis ceux qui ont mis le pied sur la Lune ?

« Comme tout le monde, j’ai été emporté par la vague Chris Hadfield, répond-il. Je travaillais à ce moment au centre de contrôle, à Houston, et j’ai été souvent en coulisses pour aider à coordonner tous ses évènements. L’engouement qu’il a suscité a été formidable et touchant. »

Il se décrit cependant comme « très différent » et « plus académique » que son prédécesseur. Pas de concert de guitare dans l’espace, donc, pour David Saint-Jacques.

« La grande leçon que j’ai apprise de Chris, c’est qu’on peut faire une mission en restant soi-même, résume-t-il. Il a partagé son expérience de son point de vue, sans essayer d’être quelqu’un d’autre. Et je compte bien faire la même chose. »

L’IDÉALISTE

« Idéaliste ». L’adjectif est lancé par le Dr Howard Bergman, directeur du département de médecine de famille à l’Université McGill, pour décrire David Saint-Jacques.

C’est à McGill que David Saint-Jacques a fait sa résidence en médecine familiale. Et le Dr Bergman a été très marqué par sa rencontre avec lui lors du 40e anniversaire du département, alors que l’astronaute était l’invité d’honneur.

« Il parle sans cesse de contribuer à améliorer notre sort et le sort de la planète, dit le Dr Bergman. Regardez son parcours, sa pratique de la médecine dans le Grand Nord… C’est un gars qui veut contribuer. »

David Saint-Jacques ne renie pas le qualificatif, rappelant le rôle crucial qu’a joué l’exploration spatiale dans le développement de la conscience écologiste.

« Quand on voit la Terre de l’espace, on réalise que tout ce qu’on a, c’est ce qui s’y trouve, dit-il. Il n’y a rien autour. »

LA PEUR

« On ne peut pas nier le danger des missions spatiales. Je serais naïf si je disais que je n’ai pas peur », dit David Saint-Jacques à propos de son futur séjour dans l’espace.

Mais lorsqu’on l’interroge sur ses principales craintes, ce ne sont pas les pépins techniques que mentionne David Saint-Jacques, mais la fameuse… conciliation travail-famille.

C’est que l’homme est papa de deux jeunes enfants et en attend un troisième. Les deux prochaines années seront faites d’entraînements écartelés entre la Russie, le Japon, le Canada et les États-Unis. Puis il y aura le séjour de six mois dans la Station spatiale internationale.

« C’est tout un défi pour la famille, admet l’astronaute. Nous sommes comme tout le monde, tout le monde doit jongler avec cette réalité. Malgré toute la fierté et le privilège que j’ai d’être astronaute, je suis d’abord un mari et un père de famille. »

« Quant au défi technique, il est énorme, mais j’ai été sélectionné parce que je suis capable de le faire, continue-t-il. J’ai juste à travailler et je sais que je vais être correct ! »

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