Monsieur l’inspecteur

L’insonorisation, un tabou en immobilier

Étant donné ce que vous coûtera votre futur logement, vous ne voudrez sûrement pas revivre vos cauchemars de locataire, quand vous entendiez les activités nocturnes de vos voisins. Quelques notions d’insonorisation.

Vous êtes tenté par un rez-de-chaussée plein de cachet sur le Plateau Mont-Royal ? Soyez prévenu : le prix d’achat pourrait être inversement proportionnel à la qualité de l’insonorisation !

Ce ne sont pas tous les vieux bâtiments en rangée qui sont séparés par des murs de blocs de béton creux capables de stopper la transmission du son des activités quotidiennes. Et d’un étage à l’autre, il y aura aussi des « infiltrations sonores », bien au-delà des bruits de pas.

Dans le parc de condos récents, il faut aussi se méfier. Le Code de construction ne stipule aucune norme pour les bruits d’impact. Pour les bruits aériens, le minimum exigé des constructeurs est de 50 ITS (Indice de transmission du son) entre les logements. 

« À 50 ITS, c’est deux fois mieux que dans les vieux duplex et triplex, mais vous pourrez quand même entendre votre voisin qui ronfle terriblement et son réveille-matin qui sonne sur le bord du mur. » 

— Jean Laporte, acousticien, AcoustikaLab

L’insonorisation est un véritable tabou en immobilier. Le courtier et le propriétaire vendeur n’osent pas trop en parler, de peur de semer un doute chez l’acheteur. Les constructeurs préfèrent également taire la question, même quand ils ont dépassé les normes minimales, afin de ne pas créer des attentes trop élevées.

Pour obtenir les réponses les plus franches sur la qualité d’insonorisation, les meilleurs interlocuteurs sont les voisins. Il se pourrait même que les vendeurs partent parce qu’ils n’en peuvent plus de les entendre !

LA TRANSMISSION DU SON

Idéalement, les cloisons séparant les logements seront en blocs de béton creux, ou en béton coulé. La masse du béton est suffisante pour étouffer la plupart des bruits aériens.

D’un étage à l’autre, des planchers de béton sont souhaitables, même si le béton transmettra certains bruits d’impact, comme celui d’une casserole qui tombe sur la céramique de la cuisine.

Le bois étant plus souple que le béton, il est plus facile de lui communiquer une vibration, comme celle provoquée par les pas. Une structure en bois permet l’usage d’une variété de matériaux (gypse, barres résilientes, laine insonorisante) et de techniques d’insonorisation, mais encore faut-il que le travail ait été bien fait.

Des entreprises de consultation comme Sonar acoustique et AcoustikaLab offrent des tests de transmission du son, qui peuvent être réalisés avant, pendant ou après une transaction immobilière. Le coût varie de 650 $ à 950 $. L’acousticien devra avoir accès au logement voisin pour y générer le bruit aérien ou le bruit d’impact.

Les constructeurs, les ingénieurs et même les architectes comprennent mal les principes de la transmission du son, affirme Jean Laporte. « Les seules choses qui arrêtent le son, ce sont de la masse et des déconnexions mécaniques. » Par exemple, on utilisera deux épaisseurs de gypse pour créer de la masse et des barres résilientes (montants métalliques) pour « déconnecter » les matériaux solides composant le mur.

Les travaux d’insonorisation sont coûteux et les résultats sont parfois décevants. Une fois le plancher et le plafond insonorisés, on découvre que les murs sont aussi des voies d’infiltration sonore.

« Après des travaux d’insonorisation, on tend l’oreille (pour noter s’il y a amélioration). Plus on tend l’oreille, plus on perçoit. Et plus on perçoit, plus on tend l’oreille », explique Jean Laporte. « Plus on focalise sur un bruit, plus il devient irritant », ajoute-t-il pour illustrer les dimensions psychologiques de l’insonorisation.

Pour minimiser le coût des travaux, on se concentre sur les pièces sensibles. Dans la chambre à coucher, on arrache toutes les cloisons et on met le paquet pour l’insonoriser. Ailleurs, on se contente d’améliorer le plafond.

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