Direction de la protection de la jeunesse

Mme McCann, les jeunes veulent être entendus

Les jeunes du projet Porte-Voix, sous la plume de la coordonnatrice Emily Laliberté, ont décidé d’écrire une lettre à la ministre Danielle McCann pour souligner sa nomination à la tête du ministère de la Santé et des Services sociaux et émettre des recommandations pour venir en aide aux jeunes les plus vulnérables.

Prochainement, vous devrez cibler les priorités de votre ministère et c’est pourquoi je tiens à attirer votre attention sur un enjeu fondamental souvent laissé pour compte : nos jeunes vulnérabilisés. 

Au lendemain des élections était publié le Bilan annuel des DPJ 2018. Au-delà de l’augmentation alarmante des signalements, nous pouvons y constater l’ampleur des dommages causés par la réforme Barrette. 

Depuis 2012, à travers le projet Porte-Voix, nous accompagnons des jeunes placés. Notre démarche de cocréation et de réflexion critique a permis à plus d’une centaine de jeunes de se mobiliser et d’émettre des recommandations que nous souhaitons maintenant vous partager. 

La prévention 

Si nous analysons le parcours des jeunes avec lesquels nous avons travaillé, nous réalisons que la situation socio-économique des familles est un facteur récurrent de placement. Nous considérons donc essentiel de mettre en place des politiques sociales assurant aux familles vulnérables des ressources adéquates pour subvenir à leurs besoins. 

Le manque de personnel et les listes d’attente interminables dans les services de première ligne doivent également être une priorité. La difficulté d’accès à ces services met une pression énorme sur des familles déjà à bout de souffle, ce qui a un impact direct sur les placements. 

L’accès à l’information et aux soins de santé 

Étant placés, les jeunes vivent une perte de pouvoir face à leur santé. Plusieurs souffrent de problématiques de santé mentale et/ou de santé physique et peinent à comprendre les conséquences des traitements reçus sur leur vie. Les informations sont difficilement accessibles et passent par plusieurs professionnels sans permettre au jeune d’exercer un consentement éclairé.

Nous croyons qu’il est impératif de revoir les processus et politiques en place afin d’assurer le respect de ces droits fondamentaux. 

La stabilité

Nos participants notent une incohérence flagrante entre le fait de retirer un jeune de sa famille en se basant sur son besoin de stabilité et la réalité actuelle des services. En effet, au cours d’un placement, un jeune changera à plusieurs reprises d’intervenant et/ou de milieu de vie en raison de différents facteurs structurels. Cela joue directement sur le sentiment d’appartenance, le lien de confiance et la stabilité relationnelle du jeune. Ce n’est qu’en assurant les ressources nécessaires aux milieux de vie et aux intervenants, pour l’acquittement de leur mission, que nous pourrons vraiment offrir une stabilité aux jeunes. 

Transition vers la vie autonome 

La fin de l’hébergement crée un sentiment d’angoisse et d’impuissance chez les jeunes. Arrivés à majorité, ils se sentent démunis, sans ressource ni réseau susceptible de les soutenir dans leur désir de prendre pleinement part à la société. Accroître les services dédiés à la préparation à la vie adulte et offrir des opportunités de réseautage en cours de placement sont des pistes de solution qui favoriseraient leur participation et leur inclusion dans la société. 

En conclusion, il est fondamental pour nous qu’un jeune use de son pouvoir d’agir en étant entendu et reconnu dans l’élaboration des politiques, des services et des lois le concernant. C’est pourquoi nous souhaiterions aujourd’hui amorcer un dialogue, afin d’enrichir les réflexions de votre ministère sur ses prochaines actions envers la jeunesse. 

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