Les allégations d’AlgoSlim

Maigrir en permanence

« Vous créez dans votre organisme un puissant combustible qui force à maigrir même si vous continuez à manger comme d’habitude. Votre poids diminue donc automatiquement et en permanence », explique AlgoSlim. « Si ça fonctionne en permanence, à un moment donné, vous disparaissez, parce qu’il ne reste plus rien à brûler », ironise M. Jalbert.

Les allégations d’AlgoSlim

Perte de poids irréaliste

« Perdez une moyenne de 37 % de poids et de 46 % de gras après seulement 3 ou 4 semaines ! », promet AlgoSlim. Une telle chute de poids est irréaliste et dangereuse. Selon la Fondation des maladies du cœur et de l’AVC, une perte de poids sécuritaire consiste à « perdre entre 500 g et 1 kg [une à deux livres] par semaine ». Or, une personne de 90 kg qui perdrait 37 % de son poids maigrirait de 33 kg en trois ou quatre semaines.

Les allégations d’AlgoSlim

Pas de reprise

« Avec AlgoSlim, vous ne reprendrez jamais le poids une fois [que vous l’aurez] perdu », ajoute la brochure. La réalité, c’est que « plus de 95 % des individus n’arrivent pas à maintenir le poids perdu après avoir eu recours à un ou des produits, services et moyens amaigrissants », indique le rapport Démasquer l’industrie de l’amaigrissement, publié par l’ASPQ en 2015.

Les allégations d’AlgoSlim

PERDRE 10 KILOS EN 10 JOURS

« Vous perdrez 1 kilo en 10 jours sans régime draconien, même si vous mangez trop », prétend la publicité d’AlgoSlim. « Continuer à manger ce qu’on veut et perdre du poids quand même, sans effort, c’est impossible, tranche Yves Jalbert, de l’Association pour la santé publique du Québec (ASPQ). Et comment penser que deux personnes, l’une qui mange 1000 et l’autre 10 000 calories par jour, vont perdre toutes les deux 10 kilos en 10 jours ? »

AlgoSlim

Un produit amaigrissant dénoncé

« Mangez et perdez tout votre excès de poids, graisse et cellulite grâce au tout nouveau traitement à base d’algues varech unique au monde ! » Voilà ce qui était écrit sur une enveloppe reçue à la fin de l’été, à Laval, par une connaissance d’Yves Jalbert, de l’Association pour la santé publique du Québec (ASPQ).

À l’intérieur, une brochure explique qu’AlgoSlim, des Laboratoires Therascience, fait perdre « au moins 10 kilos en 10 jours sans régime, en mangeant à volonté et pour toujours ! ».

« Il n’y a pas une étude scientifique qui démontre qu’un produit de santé naturel permette ça, tranche M. Jalbert, qui est détenteur d’un doctorat en santé communautaire de l’Université de Montréal. C’est impossible. » Le prix de ce produit prétendument amaigrissant ? Deux bouteilles de 60 gélules sont vendues par la poste ou par téléphone 49 $, plus 7,95 $ de frais d’envoi.

Dans sa publicité, AlgoSlim multiplie les allégations étonnantes. Ce produit « agit 24 heures sur 24 sur l’hypothalamus, la glande qui contrôle la faim », il « accroît en permanence l’énergie que vous brûlez » et il « réduit votre taux de glycémie de 47 % », prétend l’entreprise E Sélection, à qui il faut envoyer le bon de commande. Aucune étude scientifique n’est citée pour appuyer ces propos.

Le témoignage de Kelly T., qui aurait perdu 40 kg en 40 jours, est à l’avenant. « En deux mois, j’étais devenue un canon et les copines étaient toutes jalouses de moi, l’hippopotame, qui emballait les beaux mecs », confie prétendument la dame.

DEUX ÉTIQUETTES L’UNE SUR L’AUTRE

Santé Canada a reçu une plainte concernant AlgoSlim et en a obtenu un échantillon, indique Maryse Durette, conseillère principale en relations avec les médias du ministère. Mauvaise surprise : sous l’étiquette d’AlgoSlim se trouvait une autre étiquette, du produit amaigrissant Slite-T. Santé Canada a fait analyser les gélules, ce qui a permis de confirmer qu’il s’agit effectivement de Slite-T, provenant d’un lot périmé depuis… juin 2012.

Le 3 août, Santé Canada a publié un avis sur son site internet recommandant « aux consommateurs de ne pas utiliser AlgoSlim, un produit amaigrissant non homologué distribué par la poste par E Sélection ». Le produit, qui est en réalité du Slite-T, contient des ingrédients qui ne figurent pas sur l’étiquette d’AlgoSlim (Camellia sinensis et Garcinia cambogia). Les femmes enceintes ou qui allaitent ainsi que les personnes ayant une carence en fer ou souffrant de troubles du foie doivent consulter un professionnel de la santé avant de l’utiliser, ce qui n’est pas précisé.

« Ça a juste été diffusé sur le site de Santé Canada, ce n’est pas assez. Nous demandons à Santé Canada d’arrêter d’homologuer des produits amaigrissants, alors que les études scientifiques disent que les produits de santé naturelle associés à la perte de poids n’ont aucune efficacité. »

— Yves Jalbert, spécialiste de contenu à l’Association pour la santé publique du Québec

Or, le Slite-T est homologué par Santé Canada. « Ce qu’ils regardent, c’est l’innocuité, pas l’efficacité des produits », dénonce M. Jalbert.

UNE ADRESSE DANS DES MINI-ENTREPÔTS

Plusieurs tombent dans le panneau et maigrissent du portefeuille : au Canada, l’industrie de l’amaigrissement représentait un marché de 6 milliards de dollars américains en 2014, selon l’ASPQ.

Une recherche au registre des entreprises du Québec permet d’apprendre qu’E Sélection, dont le secteur d’activité est la livraison de colis et la vente directe, est administrée par Frédéric Berne. Son adresse, à Sainte-Thérèse, est celle des Mini-entrepôts Rive-Nord.

Est-ce que Santé Canada a sévi contre E Sélection, après avoir constaté que l’entreprise vendait sous une fausse étiquette un produit périmé ? Vendredi, Santé Canada n’avait pas encore répondu à cette question posée mercredi dernier par La Presse. Chose certaine, AlgoSlim « n’est plus disponible », précise une voix enregistrée entendue jeudi en téléphonant au numéro donné dans la publicité. Personne chez E Sélection n’a rappelé La Presse.

Santé Canada est en train de revoir son approche « à l’égard de la réglementation des produits d’autosoins », qui incluent les produits de santé naturels comme Slite-T. Au terme de cette révision, M. Jalbert craint que le Ministère ne « soit encore moins exigeant » lors de l’homologation de ces produits, malgré l’absence de preuves scientifiques sur leur efficacité.

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