Éditorial  Écoles confessionnelles

La fin des autruches

Comme le yogourt, les bonnes intentions ont une date de péremption. Québec promet depuis plusieurs années de sévir contre les écoles confessionnelles privées non conformes, mais les problèmes demeurent.

En 2010, Rue Frontenac rapportait comment la direction de l’école Dar Al-Iman se réclamait ouvertement de l’organisation des Frères musulmans. Le gouvernement Charest avait réagi avec un bandeau sur les yeux et une pelle dans les mains.

La semaine dernière, le Journal de Montréal rapportait que de la propagande intégriste se trouve à la mosquée qui appartient à l’exploitant de cette même école.

Ce coup de pied a forcé l’autruche à se sortir la tête du sable. On commandera une enquête pour vérifier si la propagande est enseignée dans les classes. De plus, le ministre de l’Éducation, Yves Bolduc, promet de changer la loi pour empêcher qu’un dirigeant d’école ait un dossier criminel ou un « comportement incompatible avec sa tâche ».

C’est le minimum. Mais cela ne réglera pas le problème plus général des écoles privées confessionnelles.

De récents reportages ont révélé qu’une école privée hassidique d’Outremont reste ouverte sans permis. Cinq autres écoles hassidiques conservent leur permis et parfois leur subvention même si elles ne respectent pas le programme ministériel. Pour l’instant, la réponse de Québec se limite à créer un comité.

Si on ferme ces écoles, elles risquent d’opérer dans la clandestinité. On perdrait alors la trace des enfants. M. Bolduc a raison d’être prudent. Deux mesures à l’étude sont prometteuses. D’abord, suivre ces enfants à l’aide de leurs dossiers à la Régie de l’assurance-maladie. Puis, changer la loi pour qu’il soit plus facile de prouver que leurs droits ont été violés.

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Il est difficile d’avoir un portrait d’ensemble. Le ministère de l’Éducation (MELS) du Québec ne distingue pas entre les écoles privées confessionnelles et non confessionnelles. Grâce à un rapport du Comité sur les affaires religieuses, on sait qu’il existe 138 établissements privés confessionnels.

Les informations sur leurs activités sont parfois parcellaires. Le comité a essayé de les diviser en trois catégories. Les frontières entre ces catégories ne sont pas toujours claires.

- 81 écoles offrent un « projet structuré d’éducation de la foi », souvent obligatoire et récurrent, offert en complément au programme ministériel ;

- 34 écoles offrent des activités pastorales, souvent facultatives ;

- 23 écoles déclarent simplement appartenir à une tradition religieuse, par exemple celle d’un jésuite comme Brébeuf.

La grande majorité d’entre elles respectent les exigences du programme ministériel. Sur 138 écoles confessionnelles, 17 ont un « problème de conformité ». Le même taux de non-conformité s’observe parmi les écoles non confessionnelles. Les écoles non conformes sont habituellement petites et ouvertes depuis peu. Il semble donc y avoir un lien avec leurs modestes ressources.

On le constate, le dossier est un fouillis administratif. Et malheureusement, le ministère de l’Éducation est surtout réputé pour réussir à trouver des problèmes aux solutions. Mais le temps du ménage est venu.

L’école n’est pas un lieu de reproduction des coutumes ou une simple préparation au marché du travail. C’est l’endroit où l’on forme les esprits critiques.

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