Diagnostics prénataux

Des grossesses plus angoissantes ?

« L’échographie, c’est le meilleur moyen de terroriser une femme enceinte », a dit en 2000 le Dr Roy Filly, professeur émérite de radiologie, d’obstétrique, de gynécologie et de sciences reproductives à l’Université de Californie.

Le Dr François Audibert, chef de médecine maternelle et fœtale à l’Université de Montréal, trouve qu’il n’a pas tort. Au total, rappelle-t-il, ce ne sera que de 2 à 3 % des enfants qui seront porteurs d’anomalies, « qui vont de choses tout à fait mineures à des anomalies majeures ».

Bref, beaucoup d’inquiétudes souvent pour rien…

« Nos mères l’ont eu plus simple, ça, c’est sûr ! Elles n’avaient pas toutes ces questions à se poser et toutes ces inquiétudes », lance en riant Marilyn Richard, conseillère en génétique à l’Hôpital général juif, en évoquant cette époque où les femmes accouchaient sans avoir subi la moindre échographie.

Par contre, à l’accouchement, le choc pouvait être grand.

« De fait, dans le temps, si la grossesse était moins perturbée par toutes sortes de préoccupations, à la naissance, quand l’enfant mourait ou qu’une anomalie était décelée, c’était tout un choc. »

— Marilyn Richard, conseillère en génétique à l’Hôpital général juif

Il reste qu’assurément, une femme enceinte est vite inquiète, « et beaucoup plus pour son bébé que pour elle-même », fait remarquer Jennifer Fitzpatrick, elle aussi conseillère en génétique à l’Hôpital général juif.

« Dans nos sociétés, on accorde trop peu d’importance à l’impact psychologique de tous ces tests, explique-t-elle. Il faudrait assurément que davantage d’études se penchent sur la question. »

De nos jours, nous agissons de façon très inconstante », dit la Dre Margaret Somerville, qui n’a jamais caché ses positions antiavortement pendant ses 40 ans à la tête du département de médecine de McGill et qui vient de rentrer dans son Australie natale pour y poursuivre sa carrière.

« Nous savons que les enfants prématurés sont très nombreux à naître avec de lourds handicaps et nous dépensons beaucoup d’argent pour les garder en vie. Mais en même temps, au nom du droit de choisir, on essaie de tout contrôler [pendant la gestation], de ne rien laisser au hasard, dans l’espoir d’avoir un bébé parfait. »

« On vit dans une société où l’on veut tout contrôler et où les femmes, qui n’ont plus qu’un ou deux enfants, veulent avoir une grossesse parfaite et un bébé parfait », relève aussi Nicole Reeves, psychologue attitrée au département d’obstétrique du Centre hospitalier de l’Université de Montréal.

À son avis, les tests prénataux n’angoissent pas davantage les femmes : celles qui sont anxieuses le sont d’une manière ou d’une autre, « certaines étant même anxieuses d’être anxieuses à la pensée que des émotions négatives puissent être transmises à leur bébé ».

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