Aide domestique

Revoir ses priorités

Débordée. Épuisée. Dépassée. Une fois devenue mère de famille monoparentale, Jade Bérubé a vu sa qualité de vie se dégrader. La faute aux tâches ménagères. « La fin de semaine, je rattrapais le ménage, le lavage, je préparais les lunchs et les soupers à l’avance, énumère-t-elle. J’aurais pu continuer, mais j’étais malheureuse comme les pierres ! »

Alexandra Oakley a fait un constat similaire lorsqu’elle est retournée au boulot après un congé de maternité. « [Mon conjoint et moi], on s’est vite rendu compte que c’était difficile à la maison, dit-elle. On ne peut pas être à 100 % au travail et à 100 % à la maison en même temps. Et on n’avait pas envie de prendre deux ou trois heures de notre temps de famille pour le ménage. »

Qu’ont fait ces deux mères de famille ? Elles ont décidé de se payer de l’aide. Alexandra Oakley a embauché une femme de ménage, qui passe tous les mercredis. Jade Bérubé, elle, a un homme de ménage une fois toutes les deux semaines. « La première fois que je suis rentrée et que le ménage était fait, ç’a été une révélation, dit-elle. Je me suis demandé comment j’avais fait pour m’en passer si longtemps. »

Plus que le ménage

Paulina Podgorska, fondatrice de SOS Garde, est bien au fait de la fatigue des ménages d’aujourd’hui. « Les deux conjoints travaillent, les horaires sont lourds et les responsabilités ne sont prises en charge par personne d’autre que les parents, a-t-elle constaté. Avant, la famille pouvait aider. Maintenant, la famille est éloignée ou les grands-parents retraités s’occupent de leurs propres affaires. »

Elle a d’ailleurs lancé SOS Garde en 2009 après avoir eu du mal à trouver une garderie pour son enfant, et étant donné que beaucoup de ses collègues étaient dans la même situation. « À l’époque, c’était comme gagner au 6/49 », se rappelle-t-elle. Très vite, elle a vu que les familles avaient besoin de bien plus qu’une gardienne ou une nounou. Sa plateforme aide désormais les gens à trouver des personnes qui font des ménages, accompagnent des personnes âgées ou prennent soin des animaux de compagnie.

Elle n’est pas la seule à voir une occasion dans le casse-tête de la conciliation travail-famille. Vicky Audet, qui vit dans la région de Granby, a justement eu l’idée de mettre sur pied son service de cuisine à domicile après avoir donné un coup de main à une amie qui venait d’avoir un bébé et qui se sentait dépassée.

« Je lui ai dit : “Laisse-moi entrer dans ta cuisine pendant un après-midi, dis-moi ce que tu veux manger et tu me diras ce que tu en penses”. Elle m’a dit : “Moi, j’aimerais ça que tu reviennes ici toutes les semaines”, raconte la jeune cuisinière derrière La fille au fourneau, son entreprise. Il y a beaucoup de gens qui aiment cuisiner dans ma clientèle […], mais ils n’ont plus le temps. »

Prendre de l’avance

Vicky Audet propose de prendre d’assaut une cuisine pour faire les plats choisis au préalable avec ses clients. Lors d’une visite, elle concocte en moyenne de trois à cinq repas, qui seront gardés au frigo ou mis au congélateur. « Ça nous avance pas mal dans la semaine et ça nous permet de faire nos activités », explique Kim Petit, cliente de Vicky Audet.

À ses yeux, les plats cuisinés par « la fille au fourneau » sont « bien meilleurs pour la santé » que les repas préparés vendus à l’épicerie ou par un traiteur. En plus, la cuisinière s’adapte aux besoins de sa famille végétalienne et s’assure d’exploiter au maximum le contenu du frigo. « Ça permet de moins gaspiller », estime-t-elle.

Éviter le gaspillage est aussi l’un des objectifs de SOS Cuisine, service cofondé par Cinzia Cuneo. Son site propose entre autres d’évaluer les rabais dans les épiceries et propose des recettes en conséquence, pour en profiter au maximum. « Toutes les semaines, on envoie un menu convenant aux besoins du client, la liste d’épicerie qui lui dit où aller en fonction des lieux qu’il fréquente », explique-t-elle.

Gérer les devoirs

L’aide au ménage, Ysabel Gauvreau se l’offre depuis plus d’une dizaine d’années. Ce qui, plus récemment, a changé sa vie – et celle de ses enfants –, c’est l’embauche d’une tutrice pour ses enfants, tous deux aux prises avec des troubles d’apprentissage. « Les écoles ne sont pas toutes bien équipées en orthopédagogie », explique-t-elle. Alors, tous les dimanches, une universitaire fait les devoirs et les leçons avec son adolescente et son jeune fils.

Ce qu’elle apprécie le plus ? Le contact entre ses enfants et la tutrice (quand ça clique, « ça change tout », dit-elle) et les stratégies d’enseignement efficaces, parfois même amusantes. « On a vu un gros changement dans les résultats scolaires et la compréhension de la matière », se réjouit la maman.

Ces mères ont-elles eu des scrupules à demander de l’aide ? Parfois, mais pas longtemps. « Je ne peux pas tout faire, je ne peux pas être partout. Il faut lâcher prise », tranche Alexandra Oakley. Jade Bérubé dit que ses scrupules ont disparu très vite par rapport à l’aide au ménage, au traiteur à l’école et aux plats que sa propre mère prépare pour sa fille et elle.

« Il y a des femmes qui s’épanouissent dans la maternité. Pas moi, pas dans cette maternité-là », dit-elle. Se libérer de la partie domestique de la maternité lui permet, selon elle, d’être encore une meilleure mère.

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