Vin orange

La nouvelle couleur du vin

Parfait pour l’automne, le vin « orange » s’accorde avec toutes les cuisines, ou presque. Sa couleur, sa texture, ses arômes sont déroutants ou enchanteurs, mais ne laissent personne indifférent. Nous avons visité les domaines phares du Frioul-Vénétie Julienne, région du nord-est de l’Italie où la renaissance du vin ambré a eu lieu.

TEXTES ÈVE DUMAS ET PHOTOS ROBERT SKINNER

Au pays du vin orange

Oslavia, — Italie — Dans le milieu du vin naturel, il est actuellement plus facile de nommer les domaines qui ne font pas de vin orange que ceux qui en font ! À Montréal, des dizaines de restaurants en ont sur leur carte. Même la SAQ s’apprête à leur faire plus de place sur ses tablettes. La plupart de ces vins proviendront du Frioul, berceau du vin orange « moderne ».

On appelle le Collio ce territoire italo-slovène où les vignerons Josko Gravner, Stanko Radikon et Dario Princic ont relancé la pratique de la macération pelliculaire. Le vin orange, ce n’est pas plus compliqué que ça. C’est un blanc macéré avec les peaux du raisin, comme on le fait pour le rouge. Pour les blancs « conventionnels », le raisin est rapidement pressé et les peaux, éliminées.

L’enveloppe du raisin relâche pigments et tannins dans le jus, lui donnant une couleur beaucoup plus soutenue, qui variera du jaune ambré à l’ocre profond, en fonction du cépage, de la durée de la macération (qui peut varier de cinq jours à… un an !), de l’élevage, de l’oxydation volontaire, de l’âge du vin, etc.

Même si les projecteurs se braquent maintenant sur le Caucase (Géorgie, Arménie), où l’on a récemment découvert que la tradition du vin ambré perdure depuis des milliers d’années – 8000, affirment certains historiens –, on peut affirmer que c’est grâce au Collio si elle fait un grand retour.

Sur les routes sinueuses de ce vignoble vert et vallonneux, on croise des œnophiles locaux ou de l’Autriche voisine, puis des vignerons venus d’aussi loin que l’Australie pour en apprendre plus sur la macération pelliculaire. Il faut fixer un rendez-vous pour avoir accès aux petits domaines où on travaille dur. Disons que ce n’est pas la vallée de Napa, avec ses visites guidées en autobus et ses salles de dégustation grandioses.

Là où tout a commencé

Le vrai de vrai berceau du vin orange moderne est le village d’Oslavia, balayé par la bora, ce vent frais du nord-est, et ancré dans la ponka, un sol friable fait d’argile comprimée. C’est là qu’habitent, à moins de cinq minutes les uns des autres, Gravner, Radikon et Princic.

« À gauche, là-bas, ce sont les vignes de Dario », pointe Sasa Radikon, en nous montrant une de ses parcelles, aménagée en belles grandes terrasses.

Sasa est le fils du bien-aimé Stanko, mort d’un cancer en septembre 2016. Sa sœur, Savina, a des jumeaux avec un des fils de Princic. Alexis Paraschos, d’un autre excellent vignoble voisin, a fait les 400 coups avec Sasa et Miha Gravner. Ce dernier a perdu la vie en 2009, à l’âge de 27 ans, dans un accident de motocyclette. Les larmes coulent encore, à Oslavia, mais le vin continue de se faire et, tranquillement, ce sont les enfants qui reprennent les domaines.

Changement radical

Tant chez les pionniers Josko Gravner et feu Stanko Radikon que chez leur ami et émule Dario Princic, on faisait du vin blanc « comme tout le monde », jusque dans les années 90. C’était le règne de l’inox et des variétés internationales, comme le chardonnay, le sauvignon, le merlot, etc.

Au terme d’un voyage en Californie, Josko Gravner a fait un constat déprimant : tous les vins goûtaient la même chose. Y compris les siens. Un voyage subséquent, en Géorgie cette fois-ci, l’a convaincu de changer sa manière de travailler. Progressivement, les amphores ont remplacé le bois et l’inox. Il possède aujourd’hui une quarantaine de ces grands récipients ovoïdes, enterrés dans la cave fraîche.

M. Gravner a donc entrepris de trouver sa propre expression en 1997. Puis, au fil du temps, les macérations se sont faites de plus en plus longues, de même que les élevages. Depuis 2007, les vins n’arrivent sur le marché qu’après sept ans. Le jus passe de sept à huit mois sur les peaux. On presse doucement et le vin est retourné en amphore, sans les peaux, pour encore cinq mois. Après, il passe six ans dans des foudres de chêne de Slavonie. Un peu de soufre à la mise en bouteille est le seul ajout que le vigneron se permet.

« Pour arriver au résultat souhaité, j’ai minimisé les interventions, dépouillé ma manière de travailler », explique-t-il.

« La plus haute évolution, c’est de revenir à la plus grande simplicité. »

—  Josko Gravner, vigneron

« L’amphore enterrée permet de ne pas contrôler la température de manière artifitielle. Je ne filtre pas le vin. Je ne colle pas non plus. Lorsqu’on enlève toutes les bactéries, les enzymes, les levures, le vin est beaucoup moins digeste », explique le vigneron.

Au fil du temps, le puriste a même arraché ses vignes de chardonnay, de sauvignon, de riesling et de pinot gris pour ne planter que de la ribolla gialla, cépage indigène de la région. En rouge, il a opté pour le pignolo. « Mais si c’était à refaire, je ne planterais que de la ribolla, nous a-t-il confié. Pour réussir la meilleure expression d’un cépage, il faut se concentrer sur un seul. La ribolla pousse ici depuis presque 1000 ans. »

Autres approches

Contrairement à leur voisin Gravner, Stanko et Sasa Radikon n’ont pas arraché les cépages internationaux de leurs précieux vignobles. « Si on veut être comparé aux vignerons internationaux, c’est bien de montrer qu’on est capable de faire du bon vin avec les mêmes cépages qu’eux. Pourvu qu’ils soient adaptés à notre terroir », croit Sasa.

Au milieu des années 90, Stanko Radikon trouvait lui aussi que ses vins manquaient de caractère. En 1995, il a donc décidé de fermenter la moitié de sa vendange de ribolla gialla en levures indigènes, avec les peaux. Il a également fini par proscrire l’ajout de soufre. Parce que l’acidité volatile est souvent élevée, dans les vins de Radikon, certaines bouteilles peuvent être difficiles d’approche. Mais quel intense plaisir lorsque les nectars révèlent leur pleine expression !

Quant à Dario Princic, il a commencé la macération pelliculaire en 1999, après avoir vu ce que faisaient ses amis Stanko et Josko. « À côté des leurs, les vins conventionnels goûtaient le Coca-Cola ! », déclare le « Mick Jagger du vin », comme l’appelle sa bru, Savina Radikon. « Je n’aimais plus mes propres vins. Alors on a recommencé à faire le vin comme il était il y a 100 ans, mais meilleur encore ! Les Italiens n’y ont rien compris. Mais les Français, les Japonais, les Anglais, ils ont adoré. »

Si les vins du trio font aujourd’hui l’objet d’un culte, c’était en effet loin d’être le cas au début. Les vins blancs et rouges du domaine de Josko Gravner se portaient très bien, avant le changement radical de style. « Mon père n’avait rien expliqué de sa transition, raconte sa fille Mateja, responsable du marketing. Ce fut un échec total. À la fin des années 90, un journaliste important écrivait “Josko, reviens à tes anciennes méthodes !” »

Puis, ce qui semblait d’abord être une folie passagère est devenu un mouvement mondial. Aujourd’hui, dans les zones frioulanes du Collio et du Carso, ainsi qu’en Slovénie et en Croatie, la majorité des vignerons pratiquent la macération pelliculaire. En Toscane, en Sicile, en Loire, en Bourgogne, en Alsace, en Espagne, en Autriche, en Allemagne, en Australie, en Nouvelle-Zélande, en Californie, au Vermont et même en Ontario et au Québec, entre autres, des maisons expérimentent cette ancienne méthode revenue au goût du jour.

Chez les vignerons qui refusent presque toute intervention sur le vin, la macération a aussi ses avantages. Plusieurs d’entre eux ont réalisé qu’elle agissait comme accélérateur de fermentation, les levures se trouvant sur les peaux s’ajoutant à celles qui colonisent le chai. Cela permet donc d’obtenir systématiquement un vin sec, les levures plus nombreuses et actives digérant aisément tous les sucres du moût. Bourrés d’antioxydants, les peaux et leurs tannins protègent également le vin.

À la mode, les blancs de macération trouveront éventuellement leur juste place dans le monde du vin. Affirmer qu’on n’aime pas le vin orange, c’est un peu comme dire qu’on n’aime pas le rouge, le blanc ou le rosé. C’est possible, mais c’est peu probable, avec la variété de styles existants. Il suffit de trouver le sien !

Des vignerons à découvrir

Dans le Frioul, les vins blancs de macération ne déstabilisent plus personne et tous les domaines artisanaux en produisent. On trouve aussi beaucoup de rebula et de malvasija « orange » de l’autre côté de la frontière, en Slovénie. Nous vous présentons encore quelques vignerons à découvrir.

Alexis Paraschos

Les vins orange de Paraschos étaient parmi les premiers à arriver à Montréal, en 2012, grâce à l’agence Ward & associés. Le Québec serait aujourd’hui le marché le plus important du domaine de San Floriano. C’est le fils aîné, Alexis, qui en mène le plus large au domaine. Il s’occupe du vignoble et du chai avec son père dans le plus strict respect de l’environnement et de l’intégrité du vin.

Seuls des traitements naturels sont appliqués à la vigne. Le vin est on ne peut plus « nu », sans ajout de soufre depuis des années. Ici, tant la ribolla gialla que le tokay friulano, le pinot gris, le sauvignon et la malvasia sont macérés. « Un autre vigneron m’a montré un manuel du XVIIIe siècle où on recommandait de deux à huit jours de macération pour que le vin "goûte meilleur et dure plus longtemps" », raconte Alexis, qui pratique lui-même des macérations plutôt courtes.

Il nous parle aussi de la bora, ce vent du nord qui souffle sur le sud du Collio, rendant le climat plus frais et les vins plus acides, tranchants et verticaux qu’ailleurs dans le Collio. Installé à San Floriano, aussi réputé pour ses cerises, Alexis travaille fort à encourager les agriculteurs de son village à cultiver en bio et à garder le raisin dans la région, plutôt que de le vendre à des producteurs plus commerciaux. « Ce sera sans doute plus facile avec les jeunes de ma génération », ose-t-il espérer. La cuvée Orange One a fait son apparition sur les tablettes de la SAQ il y a deux semaines.

Paolo Vodopivec

Voici un vigneron au potentiel « culte ». Il peut rappeler Josko Gravner dans sa recherche de la plus pure expression de son coin du monde et travaille exclusivement avec le cépage local, la vitovska. Ses vins ont la même finesse que ceux du maître de la ribolla. Plusieurs amateurs clament que la vitovska de Vodopivec ressemble à de la « grande Bourgogne ». Les vins sont d’ailleurs beaucoup plus dorés qu’orange.

Contrairement au Collio, juste au nord, le Carso est rocailleux, aride, avec des paysages beaucoup plus bruts. La couche supérieure du sol, très mince et rouge, est particulièrement ferreuse. Ici, les vignes sont souvent plantées en pergola, ce qui, traditionnellement, permettait de planter d’autres cultures en dessous. Paolo a tout sorti de terre et replanté en « albarello » (chandelier), à très haute densité. Ainsi, les racines n’ont d’autre choix que de s’enfoncer verticalement dans le roc pour trouver de l’eau et puiser un maximum de minéralité.

La cave est un chef-d’œuvre. « Les vins ont besoin d’une maison tranquille et silencieuse », croit-il. Il a construit cette calme demeure en « 8 », avec une vingtaine d’amphores enterrées dans la première pièce ronde et des foudres en chêne dans la deuxième. Les macérations durent de quelques semaines à six mois et les élevages sont longs, si bien que les bouteilles atteignent le marché lorsqu’elles ont en moyenne cinq ans.

Les vins de Paolo Vodopivec sont représentés par Primavin et actuellement vendus en commande privée (entre 60 et 70 $ pour le millésime courant, selon la cuvée).

Uros Rojac

Nous voici du côté slovène, au sud de Trieste, près de la station balnéaire d’Izola, où se tient d’ailleurs l'Orange Wine Festival. Uros Rojac a grandi dans le vignoble familial, à 250 m au-dessus du niveau de la mer. À sa sortie de l’école, en 2005, son père est mort. Il a fallu se retrousser les manches et prendre la relève plus tôt que prévu, avec son frère à l’administration. Le domaine serait le premier à avoir obtenu une certification biologique, en 2004, dans la partie sud de la Slovénie.

Conscient du potentiel, le gouvernement slovène subventionne le bio. Ici, l’accent est mis sur les cépages refosco (rouge) et malvazija (blanc et orange). La macération dure « deux lunes », avec peu d’interventions manuelles. Un des secrets d’Uros : retirer les peaux contaminées au bout de quelques jours, pour éviter les déviances. Ses vins sont d’ailleurs très droits et raffinés. Ici aussi, un vent frais souffle, ce qui permet aux vins de conserver une belle acidité. Sa malvazija en macération est un magnifique bouquet de fleurs et de feuilles séchées.

Uros Rojac est un exemple de la vitalité du vignoble slovène, plus précisément celui de l’Istrie slovène, tout comme l’est Uros Klabjan, du village voisin d’Osp. La vallée de Vipava compte également d’excellents domaines, comme ceux de Batic, de Slavcek et de Burja, entre autres.

Les vins de Rojac, Klabjan et Batic sont représentés par Vadim Fonta. vadim.fonta@gmail.com, 514 261-2886

Comment boire le vin orange ?

Il n’y a pas un seul et unique vin orange. Comme pour les blancs non macérés et les rouges de tout acabit, le résultat varie énormément selon le cépage, la provenance, le temps de macération, la durée de l’élevage, etc. Cela dit, il est quand même possible de dégager quelques recommandations de service et d’accords.

Alexandre Boily, sommelier et copropriétaire de l’agence d’importation Ward & associés, suggère de séparer les vins orange en deux catégories : nord et sud.

Au nord, des pays et régions comme l’Autriche, le Canada, l’Oregon, le nord de l’Italie, la Loire.

Au sud, l’Espagne, la Sicile, la Californie, l’Australie, l’Afrique du Sud, le sud de la France, etc.

Plus ils expérimentent, plus les vignerons des régions chaudes réalisent que les longues macérations sur les vins blancs font augmenter le pH du vin, générant plus d’acidité volatile (qui, au nez, se reconnaît aux arômes de solvant) et augmentant le risque de mauvaises bactéries. Les macérations ont donc tendance à devenir de plus en plus courtes (de 5 à 10 jours), dans le sud. Quelques exceptions demeurent, cependant, comme le Frioul et la Géorgie, où les très longues macérations sont traditionnelles.

Les vins du sud s’accordent particulièrement bien avec les cuisines assorties. Pensez Méditerranée, Moyen-Orient, voire Inde et autres plats complexes en épices, comme des tagines, des caris, des trempettes muhammara et baba ghanouj. Quand les vins ont une forme d’acidité volatile, on peut, étonnamment, les servir sur des préparations vinaigrées. Enfin quelque chose qui se marie bien avec la salade.

« Avec une fattouche, par exemple, c’est fou ! »

— Alexandre Boily, sommelier et copropriétaire de l’agence d’importation Ward & associés

Le sommelier donnait justement un atelier sur les blancs de macération au bar à vin Chez Lavigne, l’hiver dernier.

Dans les pays plus nordiques, on peut se permettre de laisser les jus en contact avec les peaux beaucoup plus longtemps, constatent les spécialistes. Ces vins souvent plus vifs fusionnent avec les légumes racines, les courges, les champignons, le poulet rôti, le porc, les marrons, etc.

En ce qui concerne la température de service, on recommande souvent qu’elle se situe entre celle d’un blanc et celle d’un rouge. Ni trop froid ni trop chaud. On voudra passer en carafe les vins orange plus tanniques. Si le dépôt dans la bouteille est fin, il est possible de le remettre en suspension dans le jus, pour la texture. S’il y a une grosse masse au fond de la bouteille, mieux vaut l’y laisser !

Cinq bouteilles pour l’apprivoiser

S’il y en a des centaines en circulation au Québec, dans les restaurants et en commande privée, les vins orange ont vraiment tardé à entrer à la SAQ. Seules trois cuvées confidentielles étaient offertes : la ribolla gialla de Radikon (épuisée) et, sur les tablettes actuellement, la cuvée Ageno du domaine La Stoppa et Rami, de l’Azienda Agricola COS.

On peut comprendre le défi de commercialisation. Imaginez la surprise du client qui croit acheter un vin blanc et verse un liquide couleur orangeade dans son verre ! Cet automne, le monopole s’ouvre néanmoins un peu plus aux vins de macération pelliculaire et proposera, d’ici Noël, des cuvées frioulanes de Gravner, Princic, Paraschos, Zidarich et Il Carpino, ainsi qu’un pinot gris du domaine autrichien Meinklang. Nous vous en présentons cinq, que vous trouverez vraisemblablement dans la section des vins blancs. Arrivages à avoir à l'œil.

Paraschos, Orange One 2014,

12,5 % d’alc./vol., 750 ml, 28,70 $ (13304214)

Orange One est arrivé dans une douzaine de succursales de Montréal, Laval et Repentigny il y a deux semaines. Il s’agit d’un assemblage de tocai friulano, de ribolla et de malvasia. La couleur est particulièrement saisissante, presque fluo. Quand on met son nez dans le verre, ce n’est pas le Tang que l’on sent, mais une petite bouffée d’acidité volatile. En bouche, c’est un festival de sensations qui dérouteront à coup sûr les amateurs de vins plus classiques, mais enchanteront les buveurs de vins naturels, voire de bières artisanales : un peu acétique, un peu tannique, avec une touche d’amertume. C’est très « picolable » pour ceux qui aiment. Côté arômes, il est encore un peu timide. On n’est pas dans le registre des pêches ou des abricots, mais plutôt dans celui de la cerise jaune. Après un repos de quelques mois au cellier, il sera sûrement plus porté à s’ouvrir.

Gravner, Ribolla 2007 et Bianco Breg 2007,

autour de 100 $ la bouteille

La ribolla est le cépage phare du Collio. Fruit à la peau épaisse et à la chair plutôt neutre, il ne trouverait sa véritable complexité qu’en macération, selon plusieurs. Josko Gravner fait des vins plutôt austères. Ces nectars au long cours ont passé un an en amphore, six ans en foudre et au moins un an en bouteille. On voudra leur donner un peu d’air et de temps en les ouvrant d’avance, en les carafant et en les buvant tranquillement, en mangeant. Et c’est plus vrai encore pour la timide ribolla que pour le plus expressif Bianco Breg, un assemblage de riesling italico, de pinot grigio, de sauvignon et de chardonnay qui goûte l’orange amère, l’abricot séché, le safran. Le millésime 2012 sera le dernier du Breg, puisque les vignes qui servaient à le faire ont été arrachées. Le vigneron veut se concentrer sur la ribolla, qui donne chez lui un vin très racé, avec un petit côté herbes séchées et une amertume affirmée. Ce sont des vins de gastronomie et de recueillement.

Radikon Ribolla Gialla 2008, 13,75 % alc./vol., 500 ml, 42,75 $ (12493121) (pas en stock actuellement)

La ribolla gialla 2008 de Radikon était offerte à la SAQ cet été, mais les bouteilles de 500 ml se sont rapidement vendues. Il faudra attendre le prochain arrivage ou dénicher une petite quille dans un restaurant pour y avoir accès cet automne. Cela dit, le restaurant n’est pas toujours le meilleur contexte pour découvrir Radikon. Les vins nécessitent eux aussi un bon carafage et du temps. Ils sont puissants et rustiques, avec presque toujours une pointe (ou un poing !) d’acidité volatile au nez. Certains assemblages, comme l’Oslavje (chardonnay, pinot gris et sauvignon blanc), peuvent être très charmeurs. Ce sont des vins changeants, imprévisibles, vivants ! En temps d’arrivages, les autres cuvées de Radikon peuvent s’acheter en commande privée, chez Oenopole.

Princic, ribolla gialla 2014, 57 $

Les macérations sont beaucoup plus courtes chez Dario Princic que chez Gravner et Radikon. L’excentrique vigneron travaille dans le bois, comme Radikon, et non en amphore. Il a même commencé à se faire fabriquer des fûts avec les essences de bois locales : acacia, châtaignier et chêne. Princic a expérimenté plusieurs durées de macération, entre 4 et 75 jours, et s’est arrêté à 8 pour son cépage fétiche, le pinot gris, et à une trentaine pour les autres. Le millésime 2014 a été difficile dans le Collio, avec du temps frais, des pluies excessives et même de la grêle. Au nez, cette ribolla est plutôt timide. En bouche aussi. Sa trame tannique un peu serrée finit par s’assouplir après quelques heures en carafe et laisse s’exprimer un côté thé noir et caramel. D’autres cuvées de Princic peuvent actuellement être achetées en commande privée, auprès de l’agence Boires.

Zidarich, vitovska green 2015, autour de 30 $

Le cépage local du Carso, la vitovska, a longtemps été snobé par les vignerons du coin, qui l’estimaient trop simple. Dans le vignoble de Benjamin Zidarich, c’est le cépage blanc dominant, avec un peu de malvasia et de sauvignon blanc. Tout est vinifié dans une cave exceptionnelle, qui descend à 20 m de profondeur dans le roc. Le vigneron expérimente même avec une cuve en pierre du Carso, pour la macération de 18 jours de sa cuvée haut de gamme, Kamen. L’étiquette verte correspond pour sa part au vin d’entrée de gamme. Elle sied bien à ce jus très frais, tranchant, délicatement floral. C’est fort probablement le vin orange le plus accessible du lot. Une excellente entrée en matière. Pour les autres cuvées de Zidarich, il faut contacter l’agence Vinealis.

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