Cyclisme sur piste

Une médaille de bronze, mais une course en or

RIO DE JANEIRO — C’était une course pour la médaille de bronze. Les quatre filles de l’équipe canadienne de poursuite sur piste disputaient la petite finale. Mais en réalité, elles ont mené hier une course en or. Une chevauchée d’enfer qui se voulait un message aux reines de la discipline, britanniques et américaines : nous serons là à Tokyo dans quatre ans.

C’était aussi la consécration de Georgia Simmerling, caméléon du sport. L’athlète de Vancouver avait déjà participé à deux Jeux olympiques, dans deux sports différents : en ski alpin (super-G) à Vancouver et en ski acrobatique (skicross) à Sotchi. Hier, elle gagnait sa première médaille olympique en cyclisme.

« Je suis sans voix, c’est incroyable d’être ici avec ces filles qui m’ont tout appris et de remporter le bronze », a lancé Simmerling, qui s’est jointe à l’équipe l’automne dernier seulement. Elle est la première athlète canadienne à participer à des Jeux olympiques dans trois disciplines différentes.

L’aventure des Canadiennes à Rio a commencé jeudi lors de la course de qualification. Ou plutôt, tout a commencé à Londres, il y a quatre ans, quand la petite équipe, négligée, a remporté le bronze. La formation a depuis aligné les bons résultats. Elle se pointait à Rio en favorite pour le podium.

Mais jeudi, dans le vélodrome flambant neuf de Rio, les Canadiennes ont trébuché. Elles ont fini quatrièmes des qualifications. Ce n’était pas ce qu’elles espéraient. Ce résultat les envoyait affronter, lors de la ronde suivante, les Britanniques, reines incontestées de l’épreuve et championnes olympiques en titre.

Hier matin, les Canadiennes ont donc couru une demi-finale. Les Britanniques ont établi un record du monde. L’équipe canadienne, elle, a été battue, mais a réussi le troisième temps parmi les huit équipes, juste derrière les Américaines.

Les Canadiennes devaient faire une croix sur l’or. Mais elles se qualifiaient pour la petite finale. Elles allaient affronter les Néo-Zélandaises pour le bronze.

Avant cette course pour la médaille, les coureuses canadiennes – Georgia Simmerling, Jasmin Glaesser, Allison Beveridge et la Montréalaise Kirsti Lay – ont eu les nerfs à vif.

« Ç’a été une inspiration incroyable de voir soir après soir des Canadiennes sur les marches du podium à Rio. Mais j’avoue que pour nous, ça a mis la barre très haut. Ça nous a mis la pression », a admis Jasmin Glaesser, seule rescapée de l’équipe médaillée à Londres.

Une quatrième place aurait été une déception. À ce propos, il n’y avait aucun doute.

UN PROGRAMME SUR UNE LANCÉE

Il était 17 h à Rio quand les Canadiennes et les Néo-Zélandaises ont pris le départ. Quatre cyclistes de chaque côté de la piste inclinée, qui roulent 4000 m en peloton et tentent de franchir la ligne d’arrivée le plus vite possible. Le tout couru à des moyennes frôlant les 60 km/h.

Dès le premier tour, les Canadiennes ont pris une seconde d’avance sur leurs rivales. Puis elles ont creusé cette avance à chaque tour de piste, se relayant en avant pour fendre l’air. Au final, elles ont mis 4 minutes 14,627 secondes pour franchir la ligne d’arrivée, quatre secondes devant leurs rivales. Elles remportaient la médaille de bronze.

« On avait beaucoup de pression, absolument. On savait qu’on pouvait gagner l’or en venant ici. Ce n’est pas tant une pression de l’extérieur ; nous-mêmes, nous nous mettions beaucoup de poids sur les épaules », a dit Kirsti Lay, qui a longtemps pratiqué le patinage de vitesse avant de se lancer dans le cyclisme sur piste. Elle est, pour la petite histoire, mariée avec Mathieu Giroux, médaillé olympique en patinage de vitesse.

« Notre programme n’en est qu’à ses débuts. Craig Griffin, notre entraîneur, est arrivé il y a seulement quatre ans et on commence à peine à en récolter les bénéfices. Je pense vraiment qu’à Tokyo on sera fortes. »

— Kirsti Lay

Sur les côtés de la piste, le directeur de la haute performance chez Cyclisme Canada, Jacques Landry, savourait la médaille. Mais il ne le cachait pas : le temps est venu pour cette équipe de poursuite de monter plus haut sur le podium.

« Dans les prochaines années, on va être en recherche de profondeur. On espère que cette médaille va encourager des filles à entrer dans le programme, a-t-il expliqué. Pour les quatre prochaines années, on va travailler fort pour être capables d’aller chercher l’or ou l’argent à Tokyo. »

Landry cite aussi le tout nouveau vélodrome construit pour les Jeux panaméricains à Milton, en banlieue de Toronto, qui sert de centre d’entraînement national. « Ça aussi, ça va nous aider », a-t-il dit.

Quelques minutes après la course, les Britanniques ont de nouveau gagné l’or, devant les Américaines. La course a eu lieu à un train d’enfer. Avec un temps de 4 minutes 10,236 secondes, les reines de la poursuite abaissaient encore la marque mondiale.

La Montréalaise Kirsti Lay regardait ça aller. « Le 4 minutes 10 secondes est encore un peu hors de notre portée pour l’instant, mais ça ne veut pas dire qu’on n’y parviendra pas dans l’avenir », a-t-elle prévenu.

Hier, avec cette course, les Canadiennes ont lancé un message à celles qui ont fini en haut sur le podium. À Tokyo, elles ne seront pas à prendre à la légère.

Ce texte provenant de La Presse+ est une copie en format web. Consultez-le gratuitement en version interactive dans l’application La Presse+.