Noël sans se ruiner

Il ne faut pas se leurrer (ou espérer un miracle) : Noël, ça coûte cher. Y a-t-il moyen de célébrer à son goût sans pour autant y laisser sa chemise ? À deux semaines et des poussières du grand jour, Pause vous propose une série de conseils pour dépenser moins pendant les Fêtes.

un dossier de Catherine Handfield

Noël, cette fausse « dépense surprise »

C’est comme ça chaque mois de février. Les gens ont reçu leur compte de carte de crédit pour le mois de décembre. La date limite pour le paiement approche, mais ils n’ont pas les liquidités pour le faire. Souvent en panique, beaucoup vont chercher conseil auprès d’associations de consommateurs.

« Quand les cartes de crédit rentrent, après le temps des Fêtes, ici, c’est bondé de gens », souligne Hélène Hétu, consultante budgétaire à l’Association coopérative d’économie familiale (ACEF) Rive-Sud de Montréal, organisme qui offre des services en matière de budget, d’endettement et de consommation. « C’est une très grosse période pour toutes les associations de consommateurs. »

Le temps des Fêtes coûte cher. Avec la rentrée, c’est l’une des deux périodes de l’année ayant le plus d’impact sur le budget des ménages, note Sylvie De Bellefeuille, avocate et conseillère budgétaire et juridique chez Option consommateurs.

Il y a les cadeaux qu’on offre à ses proches. Les cadeaux d’hôtes, les bouteilles de vin qu’on apporte en visite et l’alcool en général. Il y a aussi la facture d’épicerie, qui grimpe de façon exponentielle lorsqu’on reçoit. C’est sans compter les habits chics, les sorties (ski, cinéma…) pour divertir les enfants en congé, les virées au restaurant, les soldes de l’après-Noël dont-on-ne-peut-se-passer…

Selon un sondage mené pour le Conseil québécois du commerce de détail, les ménages prévoient dépenser 658 $ pour leurs achats des Fêtes cette année : 388 $ pour les cadeaux et 270 $ pour les autres dépenses (repas, alcool, etc.).

« Le gros problème, souvent, avec la période des Fêtes, c’est qu’on ne la prévoit pas dans le budget. »

— Sylvie De Bellefeuille, conseillère budgétaire

« Ça devient un peu comme une dépense surprise. Alors que dans la réalité, on ne va pas se leurrer : ce n’est pas une dépense surprise. Noël, ça revient chaque année. Et c’est toujours la même date », poursuit Mme De Bellefeuille.

Il est difficile d’échapper totalement à la folie du temps des Fêtes, souligne Fabien Durif, professeur au département de marketing de l’École des sciences de la gestion de l’Université du Québec à Montréal (ESG UQAM) et directeur de l’Observatoire de la consommation responsable.

L’équipe de Fabien Durif a réalisé plusieurs études pour vérifier si le consommateur variait ses pratiques quotidiennes dans les périodes de surconsommation, comme le temps des Fêtes. Sans surprise, souligne M. Durif, oui, les gens varient leurs pratiques. Même les consommateurs les plus responsables au quotidien (dans leurs pratiques de non-achat, d’achat et de post-achat) demeurent influencés, quoique dans une moindre mesure.

Pourquoi est-ce si difficile de résister ? « C’est vraiment les stimulus, répond Fabien Durif, qui évoque le son dans les magasins, les couleurs, l’affichage… Ces stimulus amènent une émotion, une excitation au niveau de la consommation de l’individu, un état différent de l’état classique. Cela fait en sorte qu’on sort de son quotidien. »

Et il est normal, dit-il, d’avoir du mal à demeurer toujours cohérent. « Il ne faut surtout pas culpabiliser le citoyen, car on lui demande énormément… »

Solution : budget

N’empêche, il y a des moyens pour s’aider à dépenser mieux et à dépenser moins. Faire ses achats de Noël à l’avance permet justement d’être moins exposés aux stimulus de surconsommation, souligne Fabien Durif, qui précise que les consommateurs s’y prennent d’ailleurs de plus en plus tôt.

Mais pour réduire ses dépenses dans le temps des Fêtes, LA meilleure solution demeure de faire un budget, confirment Hélène Hétu et Sylvie De Bellefeuille. On peut le faire en septembre, après la rentrée scolaire, ou – mieux encore – dès le mois de janvier.

« Noël, combien ça vous a coûté l’année passée ? Ou combien pensez-vous que ça vous coûtera cette année ? Faites une liste. »

— Hélène Hétu, consultante budgétaire

Pour les cadeaux, au lieu d’inscrire une somme globale, on écrit une somme pour chaque cadeau. On calcule le montant total que Noël devrait nous coûter, et chaque mois, on met de l’argent de côté (dans un compte d’épargne ou dans une enveloppe) pour atteindre cette cible.

Si le temps des Fêtes vous coûte trop cher année après année, si ça vous stresse, si votre façon de faire s’éloigne de vos valeurs, peut-être devriez-vous prendre le temps de réfléchir à tout cela, estime Hélène Hétu. L’ACEF Rive-Sud offre d’ailleurs un atelier intitulé « Noël autrement, pourquoi pas ? » dans différents organismes pour susciter cette réflexion. « L’opération réflexion est importante, estime Mme Hétu. Il faut s’affirmer et avoir confiance en soi. »

« On est dans une société de consommation, on veut toujours avoir les nouveaux gadgets. Je pense que c’est une période où il pourrait être opportun de se poser des questions. Est-ce qu’on a besoin toujours de s’acheter des cadeaux tout le temps pour tout le monde ? De grâce, ne vous endettez pas pour faire plaisir à vos proches », dit Sylvie De Bellefeuille, qui rappelle que Noël est avant tout une période pour partager de bons moments avec ses proches.

Au chapitre de la consommation responsable, Fabien Durif constate une évolution des mentalités au cours des dernières années. « De plus en plus, il y a une réflexion, dit-il. Finalement, pourquoi tous ces cadeaux ? On n’est plus dans le “tout acheter n’importe quoi”. »

Quelques conseils pour célébrer les Fêtes sans se ruiner

Se brancher sur ses besoins

Pour établir ses priorités financières pendant les Fêtes, il faut se brancher sur ses besoins. Cette dépense que vous prévoyez faire, « est-ce un besoin, un désir ou un luxe ? résume Hélène Hétu. Pour ça, il faut se connaître comme personne, comme consommateur ».

Impliquer ses proches

Quand on veut célébrer Noël plus simplement, la première chose à faire, c’est d’en parler à ses proches, de les impliquer, de les inviter (s’ils le souhaitent) à se joindre au mouvement, conseille Hélène Hétu. « Si on ne les informe pas à l’avance des changements qu’on veut faire, ça peut créer des malaises. »

Y aller par étapes

Si, une année, vous offrez un pot de biscuits faits maison à votre frère alors que ce dernier est habitué à recevoir un cadeau à 200 $, ça pourrait mal passer. « On y va par étapes, suggère Hélène Hétu. On peut essayer de minimiser tout ça et mettre l’accent sur l’idée des cadeaux différents. »

Changer les cadeaux

Pour réduire le budget cadeaux, il existe une multitude de solutions : offrir des cadeaux faits à la main ou encore des services (gardiennage, etc.), procéder à un échange de cadeaux, fixer, en famille, des balises de prix, offrir des cadeaux aux enfants uniquement…

Opter pour l’occasion

Offrir des cadeaux de seconde main est une pratique en légère augmentation, souligne Fabien Durif, qui constate une certaine « déstigmatisation » du phénomène. Ça permet d’économiser, ça limite l’empreinte environnementale et ça nous tient éloignés de la cohue du temps des Fêtes.

Rester vigilant envers les soldes

Les soldes peuvent être une façon d’économiser, mais aussi une façon de dépenser, rappelle Sylvie De Bellefeuille. « Combien de fois on achète quelque chose juste parce que c’est en solde ? demande-t-elle. Des soldes, il y en a quand même à l’année. »

Recevoir dignement… à moindre coût

Vous recevez à Noël. Si vous êtes serrés financièrement, êtes-vous condamnés à adopter la formule du repas-partage ? Non : il est possible de ne pas bouder son plaisir de recevoir sans y laisser sa chemise. Voici les trucs de Marie-Michelle Garon, animatrice et coauteure des livres Beau, bon, pas cher et La croûte cassée.

Temps et organisation

« Oui, c’est absolument possible de recevoir à moindre coût, mais pour ce faire, il faut de l’organisation, nous dit d’emblée Marie-Michelle Garon. Parce que ce qu’on va économiser en argent, on va le dépenser en temps. » Plus vous achetez du tout préparé, plus c’est cher, résume-t-elle. « Les petites bouchées qu’on achète en entrée, c’est vraiment onéreux, et c’est souvent de moindre qualité que si on les fait soi-même », dit-elle. Il reste trois week-ends avant Noël. Lancez-vous donc dans la confection de chaussons aux épinards et de potages, que vous ferez congeler jusqu’au jour J. « Les chaussons, on n’a même pas besoin de les décongeler ; on les met au four et, tout de suite, ça se sert. »

Les viandes

On ne s’en sort pas : des carrés d’agneau, c’est cher. La bonne nouvelle, c’est qu’on peut opter pour des pièces de viande moins chères et les apprêter avec succès. Les viandes à mijoter (jarret, palette) sont plus abordables, tout particulièrement le porc. « Si vous faites un osso buco de porc plutôt qu’un osso buco de veau, c’est vraiment moins onéreux. Et honnêtement, au goût, bonne chance pour la personne qui va être capable de le distinguer », souligne Mme Garon. On évite d’acheter des cubes à ragoût, pas toujours adaptés à une cuisson lente. En général, les plats en sauce se congèlent sans problème. Au chapitre des viandes abordables, on trouve aussi la viande hachée, avec laquelle on peut faire des boulettes ou encore des raviolis won-ton.

Les poissons

Cuit au four et servi au centre de la table, le poisson entier impressionne la galerie à tout coût. « C’est super festif, c’est beau, et c’est ultra-simple à faire », résume Marie-Michelle Garon, qui conseille de faire affaire avec un bon poissonnier. Autre option : le ragoût de poisson, qu’on sert dans deux ou trois bols au centre de la table. « Il ne faut pas négliger les moules et les palourdes, souvent moins chères que le poisson en filet, fait remarquer Marie-Michelle Garon. Dans le ragoût de poisson, j’ai remplacé les pétoncles par des moules… Des pétoncles pour 15, ça revient vraiment cher, mais des moules, c’est bien ! Et je mets beaucoup de coquilles pour baisser un peu le prix… Parce que je suis une sale cheap ! [rires] »

les Légumes

À cette période-ci de l’année, les légumes « traditionnels » d’accompagnement (brocoli, fèves vertes, choux de Bruxelles…) sont chers. « Ma recommandation pour ce temps-ci de l’année, c’est de ne pas bouder les légumes racines, qui vont rester sensiblement moins chers et qui sont vraiment bons ! », dit Marie-Michelle Garon. Carottes rouges, orange et jaunes, courges, patates douces, oignons, pommes de terre… « On les coupe, on met de l’huile, du sel et du poivre et on les met au four. Et on les sert sur une longue assiette au centre de la table. C’est super beau ! » Parmi les légumes pas chers, le chou est difficile à battre. Une salade de choux rouge aigre-douce plaira autant aux yeux qu’au palais.

le Dessert

S’il y a un service dans un repas qui permet d’économiser lorsqu’on le fait soi-même, c’est bien le dessert, souligne Marie-Michelle Garon. « Les acheter, ça coûte une fortune », rappelle-t-elle. À part le beurre et la crème, les ingrédients plus onéreux sont le chocolat, les noix, les fruits séchés et les épices. « Pour ça, je conseille d’aller dans des places où vous avez du vrac », dit Marie-Michelle Garon. Cela permet d’acheter de petites quantités – donc moins de pertes et plus de fraîcheur. À Montréal, Épices Anatole (6822, boulevard Saint-Laurent) offre une variété étonnante. On peut même commander en ligne.

Recette d’osso buco

Tirée du livre Beau, bon, pas cher, Les Éditions La Presse

Osso buco de porc

Pour 4 à 6 personnes

Ingrédients

8 tranches d’osso buco de porc d’environ 5 cm (2 po)

45 ml (3 c. à soupe) d’huile

2 oignons, hachés

4 carottes, coupées en rondelles

1 branche de céleri, hachée

3 gousses d’ail, hachées

2,5 ml (1/2 c. à thé) de thym séché

45 ml (3 c. à soupe) de farine

125 ml (1/2 tasse) de vin blanc

1 boîte de 796 ml (28 oz) de tomates entières

375 ml (1 1/2 tasse) de bouillon de poulet

Sel et poivre, au goût

1. Allumez le four à 160 °C (325 °F).

2. Salez et poivrez les osso buco. Dans une cocotte, à feu moyen-vif, faites-les revenir dans l’huile jusqu’à ce qu’ils soient dorés, de 2 à 3 minutes de chaque côté. Comme il y a beaucoup de morceaux, procédez en deux étapes, en ajoutant de l’huile au besoin. Réservez la viande dans une assiette.

3. Baissez le feu à moyen et faites revenir les oignons, les carottes et le céleri de 2à 3 minutes. Salez et poivrez.

4. Ajoutez l’ail, le thym, la farine et mélangez. Versez le vin et raclez le fond de la cocotte à l’aide d’une cuillère en bois pour en décoller les particules de viande.

5. Ajoutez les tomates, le bouillon et mélangez. Remettez les morceaux de porc dans la cocotte. Couvrez et portez à ébullition.

6. Enfournez de 2 h 30 min à 3 h ou jusqu’à ce que la viande se détache facilement à l’aide d’une fourchette. Servez-la avec des nouilles ou une purée de légumes.

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