Cameron Porter

Loin des yeux, toujours près du cœur

Cameron Porter est une étoile filante dans l’histoire de l’Impact.

Il n’y a joué que 39 minutes en saison régulière et n’a effectué que sept apparitions, toutes compétitions confondues. Sauf que l’Américain de 24 ans est l’auteur du but miraculeux contre Pachuca, en Ligue des champions 2014-2015, que l’on peut certainement considérer comme le plus important de l’histoire du club.

Alors, quand l’ex-attaquant du Sporting Kansas City a annoncé sa retraite sur les réseaux sociaux, la semaine dernière, la quasi-totalité des réactions provenait de partisans de l’Impact. Le temps a passé, presque trois ans, mais l’affection des Montréalais est restée intacte.

« J’ai été extrêmement flatté par les choses gentilles et émouvantes que les gens ont écrites à propos de mon but et de l’émotion qu’il avait suscitée chez eux. C’est super de voir que cela a touché autant de gens, c’était puissant et assez inattendu », raconte-t-il au bout du fil.

L’histoire de Porter, c’est bien sûr celle de ce but inoubliable, mais c’est également celle d’un joueur qui n’aurait jamais dû se retrouver sur la pelouse du Stade olympique lors d’un quart de finale continental. Il avait été invité au camp d’évaluation de la MLS, deux mois auparavant, en raison de blessures subies par d’autres espoirs du repêchage. Et lors de la séance, il a été ignoré durant les deux premières rondes avant d’être choisi par l’Impact au 45e rang.

D’habitude, les joueurs sélectionnés si tard ne restent que quelques semaines avec leur équipe respective. Porter a non seulement décroché un contrat en étant la surprise du camp, mais il a vite gagné sa place sur le banc, puis dans le onze partant.

La belle histoire a cependant été aussi courte qu’intense. Après son exploit contre Pachuca, il n’a participé qu’à trois autres matchs avant de subir une déchirure ligamentaire au genou gauche. Cette mauvaise réception, sur le terrain artificiel du Revolution de la Nouvelle-Angleterre, a marqué le début de la fin pour le numéro 39.

« Oui, les choses auraient certainement pu être différentes. J’aurais aimé avoir d’autres moments comme mon but et être en mesure de contribuer au succès de l’équipe, mais je n’ai pas nécessairement de regrets en repensant à tout ça. Sur le coup, c’était dur et j’ai dû traverser une période difficile. Mais ce sont ces moments qui nous permettent d’apprendre, de grandir et de devenir qui nous sommes », philosophe Porter.

La saison 2015 a été fertile en images mémorables : l’épopée en Ligue des champions, l’arrivée de Didier Drogba, la remontée en fin de saison… En retrait, Porter a enchaîné les exercices au Centre Nutrilait afin de stabiliser son genou et de retrouver du tonus musculaire. En fin de compte, il n’a disputé qu’une poignée de matchs avec le FC Montréal, l’année suivante, et joué deux autres matchs avec l’Impact avant d’être échangé au Sporting en juillet 2016.

« Mis à part à l’université, Montréal est la première ville où j’ai vécu seul et elle aura toujours une place à part dans mon cœur. C’est là que j’ai appris le français. Ma copine vient de Paris et c’est grâce à [mon séjour à Montréal] que je peux lui parler en français », ajoute-t-il.

« J’aime vraiment Montréal et j’essaierai d’y revenir dès que je peux. »

— Cameron Porter

Au fait, le Kansas a-t-il été l’occasion d’un nouveau départ ? Pas tout à fait, puisqu’il n’y a joué que huit matchs. Une autre grave blessure – fracture du péroné et dommages aux ligaments de la cheville droite – a mis un terme à sa saison 2017. Et, on le sait désormais, à sa carrière…

« L’idée d’arrêter a traversé mon esprit quand j’ai subi cette blessure, car je ne savais pas si mon corps allait encore me permettre de jouer au niveau professionnel. D’ailleurs, je ne peux toujours pas, car j’ai encore besoin de réadaptation. D’un autre côté, il y avait tous les projets qui m’enthousiasmaient et que j’avais hâte de développer. Cet hiver, il est devenu évident que le temps était venu d’aller de l’avant. »

Double emploi

« Ce garçon est brillant. Il n’a pas besoin d’être ici, tu sais. » Voilà ce qu’a déjà glissé Frank Klopas à l’auteur de ces lignes tandis que le joueur se remettait de sa blessure au genou. Vrai que Porter n’était pas un joueur professionnel typique. Ses réponses ont toujours été réfléchies et limpides. À côté de Porter l’athlète cohabitait surtout Porter l’autoproclamé « nerd de Princeton ».

Au New Jersey, où il a obtenu un diplôme en science de l’informatique, le jeune homme était l’un des associés d’une entreprise appelée Ivy Research Council. À Kansas City l’an dernier, il a jumelé son rôle d’attaquant à celui d’ingénieur consultant en informatique pour MLS Digital. Impliqué au niveau du back-end, il donnait un coup de main pour le site internet, les applications ou les serveurs.

« Comme professionnel, tu as pas mal de temps libre. J’allais à l’entraînement le matin, puis je rentrais à mon appartement vers 13 h et je commençais mon travail. […] C’était une expérience fantastique, j’y ai beaucoup appris et j’appréciais le fait d’avoir des choses productives à faire l’après-midi et le soir avec d’autres personnes s’intéressant à la technologie. »

On l’a deviné, le nouveau retraité ne se retrouve pas devant une page blanche – ou un écran blanc. Il demeure maintenant à New York, où il a récemment fondé Hex Ventures, une entreprise spécialisée dans la gestion des connaissances. Mais quoi qu’il fasse et peu importe ce que l’avenir lui réserve, il restera toujours l’auteur DU but, un certain soir de mars 2015 à Montréal.

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