Naissances par césarienne

Les microbes vaginaux maternels à la rescousse

Les bébés nés par césarienne sont plus à risque de souffrir de certains troubles immunitaires, comme l’asthme. Des chercheurs de New York pensent avoir trouvé une solution à ce problème : exposer les nouveau-nés aux microbes vaginaux de leur mère.

« La flore microbienne des bébés nés par césarienne est très différente de celle des bébés nés par voie naturelle », explique Jose Clemente, de l’école de médecine Mount Sinai à New York, qui est l’auteur principal de l’étude publiée en janvier dans la revue Nature Medicine. « Ça semble augmenter le risque d’obésité, d’asthme et d’autres troubles immunitaires. Nous avons voulu vérifier si on pouvait simuler l’exposition au microbiote vaginal maternel. »

IMPRÉGNER LE BÉBÉ DE LA MICROFLORE MATERNELLE

Les obstétriciens new-yorkais ont inséré pendant une heure une gaze stérile dans le vagin de la mère, juste avant la césarienne. Ils ont immédiatement après la naissance déposé pendant trois minutes la gaze sur le nez et la bouche, puis le reste du corps, du nouveau-né.

« Le microbiote des bébés traités n’était pas identique à celui des bébés nés par voie naturelle, mais il s’en approchait, dit le Dr Clemente. Nous allons maintenant vérifier si le changement se maintient et, avec un nombre plus grand de bébés, vérifier s’il y a des contre-indications, des infections. Il faudra aussi attendre quelques années pour voir si le risque d’asthme est moins grand. »

Certaines femmes se servent déjà de cette pratique, selon Isabelle Boucoiran, une gynécologue-obstétricienne de l'hôpital Sainte-Justine à qui La Presse a demandé de commenter l’étude.

« Quand je faisais mon fellowship sur le microbiote vaginal à Vancouver, il y avait des femmes "granolas" qui nous faisaient la demande de ce type de procédure après la césarienne, dit la Dre Boucoiran. Il faudra vérifier les risques potentiels avant de changer les pratiques, ça va prendre du temps. Et il n’est pas prouvé que l’asthme ou les maladies inflammatoires de l’intestin sont liés au microbiote différent des bébés nés par césarienne. »

Le Dr Clemente a lui aussi déjà reçu des appels de femmes au sujet de l’étude. « Certaines voulaient faire la procédure à la maison, quelques jours ou quelques semaines après avoir accouché par césarienne, dit-il. Nous leur avons déconseillé de le faire. Il ne semble pas y avoir des problèmes d’acceptabilité sociale. »

L’asthme est-il un problème assez important – compte tenu de la faible augmentation du risque – pour justifier de telles recherches et de tels changements ? « C’est bénin, mais on parle de la qualité de vie, dit la Dre Boucoiran. Ça peut aussi affecter la socialisation et la scolarisation. »

IMPACT SUR LE DÉVELOPPEMENT DU SYSTÈME IMMUNITAIRE

Les chercheurs new-yorkais ont suivi les 18 bébés de l’étude, dont 11 étaient nés par césarienne, pendant un mois. Ils ont maintenant recruté 70 autres bébés nés par césarienne et ont accumulé 10 000 échantillons de leur microbiote. « Le microbiote des bébés nés par césarienne semble rester différent de celui des autres bébés pendant plusieurs mois, au moins quatre mois, selon des données non publiées, dit le Dr Clemente. Cette fenêtre au début de la vie semble cruciale pour le développement du système immunitaire. »

Seules les césariennes planifiées seraient concernées par ce traitement. Dans le cas des césariennes d’urgence, il faut intervenir rapidement et les bébés sont souvent exposés au microbiote vaginal maternel pendant la tentative d’accouchement par voie naturelle.

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